Cette question est publiée par ACE au nom d’un membre de Mazen Alkadi, président de la University Youth Foundation for Development (UNYFOU).

Je cherche à récolter des témoignages faisant état de campagnes de sensibilisation citoyenne mises en place durant une période d’inscription électorale qui ont été efficaces. Ces témoignages serviront à un projet sur lequel je travaille actuellement afin de sensibiliser les citoyens au processus d’inscription électorale au Yémen. La Commission Suprême pour les Élections et le Référendum (CSER) entame la mise en place d’un système électronique d’inscription des électeurs.

Mes meilleures salutations,

Mazen Alkadi

Résumé des réponses

Les membres du Réseau des experts ont répondu à cette question en faisant référence à des exemples internationaux de sensibilisation aux questions entourant les élections et l’inscription électorale. Les recommandations sont catégorisées en groupes cibles de sensibilisation : les médias et les populations locales. Ces recommandations sont suivies d’autres conseils généraux. Voici un résumé des réponses.

1) Sensibilisation par les médias 

• Les méthodes, les outils et les instruments d’éducation et de sensibilisation des électeurs dépendent en grande partie du contexte du pays dans lequel l’événement a lieu, surtout lorsque l’on prend en compte l’émergence et la disponibilité de médias sociaux très divers et de moyens de communication modernes.
• Il faut présenter l’information dans la langue de chaque nation.
• Avant et pendant le scrutin, la campagne médiatique devrait être axée sur la diffusion quotidienne d’émissions radiophoniques et de télévision à fort contenu électoral et sur la sensibilisation des populations à se faire enrôler et à accomplir leur devoir civique. Les actions suivantes pourraient être menées.
• Mener la campagne sous forme publicitaire et radiophonique (30 à 60 secondes) et aborder l’inscription, le retrait des cartes d’électeurs et le vote ;
• La mise en place d’un serveur de diffusion d’information destinée aux jeunes par SMS sur les échéances et d’autres notions du processus électoral ;
• La confection et diffusion de communication contenant des messages clés sur les élections (affiches, dépliants, casquettes…) ;
• L’impulsion de débats thématiques sur le processus électoral en vue de le rendre transparent et crédible, tout en élargissant la participation des citoyens. Les thèmes abordés peuvent être les jeunes et les élections, les femmes et les élections, etc.
• Les médias devraient aborder le caractère secret du vote, donner de l’information sur les différents partis et les candidats en lice ainsi que sur le processus de scrutin.

2) Campagne de proximité 

• Afficher des publicités dans des espaces de divertissement, dans des stations de transport en commun, dans les universités et sur les autobus qui circulent en campagne.
• Mettre l’accent sur l’expertise et l’expérience des habitants locaux quant aux avenues de sensibilisation des électeurs.
• Créer un cadre de consultation dans les arrondissements, les départements, les villages et cantons qui pourront sensibiliser les électeurs aux procédures et aux droits électoraux dans les langues locales.
• Sensibiliser par l’entremise de jeux de rôle, de projections et de sketch qui ont pour sujet les opérations électorales (l’inscription, le vote).
• Organiser des caravanes et des messagers mobiles qui pourront rejoindre toutes les populations en milieu rural et urbain.

3) Recommandations générales 

• L’élaboration d’une bonne campagne de sensibilisation devrait être basée sur quatre points principaux :
• Les élections et la démocratie — les électeurs devraient savoir pourquoi ils doivent participer aux opérations et comment leur participation contribue au bon fonctionnement de la société.
• Le rôle, la responsabilité et les droits des électeurs — cela les motivera.
• L’importance de chaque vote — peu importe le système utilisé, chaque voix peut faire la différence.
• Le caractère secret du vote — les électeurs sont protégés par la confidentialité.
• Mis à part ces quatre principes, l’OGE devrait prendre en considération la réalité propre à son environnement, le contexte dans lequel l’opération a lieu et orienter son message selon cette réalité.
• Des messages préétablis peuvent être un atout à explorer, mais il faut aussi prendre en compte le contexte politique, social et culturel de chaque nation et adapter les messages en conséquence.
• Qu’il s’agisse de sensibilisation par les médias ou de proximité, il est important de concevoir des messages clairs, neutres et informatifs sur les procédures électorales.
• Il est aussi important de favoriser la vulgarisation et la compréhension de textes officiels (loi électorale, système électoral, procédures, etc.).

