La répartition du financement public direct [1] est fondée sur une formule déterminant le montant que chaque parti ou candidat doit recevoir. Trois grands principes peuvent gouverner la répartition : l’égalité, la proportionnalité et les besoins. Le plus souvent, la formule choisie combine ces trois principes. Par exemple, tous les partis représentés au Parlement peuvent recevoir un petit montant égal, ou au contraire un montant plus élevé en proportion des suffrages recueillis à la dernière élection. Un montant peut également être octroyé aux partis dont c’est la première élection. Enfin, les fonds peuvent être répartis selon différentes formules, en fonction des utilisations permises ou obligatoires.
La répartition fondée sur l’égalité peut prendre les formes suivantes :
- Un montant égal est versé à tous les partis ou candidats en lice à l’élection. Ce type de répartition peut être très coûteux, et risque d’encourager des partis politiques qui ne cherchent pas à disputer sérieusement l’élection ou à influencer la politique, mais seulement à obtenir une part de l’argent des contribuables.
- Un montant égal est versé aux partis ayant obtenu un certain nombre de sièges à la dernière élection.
Le versement de montants égaux uniquement aux partis ayant fait élire un certain nombre de candidats permet de parer au risque de versement de fonds publics à des partis frivoles, mais peut également décourager les nouveaux partis et candidats. D’ailleurs, comme tous les partis ne peuvent ne pas être représentés à l’assemblée législative, les petits partis feront toujours l’objet d’une discrimination. Cette discrimination peut être utile, si elle permet à l’assemblée législative d’être une entité décisionnelle fonctionnelle. En revanche, elle peut avoir des conséquences imprévues si le nombre de sièges détermine le financement public versé. Comme ce mode de répartition est fondé sur les partis politiques, il est courant dans les pays où le système électoral est axé sur les partis plutôt que sur les candidats.
- Un montant égal est versé à tous les partis et candidats représentés à l’assemblée législative.
Un plus grand nombre de partis et candidats touchent ainsi un financement, mais les petits partis et les nouveaux partis restent désavantagés.
- Un montant égal est versé à tous les partis et candidats qui ont reçu un certain nombre de suffrages à la dernière élection.
On peut élargir encore le groupe des entités financées en accordant des fonds publics à tous les partis et candidats ayant reçu une certaine proportion (habituellement 1 à 2 %, plus rarement un nombre absolu) du total des votes exprimés à la dernière élection, sans nécessairement avoir été élus.
La répartition est proportionnelle lorsque les fonds touchés par les partis ou les candidats sont fonction par exemple du nombre de candidats présentés ou de votes reçus. Les critères suivants peuvent alors être employés :
- Les fonds sont accordés proportionnellement au nombre de candidats présentés par chaque parti.
Cette méthode de répartition est surtout utilisée dans les pays où le système électoral est axé sur les partis et non sur les candidats.
- Les fonds sont accordés proportionnellement à la « représentativité » de la liste des candidats présentés.
Dans ce cas, les fonds publics servent à encourager les partis à accorder l’investiture à davantage de femmes ou de candidats de groupes sous-représentés.
- Les fonds sont accordés proportionnellement à l’argent recueilli (subventions de contrepartie).
On reproche souvent au financement public direct de briser le lien de dépendance qui doit exister entre les partis et candidats et leurs membres ou partisans, lien qui garantit qu’on écoutera la base au moment de choisir un chef ou une politique. Le système des « subventions de contrepartie » vise à pallier cette inquiétude : il accorde aux partis et candidats des fonds publics en proportion des sommes qu’ils ont obtenues de leurs membres ou partisans. Cette méthode peut toutefois désavantager les petits partis ou les nouveaux partis, s’ils sont incapables d’organiser des campagnes de financement efficaces.
- Les fonds sont accordés proportionnellement aux sièges remportés à la dernière élection.
Comme on l’a vu plus haut, les petits partis font l’objet d’une certaine discrimination dans tous les systèmes électoraux, au nom de l’efficacité décisionnelle de l’assemblée législative. Or, cette discrimination peut être lourde de conséquences et particulièrement désavantageuse pour les petits partis si les fonds sont accordés proportionnellement au nombre de sièges remportés. Par contre, cette méthode fait que seuls les partis ayant démontré leur attrait populaire sont financés.
- Les fonds sont accordés proportionnellement aux suffrages obtenus par les partis et les candidats à la dernière élection.
Cette méthode désavantage encore les petits partis et les nouveaux partis, mais dans une moindre mesure que la méthode fondée sur les sièges remportés.
- Les fonds sont accordés proportionnellement au nombre de membres des partis ou à d’autres preuves d’appui populaire.
La répartition des fonds selon le nombre de sièges ou de votes obtenus est fondée sur l’idée que les partis doivent prouver leur attrait populaire avant de toucher des fonds publics. Or, cet attrait se démontre aussi par le nombre de membres inscrits au parti, et si les fonds publics sont répartis en fonction du nombre de membres, les nouveaux partis jouissant d’un grand appui ont une meilleure chance d’en recevoir. Cela dit, la longueur des listes de membres d’un parti ne permet pas nécessairement de présumer de la proportion des suffrages qu’il obtiendra à l’élection générale, et la vérification des registres des partis par les autorités électorales peut être difficile et longue.
Enfin, on peut répartir les fonds en fonction des besoins spéciaux des partis politiques, afin d’égaliser les chances entre les partis :
- Des fonds sont accordés aux nouveaux partis. L’entrée en scène de nouveaux partis politiques doit être encouragée, mais on reproche souvent au financement public de perpétuer le statu quo, aidant les partis établis de longue date à rester au pouvoir. On peut compenser ce risque en accordant des subventions aux nouveaux partis.
- Des fonds sont accordés aux petits partis. Les petits partis sont désavantagés par les formules de répartition fondées sur le nombre de sièges ou de votes obtenus à la dernière élection. On peut donc verser des subventions aux partis de petite taille si on juge qu’il est dans l’intérêt public qu’ils partagent la scène avec les grands partis. On peut aussi, pour les aider, modifier la formule de répartition proportionnelle des fonds de façon à accorder davantage d’argent pour les premiers pourcentages de suffrages que pour les suivants.
- Des fonds sont donnés aux partis ou candidats représentant les minorités. De façon à encourager la participation des groupes sous-représentés, on peut verser des subventions aux partis qui présentent des candidats issus de groupes minoritaires, ou les dispenser d’autres critères d’admissibilité au financement.
[1] Voir aussi: Kupferschmidt, David. International IDEA (2009). Illicit Political Finance and State Capture. http://www.idea.int/resources/analysis/upload/IDEA_Inlaga_low.pdf
Carlson, Dahl, Walecki. IFES (2006): Contemplating Political Finance Reform in Post-Conflict Environments .
http://www.ifes.org/publication/0b087c527792ae130507f80957ad3f2b/Poltiical%20Finance%20in%20Post-Conflict%20Societies-small.pdf
Governance and Social Development Resource Centre (GSDRC), Helpdesk Research Report: Political Party Financing. 05/06/08. http://www.gsdrc.org/docs/open/HD532.pdf. Voir aussi: GSDRC website resources on Political Party and Candidate financing during an elections campaign (2012): http://www.gsdrc.org/go/topic-guides/political-systems/political-finance