Sièges garantis
Des sièges réservés sont aussi un moyen d'assurer la représentation de groupes minoritaires spécifiques à l'assemblée législative. Des sièges sont attribués à des minorités ethniques et religieuses déterminées dans des pays aussi divers que :
- la Jordanie (chrétiens et circassiens);
- l'Inde (tribus et castes inscrites);
- le Pakistan (minorités non musulmanes);
- la Nouvelle-Zélande (Maoris);
- la Colombie (communautés noires);
- la Croatie (minorités hongroise, italienne, tchèque, slovaque, ruthénoise, ukrainienne, allemande et autrichienne);
- la Slovénie (Hongrois et Italiens);
- Taïwan (communauté aborigène);
- les Samoa occidentales (minorités non indigènes);
- le Niger (Touaregs) et l'Autorité palestinienne (chrétiens et samaritains).
Les représentants de ces divers sièges réservés sont habituellement élus de la même façon que les autres députés de l'Assemblée, mais ils sont parfois élus seulement par une communauté minoritaire particulière qui est déterminée par la loi électorale. Personne ne nie la valeur intrinsèque de la représentation de petites communautés d'intérêt particulier. Certains cependant sont d'avis qu'il vaudrait mieux mettre en place des structures qui conduiraient tout naturellement plutôt que par décret à une assemblée représentative. Des sièges contingentés peuvent engendrer de l'amertume chez des populations majoritaires et éveiller la méfiance de divers groupes culturels.
Au lieu de recourir à des sièges formellement réservés pour favoriser la représentation accrue de groupes minoritaires, les régions peuvent être « sur-représentées ». C'est notamment le cas du Royaume-Uni, où l'Écosse et le pays de Galles comptent plus de députés à la chambre des communes qu'il ne leur serait alloué selon leur population, si tel était l'unique critère. La même situation prévaut dans les régions montagneuses du Népal. On utilise en Mauritanie le système du « meilleur perdant ». Il permet à certains candidats, qui n'ont pas obtenu assez de suffrages pour être élus mais qui représentent un groupe ethnique particulier, de se voir attribuer des sièges afin d'équilibrer l'ensemble de la représentation ethnique. On peut aussi obtenir le même résultat en manipulant les frontières des circonscriptions électorales. Dans le passé aux États-Unis, la Loi sur le droit de suffrage a permis à des gouvernements de découper des circonscriptions à la fois bizarres et impressionnantes dans le seul but de créer des districts électoraux à majorité noire, latino-américaine ou asiatique-américaine. On peut qualifier d'affirmatif et d'arbitraire ce phénomène de découpage de circonscriptions. Il reste que la manipulation d'un système électoral en vue d'assurer la représentation des minorités peut fort bien provoquer de vives controverses (voir États-Unis : Minorités ethniques et circonscr).
Représentation des Communautés
Quelques sociétés « ethnohétérogènes » ont trouvé le prolongement logique du concept des sièges réservés. Les sièges sont non seulement répartis sur une base communautaire, mais le système de représentation parlementaire lui-même repose aussi sur des considérations communautaires. Il en résulte que d'ordinaire chaque communauté déterminée a sa propre liste et élit seulement des membres de son « propre groupe ». Dans certains cas, cependant, comme à Fidji, de 1970 à 1982, les électeurs pouvaient élire les candidats de leur communauté aussi bien que certains autres candidats « nationaux ».
La plupart des modalités ayant trait aux listes communautaires ont été délaissées une fois qu'on a reconnu que les électorats de ce type, tout en assurant la représentation des groupes, avaient souvent comme effets désastreux de miner les tentatives de compromis entre les différents groupes, vu qu'il n'existait entre eux aucun désir d'interaction. Les questions relatives à la définition des membres de groupes particuliers et à la distribution équitable d'électorats entre ces derniers étaient également parsemées d'embûches. En Inde, par exemple, les électorats séparés qui existaient sous l'ancien régime colonial - pour les musulmans, les chrétiens, les sikhs et autres - ont été abolis lors de l'accession du pays à l'indépendance. Toutefois, on y maintient encore certains sièges réservés pour assurer la représentation des tribus et des castes inscrites. Des systèmes similaires à liste communautaire, utilisés à diverses reprises par le Pakistan, Chypre et le Zimbabwe, ont été également abandonnés. En dépit de l'utilisation contestée de son système, Fidji continue à élire son Parlement à partir de listes communautaires séparées pour les Fidjiens autochtones, les Indiens et les électeurs « généraux ».
L'exemple prépondérant d'un système à liste communautaire au sein des démocraties actuelles est sans doute celui de la liste séparée facultative des électeurs maoris de la Nouvelle-Zélande (voir Nouvelle-Zélande : une démocratie à la westminster solidement ancrée qui passe à la RP). Ceux-ci peuvent choisir d'être sur la liste communautaire nationale ou sur la liste maorie spécifique qui élit cinq députés maoris. Les résultats des premières élections à scrutin de liste de 1996 semblent avoir affaibli la logique du système communautaire, car deux fois plus de députés maoris ont été élus à partir de listes générales que de listes maories spécifiques. Fidji veut s'éloigner de son système à liste communautaire et se tourner vers une concurrence électorale plus ouverte dans le but d'encourager le développement d'un système politique « multi-ethnique ».