Mécanismes de contestation des résultats
L’existence d’un mécanisme de contestation à chaque étape du processus de centralisation des résultats est souhaitable pour trois raisons : assurer la transparence du processus électoral, contraindre les autorités électorales à rendre des comptes et garantir l’acceptation de l’issue du scrutin par toutes les parties (faire référence ici à la publication GUARDE).
Les partis et les candidats mécontents doivent pouvoir contester les résultats sur la base d’informations factuelles et ont droit à ce qu’une instance indépendante et impartiale statue sur le bien-fondé de leur réclamation.
Dans les pays où plusieurs institutions sont chargées de régler les réclamations, il est important de délimiter clairement leur champ d’action respectif afin d’éviter les dépôts de plainte auprès d’une institution non concernée ou de deux institutions, ce qui aurait pour résultat de gaspiller les ressources et de retarder la décision.
L’existence de mécanismes efficaces de contestation renforce la crédibilité des résultats électoraux. Si un parti ou un candidat estime qu’une élection n’a pas été menée dans les règles, la possibilité d’en contester les résultats permettra de corriger les erreurs de bonne foi ainsi que de repérer d’éventuelles manœuvres frauduleuses et d’y remédier.
À l’inverse, si la plainte est sans fondement, le processus de contestation en informera l’opinion publique, ce qui renforcera la crédibilité du résultat de l’élection.
L’absence de possibilités de contestation satisfaisantes pour toutes les parties risque de provoquer le rejet des résultats, avec pour conséquences potentielles des tensions civiles ou politiques et des actes de violence.
Il ne faut pas non plus que la contestation des résultats entraîne un retard déraisonnable du processus électoral. Si la mise en place des parlements et la formation des gouvernements tardent trop, un risque de troubles civils ou politiques ou l’exacerbation de tensions existantes est possible. C’est pourquoi certaines instances juridictionnelles ne donnent pas suite aux réclamations sans influence potentiellement déterminante sur l’issue du scrutin.
En général, la contestation électorale peut prendre plusieurs formes et intervenir à plusieurs moments du processus. Souvent, la plainte doit remplir certains critères et être déposée dans un délai donné. Le jugement doit également être prononcé sous un certain nombre de jours afin de ne pas retarder indéfiniment la validation des résultats.
Les opportunités de contestation des résultats et la facilité avec laquelle les plaintes sont tranchées dépendent des modalités de vote utilisées (bulletins papier, vote mécanique ou électronique).
Contestation des résultats pendant le dépouillement
À la première étape du dépouillement des bulletins papier (ouverture des urnes et décompte initial des suffrages), les représentants des partis et des candidats ont souvent le droit de contester la validité d’un bulletin ou son attribution à un candidat ou un parti.
Soit le responsable du dépouillement est habilité à statuer sur les bulletins litigieux, soit ils sont mis à part jusqu’à ce qu’un responsable électoral de rang supérieur décide ultérieurement de leur sort.
De même, pendant le recomptage effectué au centre de dépouillement régional ou central, les représentants des partis et des candidats peuvent être autorisés à contester à nouveau les décisions prises lors du dépouillement. À ce stade, il est généralement possible de revenir sur la décision relative à un bulletin litigieux prise lors d’un comptage antérieur.
En cas de recours au vote mécanique ou électronique, il est souhaitable que les partis politiques, les candidats et les observateurs aient le droit d’inspecter les composantes de la piste de vérification et tous les documents sources utilisés, ainsi que de contester les résultats au nom d’irrégularités présumées.
À ce stade, les méthodes de contestation du comptage varient selon les pays. Très souvent, des réclamations verbales suffisent, mais dans certains cas, un processus écrit plus formel s’avérera préférable.
Lorsque des bulletins papier sont mis de côté en attente de la décision d’un responsable de rang supérieur, il faut les empaqueter séparément et étiqueter clairement les paquets aux fins d’identification ultérieure. Ces paquets pourront également être conservés à part afin qu’une cour ou un tribunal puisse statuer à leur égard si nécessaire.
Les catégories de personnes autorisées à contester une décision de comptage varient. Il s’agit souvent des représentants des candidats et/ou des partis mais aussi, dans certains cas, d’électeurs inscrits ainsi que d’observateurs locaux ou internationaux.
Recomptage par les organismes électoraux
Dans le cas de bulletins papier, les candidats et/ou les partis politiques sont habituellement autorisés à demander un recomptage à l’issue du dépouillement et après l’obtention d’un résultat.
