Les coûts associés à l’intégrité électorale dépendent des systèmes utilisés et de l’ampleur des garanties requises. L’opportunité d’adopter des mécanismes donnés de protection de l’intégrité devrait être soupesée en regard du niveau de risque potentiel pour l’intégrité à chaque étape du processus électoral. Les élections qui ne sont pas intègres ne seront pas perçues comme étant crédibles et les résultats ne sembleront pas légitimes. Il arrive que les candidats et les électeurs craignent de participer lorsque la sécurité n’est pas assurée. Il peut aussi arriver que l’apparence d’irrégularités jette le doute sur la conduite d’une élection et sur la conformité des résultats à la volonté de la majorité des électeurs. Le fait de devoir recommencer les élections à cause de problèmes d’intégrité peut coûter beaucoup plus cher que d’adopter des mesures de garantie préventives.
Les administrateurs électoraux et les concepteurs de politiques devraient déterminer si les coûts de chacun des mécanismes envisagés justifient leur adoption. La question qui s’impose est suivante : comment l’intégrité du processus électoral sera-t-elle touchée si les mesures ne sont pas prises? [1]
Cette évaluation diffère selon le contexte social et politique de chaque pays. Les systèmes électoraux qui sont caractérisés par de hauts niveaux de méfiance adoptent normalement des garanties complexes pour assurer l’intégrité du processus et pour rassurer les participants. Ces garanties peuvent coûter cher, mais les dépenses additionnelles peuvent être justifiées si les résultats mènent à une élection crédible qui est acceptée par le pays. D’un autre côté, dans les systèmes électoraux établis, où les procédures électorales sont de routine et non contestées, les avantages procurés par des garanties supplémentaires peuvent ne pas justifier les coûts supplémentaires.
Certaines mesures de protection de l’intégrité peuvent ne pas occasionner de grandes dépenses. Par exemple, une planification efficace et l’élaboration de bons systèmes ne nécessitent qu’un bon usage du temps et la compétence de professionnels électoraux. Il en est de même pour les mesures de contrôle internes qui font partie de toute administration électorale.
La transparence et le fait de tenir les administrateurs et les fonctionnaires électoraux responsables de leurs actes sont des moyens de garantir l’intégrité et ne coûtent rien. Des protections institutionnelles basées sur un système de vérifications et contrôles sont également un facteur crucial au maintien de l’intégrité et elles n’impliquent pas de coûts financiers additionnels.
Par contre, plusieurs garanties de l’intégrité électorale sont plus coûteuses et nécessitent une évaluation en regard des avantages qu’elles peuvent apporter. Quelles sont les possibilités que le problème en cause se présente vraiment et comment minerait-il l’intégrité de l’élection? À quel point le moyen envisagé est-il efficace? Augmentera-t-il la confiance dans l’intégrité du processus? Augmentera-t-il la crédibilité du processus? A-t-on les ressources nécessaires pour le mettre en œuvre et peut-on le maintenir dans le temps? Y a-t-il des façons moins dispendieuses d’obtenir les mêmes résultats? Les mesures suivantes entraînent des coûts financiers importants :
Un personnel adéquat. Les coûts associés au personnel constituent les dépenses les plus importantes de l’administration électorale. Les risques augmentent si le nombre d’employés est insuffisant ou s’ils ne sont pas bien formés.
Les mesures de protection du matériel électoral peuvent aussi faire augmenter les coûts d’une élection. Par exemple, la numérotation des talons des bulletins de vote augmente les coûts d’impression. En revanche, elle fournit un moyen simple et efficace de retracer les bulletins. Il existe aussi des mesures plus sophistiquées, mais plus coûteuses. L’utilisation d’un filigrane sur le papier à bulletins de vote pour les sécuriser coûtera plus cher que l’utilisation d’un papier ordinaire. Les sources d’approvisionnement d’un papier spécial ou autre matériel électoral spécialisé sont possiblement plus rares; il faut donc plus de temps pour obtenir les fournitures.
L’utilisation des nouvelles technologies peut rendre le système plus intègre, par exemple en informatisant les inventaires et les listes d’inscription et en y intégrant des mesures de vérification et de contrôle. Cependant, le recours aux nouvelles technologies peut aussi créer des risques quant au maintien de l’intégrité, par exemple si l’on prévoit la possibilité de s’inscrire ou de voter en ligne.
La nouvelle technologie peut être dispendieuse, mais les coûts peuvent être amortis dans le temps si l’équipement et les logiciels sont utilisés aux élections subséquentes. Une technologie qui tient compte des conditions locales peut habituellement assurer un rapport coûts-avantages favorable.
Au lieu d’acheter la technologie, on peut du reste louer l’équipement, et ainsi réduire les risques associés à l’obsolescence; ou on peut utiliser l’équipement d’autres organisations comme cela s’est fait aux élections de 1999 en Indonésie où le réseau d’ordinateurs d’une banque a servi pour compter les votes. En de telles circonstances, il faut toutefois examiner les questions d’intégrité associées à l’utilisation d’un système et de personnel provenant de l’extérieur [2] .
L’adoption de moyens technologiques modernes pour améliorer l’intégrité peut s’avérer dispendieuse à court terme en raison des dépenses d’investissement et de formation. Cependant, à long terme, si les moyens sont efficaces, ils peuvent épargner de l’argent.
La surveillance de l’intégrité électorale et l’application de la loi sont des facteurs clés dans le maintien de l’intégrité électorale qui peuvent coûter cher. Toutefois, la surveillance peut apporter des économies à long terme, si elle assure l’acceptation de l’élection par tous les partis impliqués. L’application de la loi, les enquêtes et les procès entraînent des coûts importants mais ils combattent efficacement la corruption, garantissent l’intégrité du processus et aident à prévenir les problèmes futurs.
L’éducation de l’électeur est une autre mesure de protection importante. Toutefois, quand les fonds sont peu élevés, les programmes d’éducation populaire sont parmi les premiers à être sacrifiés. Les administrateurs électoraux peuvent trouver des options peu coûteuses pour disséminer l’information, comme la négociation de temps d’antenne gratuit à la radio et à la télévision, la tenue régulière de conférences de presse et l’utilisation d’organismes non gouvernementaux pour la diffusion de messages d’importance cruciale aux électeurs.
NOTES
[1] Harris, Paul, New Zealand Electoral Commission, communication avec Sue Nelson.
[2] Ibid.