Modèles de questionnaires pour évaluer les difficultés d’implantation de technologies électorales
Modèles de questionnaires pour évaluer les difficultés d’implantation de technologies électorales
ACE, 2017 Septiembre 06 11:11ACE, le 27 avril 2015
Cette question est publiée par ACE au nom d’un membre du Réseau des experts, Waqo Shuke Galma.
Question :
Bonjour, je suis un étudiant diplômé à une université du Royaume-Uni et je travaille sur un projet de recherche intitulé « Les enjeux inhérents à la gestion des technologies électorales dans les pays en développement ». Au fond, l’objectif est d’explorer les nombreux enjeux entourant l’implantation et la gestion de technologies électorales dans des environnements politiques hautement instables.
J’élabore actuellement un questionnaire qui sera utilisé dans le cadre de cette recherche. Je serais reconnaissant de recevoir des suggestions de questions à poser ou d’un modèle de questionnaire à adopter.
Résumé des réponses :
Le Réseau des experts a offert des exemples d’enjeux auxquels font face des pays instables lors de l’implantation de technologies électorales, tels que :
· la bonne volonté du pays à implanter les technologies et sa capacité à a) décider quelles technologies répondent à ses besoins et à b) entretenir ladite technologie une fois qu’il se l’est procurée
· l’acquisition de technologies relativement avancées pour certaines étapes précises, comme l’inscription électorale. Ces technologies peuvent être acquises par l’entremise de fonds de donateurs et de vendeurs. Généralement, la technologie répond correctement ou bien aux besoins du pays. Toutefois, après les élections, le pays est laissé à lui-même dans la gestion de la technologie, et lorsque vient le temps de tenir de nouvelles élections, l’équipement s’est détérioré à un point tel qu’il est plus économique de le remplacer que d’essayer de le réparer.
· l’envoi d’un expert en technologies pour appuyer l’implantation. Les donateurs envoient un expert en technologies qui est chargé de porter assistance lors de l’implantation des technologies. Cependant, plutôt que de profiter de son assistance et de son expertise durant un cycle électoral complet, ce qui permettrait à l’équipe de l’OGE d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour entretenir la technologie, l’expert est habituellement licencié une fois l’implantation complétée.
· la prescription de technologies par des employés sans expérience, laquelle s’avère souvent inadéquate. Prescrire une technologie fait partie du projet, prend du temps et doit être fait par des professionnels d’expérience.
· le manque de confiance ou même carrément la suspicion de la population envers les données informatisées, que ce soit par ignorance ou dans une volonté de miner la crédibilité des résultats. Il est presque impossible de faire valoir que l’information est exacte, surtout lorsque les gens ne veulent pas l’accepter.
· une connexion difficile à internet, que ce soit en raison de la qualité du réseau, de la pauvreté ou du manque de connaissances technologiques.
Les membres du Réseau des experts ont aussi proposé une liste d’exemples de questions.
L’implantation des technologies était-elle fondée sur une évaluation rigoureuse des besoins du pays ?
L’OGE (ou le gouvernement) a-t-il été influencé par des intérêts commerciaux (de vendeurs ou de gouvernements ayant des objectifs commerciaux) ?
Quels facteurs ont motivé la décision de faire appel à la technologie (ou à cette technologie en particulier) dans le cadre des élections ?
Comment l’OGE ou le gouvernement s’est-il procuré cette technologie ? Le document d’approvisionnement était-il complet ? L’approvisionnement s’est-il révélé problématique ou controversé ? Y a-t-il eu des litiges ?
Quel était le niveau de compétitivité du processus d’approvisionnement ?
Quels ont été les délais de livraison de la technologie ?
Dans le passé, comment s’était déroulée l’implantation de technologie pour l’OGE ? Et la gestion de grands projets de TI ? Ou encore l’approvisionnement de technologie ?
Finalement, en se basant sur leur domaine de spécialité, les membres du Réseau des experts ont offert des exemples de difficultés rencontrées lors de l’implantation de technologie électorale et de questions que ces difficultés ont soulevées.
Un exemple tiré des Balkans (les élections locales de 2007 en Albanie) est d’installer des caméras à chaque bureau de vote. Il s’agit d’un bon exemple d’un des enjeux principaux des outils électoraux modernes, qui devraient en principe accroître la transparence.
Est-ce que le projet d’implantation de technologie est réaliste, autant en ce qui concerne les coûts que les aspects techniques ? Dans la plupart des cas, la réponse est non.
S’agit-il d’un coup politique plutôt que d’une mesure servant réellement à améliorer le processus électoral ? La plupart du temps, la réponse est oui.
La technologie augmente-t-elle vraiment la transparence et assure-t-elle réellement un scrutin plus juste, ou peut-elle être utilisée pour abuser du système à l’avantage d’un groupe particulier (ce qui doit être craint) ou mener à de faux résultats en raison d’une faute technologique (voir l’exemple de la Floride en 2000) ? La présence de caméras aux bureaux de vote, qui doit servir à améliorer la transparence, pourrait rapidement devenir un instrument d’intimidation et de dissimulation de la fraude. Tout dépend de l’utilisation qu’on fait de la technologie.
Un autre exemple est tiré des élections tunisiennes de 2014. La plate-forme USSD a été vastement utilisée lors du processus d’inscription électorale, mais la plupart des partis politiques ont refusé la tabulation électronique des résultats. Ce faisant, l’ISIE (l’OGE tunisienne) a adopté la tabulation manuelle.
Durant les élections soudanaises de 2009, les consultants internationaux ont fait face à une dure réalité. Selon le ministère des affaires intérieures du Soudan, des trente millions de citoyens, seul 1,5 million possédait des pièces d’identité. Le registre électoral a été mis sur pied par une équipe d’identificateurs. Les centres électoraux pouvaient prendre forme d’une tente installée au milieu de nulle part servant à offrir des services à des villages isolés. Les fonctionnaires électoraux y étaient assis sur le sable, utilisaient les boîtes de scrutin comme tables, surveillés par un policier assis plus loin, sous un arbre, la cigarette à la bouche. Aucun représentant d’autres listes n’était présent, sans parler d’observateurs locaux ou internationaux. Dans le Soudan du Sud, on utilisait des camions, des canots et des ânes pour transporter des boîtes de scrutin dans des villages éloignés.
Membres ayant contribué à cette réponse collective:
David Kuennen
Saad Alrawi
Roger Thord-Gray
Abdurashid Solijonov
David George Ian Mathieson
Phyo Tin Oo
Idi Boina
Mustafa Safwat Sidqi
Victor Huge Ajila
Ronan McDermott
Christian Geosits
Sameer Dwaikat
Francisco Barrera
Hedi Trabelsi
Sources externs (en anglais)
Implementing and Overseeing Electronic Voting and Counting Technologies. NDI and IFES. 2013. http://www.ifes.org/~/media/Files/Publications/ManualHandbook/2013/Implementing_and_Overseeing_Electronic_Voting_and_Counting_Technologies.pdf
Handbook for the Observation of New Voting Technologies. OSCE/ODIHR. 2013. http://www.osce.org/odihr/elections/104939?download=true
Direct Democracy: Progress and Pitfalls of Election Technologies. IFES. 2011.http://ifes.org/~/media/Files/Publications/Books/2011/20111026_Direct_Democracy_Progress_and_Pitfalls_Election_Technology_Yard.pdf
Introducing Electronic Voting: Essential Considerations. International IDEA. 2011. http://www.idea.int/publications/introducing-electronic-voting/index.cfm
Comparative data on the use of ICT technology in elections collected by IDEA: http://www.idea.int/elections/ict/index.cfm