Il convient alors de recompter tout ou partie des bulletins afin d’assurer à l’ensemble des intéressés l’exactitude du résultat. Selon la technologie utilisée, on pourra également recompter les résultats d’un vote électronique en retraitant les documents originaux saisis, par exemple. Ce n’est cependant pas toujours le cas.
Demandes de recomptage écrites
Les recomptages prenant beaucoup de temps et coûtant cher, l’agent électoral responsable pourra être autorisé à décider s’il convient ou non d’y procéder.
En général, ils n’ont lieu que lorsque qu’une faible différence de suffrages entre le gagnant et le perdant fait planer le doute sur l’exactitude du comptage.
Dans certains pays, les recomptages sont automatiques si le résultat se situe dans une certaine marge. Dans d’autres, ils sont obligatoires en cas de contestation, quelle que soit la marge.
Si le résultat initial est un ex æquo, il est toujours judicieux de procéder automatiquement à un recomptage afin de déceler les éventuelles erreurs dont la correction permettra éventuellement de désigner un vainqueur.
Sinon, la définition d’un résultat électoral « serré » dépendra de la situation locale et de la marge de victoire estimée dans le premier comptage. L’essentiel est que le résultat satisfasse tous les intéressés. Si l’absence de recomptage risque d’entraîner le rejet du résultat de l’élection par un ou plusieurs partis/candidats, il est conseillé de recompter.
Le recomptage peut être total ou partiel. Si la situation le permet, on ne recomptera que certaines catégories de bulletins. Par exemple, on pourra choisir un échantillon aléatoire représentatif pour se faire une idée de l’exactitude du comptage initial.
Le recomptage pourra simplement servir à vérifier que tous les bulletins ont été convenablement répartis. Ou bien il nécessitera de revenir en arrière d’une ou plusieurs étapes et de procéder comme s’il s’agissait du comptage d’origine.
Il convient de tenir des dossiers exhaustifs sur les éventuels recomptages effectués. Ces documents seront nécessaires pour convaincre toutes les parties qu’une procédure adéquate a été suivie et devront éventuellement être présentés en cas de contestation ultérieure des résultats.
Le délai de présentation d’une demande de recomptage doit être limité. Dans la plupart des cas, le recomptage n’est autorisé que pendant une brève période après le comptage, par exemple 24 heures ou 48 heures.
Dans certains cas, il ne peut être demandé qu’avant la déclaration officielle du résultat définitif de l’élection. Passé ce délai, les plaignants doivent présenter un recours devant une cour de justice ou un tribunal.
Si le responsable électoral décide de ne pas recompter, les candidats ou les partis pourront être autorisés à faire appel de cette décision auprès d’une autorité supérieure. Cette dernière, par exemple un responsable électoral de haut rang ou le conseil d’administration de l’OGE, pourra à son tour statuer en faveur ou non de l’exécution d’un recomptage.
Contestation des résultats électoraux devant une cour de justice ou un tribunal
Après les éventuels recomptages administratifs et la publication officielle du résultat par l’autorité électorale, il est possible de le contester en faisant appel auprès d’une cour de justice ou d’une instance juridique spécialisée dans les appels électoraux.
Certains pays mettent en place des tribunaux spéciaux pendant les périodes électorales.
En général, la contestation auprès d’une cour de justice ou d’un tribunal prend la forme d’une requête formelle. Les plaintes peuvent être déposées par des candidats, des partis, des électeurs autorisés à participer à l’élection concernée ou l’administration électorale.
Habituellement, les plaignants doivent argumenter leur réclamation.
Dans la majorité des cas, la possibilité de contestation des résultats électoraux devant un tribunal est limitée dans le temps. Le délai prévu est généralement plus long que pour la demande de recomptage administratif car la nature juridique des procédures requiert davantage de préparation. En outre, la cour ou le tribunal peut devoir rendre sa décision dans un certain délai.
À ce stade, il est possible de contester tout aspect de l’élection, nomment:
- l’exactitude de la liste électorale;
- le fait que les électeurs aient subi une intimidation, reçu des pots de vin ou été empêchés de voter;
- un comportement partisan de la part des responsables électoraux;
- des actes inconvenants de la part des candidats ou des partis;
- le droit d’éligibilité des candidats;
- la suspicion de votes frauduleux;
- l’existence supposée d’erreurs ou d’irrégularités dans le processus de comptage des bulletins;
- le mauvais fonctionnement ou l’altération d’une technologie utilisée dans le processus électoral, notamment le système informatique de gestion des résultats.
