Il peut être justifié de faire enquête sur les activités financières d’un participant à une élection lorsque celui-ci dépose un rapport incomplet ou inexact ou encore lorsque le contrôleur du financement politique (CFP) a des motifs de croire qu’il y a eu infraction à la loi. Si certains CFP hésitent à mener des enquêtes, il n’en demeure pas moins qu’elles constituent un volet essentiel du processus de détection des infractions. Lorsqu’un CFP dispose de sa propre capacité d’enquête, il peut déceler et analyser lui-même les fautes commises en matière de financement politique, sans s’en remettre à une autre entité gouvernementale.
Toute enquête peut servir à :
recueillir des renseignements généraux concernant les activités financières d’un participant à une élection, y compris son dossier bancaire et sa fiche de fournisseur;
recueillir le témoignage d’employés, de donateurs et d’autres témoins par l’entremise d’entrevues ou d’autres communications;
recueillir des preuves qu’il y a eu infraction en matière de financement politique et qui serviront dans le cadre de procédures administratives, civiles ou criminelles.
Ayant pris connaissance des résultats de l’examen et de la vérification des renseignements déclarés par un parti ou un candidat ou encore en réponse à une source externe, comme une plainte ou un reportage, le CFP peut décider qu’il est nécessaire d’entreprendre une enquête. Lorsque le CFP dispose d’un système de vérification et d’examen efficace, la plupart des erreurs qui se trouvent dans les rapports et des violations potentielles en matière de financement politique peuvent être décelées à l’interne. Cela dit, même le système de surveillance le plus perfectionné peut tirer profit d’un mécanisme parallèle externe.
Plusieurs gouvernements disposent d’un mécanisme de plaintes qui permet aux citoyens de rapporter tout problème relatif au financement politique ou toute infraction qu’un parti politique, un candidat ou un autre participant aux élections est soupçonné d’avoir commise.
Il importe que le mécanisme de plaintes soit accessible et convivial et qu’il décourage tout adversaire électoral de déposer une plainte non fondée ou de lancer des allégations à l’aveuglette. Le CFP doit établir des normes claires qui exigent, au minimum, que toute plainte soit constructive, fondée sur des faits précis, puis signée et affirmée par le plaignant. Dans le cas des démocraties en transition ou des états dirigés par un parti unique, il est nécessaire d’apporter une certaine forme de souplesse : lorsque le parti au pouvoir y va de menaces de représailles, les citoyens doivent avoir la possibilité de porter plainte de façon anonyme.
En plus de le doter d’un mécanisme de plaintes, il faut conférer au CFP le pouvoir d’ouvrir une enquête lorsque certaines sources, notamment d’autres organismes gouvernementaux, les médias et des organismes non gouvernementaux, lui transmettent des renseignements.
Le CFP peut être habilité à mener lui-même l’enquête sur le terrain, renvoyer le dossier à un autre organisme gouvernemental ou engager un enquêteur privé. Par exemple, la commission électorale nationale de la Pologne renvoie des dossiers à l’instance responsable des impôts, pour enquête [1] . Placé devant une infraction criminelle potentielle, le CFP renvoie souvent le dossier à l’instance fédérale ou étatique responsable de l’exécution de la loi criminelle ou au bureau du procureur. De cette manière, il conserve ses ressources; la décision de mener ou non une enquête sur l’infraction présumée revient toutefois à cet organisme.
L’organisme chargé d’enquêter sur des infractions potentielles en matière de financement politique est tenu de respecter les droits des suspects ou des témoins conférés par la loi, et il doit les informer qu’une enquête est en cours. Dans le cadre d’une enquête criminelle, d’autres droits procéduraux peuvent s’appliquer pendant un interrogatoire, notamment le droit d’un suspect à consulter un avocat et à ne pas s’incriminer. Il faut faire particulièrement attention de s’assurer que toutes les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête sont recevables devant un tribunal civil ou criminel.
Les médias, les organismes non gouvernementaux et d’autres groupes de la société civile peuvent aussi mener leurs propres enquêtes. Il est possible que ce genre d’enquête incite un CFP hésitant ou ayant les mains liées à entreprendre une enquête officielle. De même, ils peuvent transmettre au CFP ou au procureur du gouvernement les preuves qu’ils ont recueillies au cours de leurs enquêtes, afin qu’ils prennent les mesures qui s’imposent.
NOTES
[1] IFES,
Enforcing Political Finance Laws: Training Handbook, 2005, p. 45.