Inscription volontaire ou obligatoire
La citoyenneté suppose-t-elle l'obligation et la responsabilité de voter ou le droit de voter est-il un privilège qui découle de la citoyenneté et que l'électeur peut exercer à sa discrétion? La réponse à cette question influence sérieusement le choix des procédures administratives qu'il faut élaborer en vue de faciliter l'inscription. Si l'on croit que le vote est un devoir et une responsabilité, il s'ensuit que l'inscription doit être obligatoire.
L'inscription obligatoire place le fardeau sur l'État d'informer les électeurs de l'obligation de s'inscrire ou de communiquer les corrections nécessaires aux renseignements personnels contenus dans la liste continue (p. ex. changement de nom ou d'adresse). D'autre part, si le vote est considéré comme un droit démocratique, mais non une obligation, l'inscription doit être volontaire et laissée à la discrétion de l'électeur. Dans de tels cas, il faut souvent moins de ressources pour inciter les électeurs à s'inscrire.
Taux de participation comparatifs : vote obligatoire et non obligatoire
Les pays où l'inscription est volontaire, comme aux États-Unis, connaissent un taux de participation inférieur aux pays où l'inscription est obligatoire, comme au Danemark. On retrouve le même phénomène lorsque le vote est obligatoire.19
Cela dit, il faut cependant souligner que la participation au vote n'est pas simplement le résultat d'une législation qui prévoit le vote obligatoire. Une étude récente à Malte, où le vote n'est pas obligatoire, a démontré que le taux de participation des électeurs dans ce pays a été supérieur dans les années 1990 à celui de l'Australie où le vote est pourtant obligatoire (96,7 % et 82,7 % respectivement).20 De même, une comparaison de la participation des électeurs dans les pays de l'Amérique centrale entre les années 1989 et 1991 a démontré que le Nicaragua, où le vote n'est pas obligatoire, a connu le taux de participation le plus élevé, soit 86 %, alors que le Salvador, où le vote est obligatoire, a connu le taux de participation le moins élevé, soit 52 %.21
Responsabilité implicite de l'État
Même dans les pays où les citoyens sont obligés de s'inscrire, la responsabilité de maintenir un système d'inscription exhaustif, pratique, équitable et non discriminatoire repose sur l'État. Si l'administration électorale ne satisfait pas à ces conditions, elle s'engage dans un processus qui supprimera le droit de vote à certains électeurs pour des raisons administratives. Ceci correspond à dire que bien qu'elle respecte la lettre de la loi qui veut qu'elle fournisse aux électeurs la chance de s'inscrire, l'administration électorale ne respecte pas l'esprit de la loi, et par conséquent supprime le droit de vote de certains citoyens.
Plusieurs systèmes d'inscription, bien qu'ils s'affichent comme étant ouverts et inclusifs, contiennent des éléments d'exclusion administrative. Lorsque des éléments ont une influence disproportionnée sur certains groupes d'électeurs, les résultats connaissent des distorsions inacceptables.
L'inscription par l'électeur ou par l'État
Une autre question qui persiste relativement à l'inscription des électeurs est à savoir si elle se fait à la demande de l'électeur ou à l'initiative de l'État. Dans le premier cas, les électeurs ne sont inscrits que s'ils en font la demande. L'État leur fournit donc l'occasion de s'inscrire et ne réagit qu'à la demande de l'électeur.
Le Sénégal produit des formulaires d'inscription et un registre national; les Sénégalais ne peuvent voter que s'ils ont rempli le formulaire (senegal - analysis of electoral code).22 Lors des élections législatives de 1997 au Cameroun, élection entachée par la controverse à propos du processus d'inscription, des ajustements n'ont été apportés au registre continu que sur l'insistance des électeurs. Les comités divisionnaires de surveillance bien mal administrés ont tout de même exclu des milliers d'électeurs.23
Pendant bien des années, le Bangladesh a compté sur les services de bénévoles pour effectuer le recensement porte-à-porte. Les listes ainsi produites, n'étant ni exhaustives ni inclusives, n'ont pas reçu la légitimité électorale espérée. Au lieu, elles ont contribué à un manque de confiance dans le processus électoral.24
Au Royaume-Uni, l'administration fait le contact initial avec les électeurs en leur envoyant par la poste une carte qui leur indique les renseignements que contient le registre sur eux.25 Le registre électoral de la Suède est maintenu par le bureau local de l'impôt, sous la juridiction de la Commission nationale de l'impôt. Ce bureau maintient le registre de l'état civil national à partir duquel sont établies les listes électorales, sur demande expresse de l'État. Chaque année, les citoyens peuvent présenter une demande de changement à leur inscription.26
Aux États-Unis, bien que l'obligation de s'inscrire repose sur chaque individu, chacun des États adopte les mesures nécessaires afin que les électeurs puissent s'inscrire. Ces mesures comprennent la disponibilité de formulaires d'inscription par la poste à de nombreux endroits, l'inscription par le biais des bureaux de véhicules à moteur et des agences gouvernementales avec lesquelles les citoyens ont à faire. La plupart des départements de véhicules à moteur et des agences de bien-être sont autorisés par les États à appliquer les lois fédérales.