Pour que les mesures d’application de la loi soient efficaces, le contrôleur du financement politique (CFP) doit être libre d’exercer ses pouvoirs exécutoires en matière de financement politique sur des tribunes administratives, civiles et criminelles, et il doit pouvoir recourir à une vaste gamme de peines et de sanctions. Même si le CFP dispose de pleins pouvoirs en matière de surveillance, il ne peut appliquer convenablement les lois en vigueur si on ne lui confère pas le pouvoir d’exercer des sanctions ou d’intenter des poursuites contre les contrevenants. Par exemple, même si le Japon a fixé des exigences considérables à l’égard de la divulgation, les organismes électoraux qui mettent en œuvre la réglementation sur la divulgation ne sont pas autorisés à vérifier les rapports financiers, à faire enquête sur les transactions financières ou à imposer des sanctions aux partis ou aux politiciens [1] . Tout régime de réglementation du financement politique qui ne prévoit pas de sanctions n’a aucun mordant et doit entièrement miser sur la bonne volonté des participants aux élections.
Grâce à une vaste gamme de sanctions, de divers degrés de sévérité, les mesures exécutoires seront plus efficaces et plus uniformes. Parmi ces sanctions, on trouve :
faibles amendes administratives dans le cas d’infractions mineures;
amendes plus élevées dans le cas d’infractions graves;
sanctions pénales dans le cas d’infractions importantes qui minent l’intégrité des élections;
non-remboursement des dépenses électorales, révocation du financement public et inadmissibilité à obtenir du financement dans le futur;
destitution de la législature, inéligibilité à toute élection future et inadmissibilité à être nommé à une charge publique;
dissolution d’un parti;
annulation d’une élection [2] .
Lorsque les lois sur le financement politique ne prévoient que des sanctions sévères, comme l’annulation d’une élection ou des sanctions pénales, il est possible que le CFP hésite à adopter des mesures exécutoires ou encore que le contrevenant exerce une forte opposition à l’endroit du CFP. La croyance générale selon laquelle les sanctions imposées en cas d’infractions relativement mineures sont trop sévères est tout aussi problématique : ceci peut soulever des doutes à l’égard de l’équité du système de financement politique et, par surcroît, laisser croire que la non-application de la loi ou la réduction des accusations en cas d’infraction sont tolérées. En République de Géorgie, par exemple, on a imputé la non-application des lois sur la divulgation à l’absence de peines civiles. En effet, la seule sanction possible en cas d’infraction à cet égard consiste à ne pas pouvoir se présenter à toute course électorale future, mais aucune instance judiciaire ne l’a encore imposée [3] . De la même manière, seuls les tribunaux criminels, et non les tribunaux administratifs ou civils, peuvent appliquer la Loi électorale du Canada. C’est pourquoi le CFP du Canada a élaboré une politique qui consiste à imposer des sanctions mineures dans de nombreux cas d’infraction [4] .
Le choix d’un moment propice est aussi un facteur dont il faut tenir compte lorsqu’on établit un régime exécutoire qui se veut efficace. Lorsqu’il est question de financement politique, certaines mesures exécutoires ne sont pertinentes que si elles sont mises en place pendant la période électorale. Par exemple, si le CFP ne veille pas à ce que les comités de campagne divulguent ponctuellement leurs transactions financières, le public n’aura pas d’information exacte à sa disposition au moment de faire son choix électoral. Lorsque les sanctions ne sont pas évaluées avant le jour d’élection, elles ne peuvent être adoptées à temps et, par conséquent ne contribuent pas à préserver l’intégrité du processus électoral. De plus, la couverture médiatique accordée aux infractions à l’égard du financement pendant une période électorale place l’intégrité des comités de campagne dans la mire du public; cette attention peut dissuader les comités qui envisageraient de contrevenir à la loi de façon beaucoup plus convaincante que toute sanction monétaire imposée après une élection.
NOTES
[1] International Institute for Democracy and Electoral Assistance. Funding of Political Parties and Election Campaigns, 2003, p. 149.
[2] IFES. Enforcing Political Finance Laws: Training Handbook, février 2005, p. 30.
[3] Ibid., p. 16
[4]
Funding of Political Parties and Election Campaigns, p. 153.