Certains pays limitent le dépôt de requête devant une instance judiciaire aux plaintes ou aux appels susceptibles de modifier le résultat. Le plaignant ou le demandeur doit alors démontrer que c’est le cas.
La législation pourra également conférer aux cours de justice ou aux tribunaux chargés des litiges électoraux le pouvoir d’examiner les bulletins et d’autres documents électoraux ou d’ordonner le recomptage des bulletins. En général, ces instances ont le pouvoir de confirmer le résultat initial ou de l’annuler et d’en annoncer un autre. Elles peuvent également être habilitées à ordonner la tenue d’une autre élection.
Il arrive que les cours de justice et les tribunaux soient liés par la jurisprudence issue de décisions antérieures relatives à des cas de contestation électorale. Pour maintenir l’intégrité du processus électoral, il est important d’interpréter le droit électoral de manière cohérente. En particulier, chaque système électoral se caractérise par des règles définissant les mentions/signes utilisables sur les bulletins ainsi que d’autres composantes cruciales du processus.
Dans certains cas, il sera possible de faire appel de la décision d’une cour de justice ou d’un tribunal auprès d’une autorité supérieure. Dans d’autres, les statuts stipulent l’impossibilité de faire appel de la décision d’une instance judiciaire électorale afin d’empêcher les processus juridiques de retarder indûment la publication des résultats électoraux et la mise en place des parlements et des gouvernements.
Durée de conservation des matériels électoraux
Au minimum, les matériels électoraux pertinents sont conservés en lieu sûr jusqu’à ce qu’il ne soit plus possible de contester le résultat de l’élection. Dans certains cas, cette règle nécessite de les conserver pendant toute la durée du mandat parlementaire.
Dans d’autres, ils peuvent être détruits après la date limite de contestation des résultats devant une cour de justice ou un tribunal ou après le règlement d’une plainte. Certains pays inscrivent la période de conservation des matériels électoraux dans la législation. Normalement, elle est d’environ six mois.
Seuls les matériels en rapport avec le résultat de l’élection doivent être conservés, c’est-à-dire, en général, les bulletins papier, les listes électorales, les éventuelles déclarations des électeurs, les résultats du scrutin et tous les documents relatifs aux litiges sur les résultats. En cas de doute, il vaut mieux conserver les matériels plutôt que de les détruire.
Les matériels conservés doivent être protégés contre toute manipulation frauduleuse et le principe de chaîne de traçabilité doit être appliqué. L’organisme responsable doit pouvoir être certain que les bulletins susceptibles d’être recomptés n’ont pas été falsifiés.
À noter que l’archivage des enregistrements électroniques est une activité très spécialisée et que, sans dispositions de stockage spécifiques, les données électroniques ont une durée de vie très courte.
Une fois prise la décision de détruire les matériels électoraux, l’OGE responsable doit s’assurer que la destruction s’opère convenablement. Afin d’assurer la confidentialité du vote, il convient de détruire tous les matériels électoraux susceptibles d’indiquer les préférences des électeurs. Si possible, les documents papier sont recyclés. Il ne faut pas négliger les considérations financières et écologiques car certains matériels, tels que l’encre indélébile contenant du nitrate d’argent, peuvent s’avérer dangereux en grande quantité.
Contestation électorale et processus politique
La contestation électorale peut fortement perturber les processus électoraux et politiques car elle est susceptible de retarder la finalisation des résultats et, du même coup, la première session du nouveau parlement ainsi que la formation du gouvernement.
Cette situation risque de déstabiliser les environnements politiques sensibles et de déclencher des troubles civils. C’est pourquoi une transparence et une redevabilité optimales doivent régir la résolution des plaintes. Cela passe par une planification adéquate, l’allocation de ressources importantes, la formation du personnel, une solide campagne d’information de l’opinion publique et une stratégie de relations publiques efficace.
Le processus électoral a pour but d’élire les parlementaires qui défendront les revendications de leurs électeurs. Les processus de contestation des résultats électoraux doivent viser à ce que les résultats rendent correctement compte des attentes de la population, ce qui nécessite de statuer sur les plaintes avec professionnalisme et célérité.