4) Exemples internationaux 

Sierra Leone 

• En Sierra Leone, où il existe des limites de nature socio-économique et infrastructurelle dans l’utilisation des médias, la commission électorale s’est grandement appuyée sur le contact direct en utilisant des mégaphones lors de rencontres publiques.
• La stratégie était centrée sur des acteurs enracinés dans la communauté qui avaient été choisis parmi différents acteurs politiques (partis politiques, groupes de femmes ou de jeunes, représentants de personnes handicapées, de leaders traditionnels ou religieux) au niveau le plus bas de la représentation politique (circonscription).
• Surnommés les WEEC (Comités d’éducation électorale de circonscription), ces groupes étaient l’organe de sensibilisation de l’OGE sous la direction et la supervision de coordonnateurs nommés par la commission.
• Le rôle de ces comités de liaison a efficacement complété les stratégies de contact conventionnelles de la presse écrite et des médias sociaux. Cette initiative est antérieure à la première inscription électorale biométrique de 2012, pour laquelle la participation a été massive.

Bangladesh 

En 2012 et en 2014, de très grandes campagnes ont été menées.

• Émissions télévisées
• Publicités dans les journaux.
• Programmes de sensibilisation sur les chaînes de radio nationale et communautaire.
• Bannières suspendues affichant des messages et des lieux d’intérêt public.
• Distribution de dépliants dans les établissements d’enseignement, dans les assemblées publiques, etc.
• Utilisation de haut-parleurs pour encourager les gens à aller voter.
• Diffusion de messages par la chaîne stéréo des mosquées.
• Théâtre dans les espaces publics.
• Etc.

Cameroun

Élections Cameroun (ELECAM) utilise les méthodes suivantes :

• Des alertes radio sont diffusées à autant de stations que possible.
• Une émission radiophonique est diffusée tous les mardis à 17 h sur la chaîne de radio et de télévision nationale (CRTV)
• Des passages télévisés de sensibilisation sont diffusés.
• Des bannières sont affichées et des dépliants sont distribués.
• Des rencontres avec les parties prenantes sont organisées.
• Les messages des chefs traditionnels sont transmis à leurs subalternes qui les transmettent ensuite aux chefferies concernées.
• Les chefs de chefferies font de même lors de rencontres.
• Des rencontres avec des acheteurs et des vendeurs dans des marchés sont organisées.
• Le chef de chaque branche supervise un journal mensuel gratuit dont la raison d’être est la sensibilisation.
• Le président et le directeur général de l’OGE ainsi que d’autres directeurs impliqués directement accordent régulièrement des entrevues à des journalistes.
• Les membres du comité directeur électoral font des visites de terrain durant lesquelles ils s’entretiennent avec des officiers du gouvernement local qui expliquent ensuite à la population locale l’objectif et l’importance de leur visite.
• Puisque le Cameroun est un pays bilingue, toutes ces activités sont réalisées en français et en anglais.

Kenya

L’expérience kenyane est ne fait pas l’unanimité, mais elle a tout de même permis d’inscrire 14,3 millions de personnes en 30 jours. Certaines méthodes adaptées aux jeunes ont été utilisées :

• La participation d’étudiants universitaires ou collégiaux comme bénévoles pour encourager les gens à aller voter.
• La présence lors d’événements sportifs.
• Des marathons d’inscription électorale dans des villes d’importance comme Mombasa et Eldoret.
• Des tournois de football/soccer au niveau des circonscriptions.
• Utilisation de spectacles itinérants de musique et de comédie partout au pays.
• Des campagnes de porte-à-porte.
• La collaboration de leaders religieux et traditionnels lors d’événements.
• L’utilisation de médias sociaux tels Facebook, WhatsApp et Twitter.
• La Commission électorale indépendante du Kenya, l’IEBC, gère activement une page Facebook. Elle est probablement l’institution la plus suivie par le public au Kenya.
• L’utilisation de panneaux d’affichage électroniques placés à des endroits stratégiques où des milliers de passants circulent chaque jour.
• Par exemple, des panneaux d’affichage ont été installés aux deux côtés du traversier Likoni à Mombasa et le long d’importants ronds-points et carrefours.
• La présence dans toutes les stations de radio et de télévision, de la presse écrite, des médias web, des événements médiatiques d’importances, des talk-shows et des publicités.
• La collaboration avec des parties prenantes et des partenaires tels des partis politiques, des leaders locaux, des groupes d’intérêt, etc.
• La collaboration avec entre autres la société civile, les médias, les organismes d’État, les écoles, les collèges et les universités.

• Membres ayant contribué à cette réponse collective:
• Aiah Stephen Mattia
• Abdul Alim
• Susana Dione Ngole Epie
• Dogon Guida Saidou
• Víctor Hugo Ajila
• Agbokousse Adje Ayao 
• Mourad Wederni 
• Evelyne Ogandaga
• Abdiwahidi Hussein
• Hadiatou Ouattara