Les lois sur le financement politique sont techniques et complexes, et elles ont toujours été vulnérables à la fraude, à la falsification et aux abus. Pour que les efforts déployés en vue d’appliquer les diverses dispositions soient efficaces, la législation doit être claire, exhaustive et ne comporter aucune ambiguïté. Elle doit aussi avoir une longueur d’avance sur tout parti politique, candidat ou autre participant à une élection qui chercherait à contourner la loi.
Pour être efficace, toute loi sur le financement politique doit énoncer clairement la portée de son champ d’application et définir avec netteté le vocabulaire utilisé[1] . En effet, face à une terminologie floue, les participants à une élection ou leurs avocats arrivent à faire valoir que les définitions relatives aux activités politiques réglementées n’englobent pas certaines activités financières qui, par conséquent, ne sont pas visées par la loi. Par exemple, si la définition de « contributions » ne fait pas mention des contributions en nature (c’est-à-dire les biens et les services), la loi ne s’applique qu’aux dons monétaires; les cadeaux en nature de grande valeur ne sont alors ni réglementés ni déclarés.
Les lois sur le financement politique sont inefficaces si leur champ d’application n’englobe pas toutes les activités financières pertinentes ni un mécanisme exécutoire qui soit exhaustif et uniforme [2] . Par exemple, pour que l’application des exigences en matière de divulgation soit efficace, il faut que la loi dresse une liste de toutes les transactions financières que les participants aux élections sont tenus de déclarer, y compris les dons en argent, les contributions en nature, les prêts, les débours, les dettes, les dépenses partagées et les activités de financement communes. Dans le même ordre d’idée, si la loi vise à réglementer la publicité politique, elle doit aussi dresser la liste de tous les médias et types de messages partisans auxquels elle s’applique.
La législation et la réglementation doivent être claires à l’égard des éléments suivants :
- Infractions. Les dispositions doivent décrire les actes qui constituent des infractions en matière de financement politique ainsi que les sanctions administratives, civiles ou criminelles connexes. Plusieurs contrôleurs du financement politiques publient une annexe exposant les infractions et un tableau progressif qui décrit les sanctions prescrites, soit les sommes et la nature des sanctions en fonction de la gravité de l’infraction et du degré de culpabilité des personnes impliquées.
- Processus. Les dispositions doivent décrire le processus qui permet de déterminer s’il y a eu infraction aux termes de la loi et d’imposer des sanctions, y compris le processus d’enquête, la procédure et les éléments de preuve requis par l’organisme administratif qui rendra la décision, ainsi que les droits de l’accusé présumé à bénéficier de l'application régulière de la loi.
Les lois sur le financement politique doivent établir quelles personnes ou quelles entités sont responsables d’une infraction donnée – tout particulièrement dans le cas d’une infraction de responsabilité stricte, lorsque l’intention d’un individu n’est pas déterminante. Règle générale, les lois électorales tiennent les représentants de partis politiques, les candidats ou les agents financiers des comités de campagne (trésoriers) responsables de toute infraction liée au financement politique. Si la loi ne tient pas personnellement responsables d’infraction les hauts dirigeants ou les candidats, ceux-ci peuvent prétendre ne rien savoir pour se soustraire de toute responsabilité à l’égard des actes commis par leurs agents et leurs employés. De plus, si la loi ne permet pas de tenir ces individus personnellement responsables des infractions commises et si elle impose la responsabilité uniquement aux partis ou aux comités de campagne, il est possible que personne ne soit jamais tenu responsable de ces infractions une fois les comités dissous après une élection.
Dans un système fédéral, le chevauchement de certains champs d’application des lois et de compétences des organismes qui réglementent le financement politique à un niveau national, étatique, provincial ou local rajoute à la complexité du système. En effet, il faut appliquer soit une loi fédérale soit une loi étatique, qui déterminera les procédures exécutoires subséquentes, et ce, tout dépendant de la nature des bureaux électoraux impliqués ou des infractions reprochées.
La meilleure façon de s’assurer que les lois sur le financement politique sont claires et exhaustives consiste à réfléchir et à examiner la question comme il se doit avant de les rédiger. Puisque la législation électorale est rarement parfaite, il est crucial d’examiner régulièrement la loi et d’être proactif en y apportant des modifications et en mettant en place de nouveaux programmes. Par exemple, après chaque élection, certains contrôleurs du financement politique publient une étude à cet égard, qui analyse l’efficacité des mesures exécutoires et les faiblesses observées. Le système de financement politique doit être continuellement amélioré pour contrer les tentatives de fraude et pour maintenir des mesures exécutoires exhaustives et efficaces.
[1] US Agency for International Development, Money in Politics Handbook: A Guide to Increasing Transparency in Emerging Democracies, Washington, D.C., 2003, Appendix G.
[2] Ibid.