Lors des élections primaires pour la présidence de 2000 aux États-Unis, des sites mondiaux du Web ont provoqué une controverse en publiant les résultats de sondages exécutés à la sortie des bureaux de vote alors qu'ils étaient encore ouverts. La controverse a opposé les médias «nouveaux» et les médias «conventionnels».
Les journalistes de l'Internet ont maintenu que les résultats de ces sondages étaient facilement disponibles aux autres journalistes et aux représentants des partis politiques et que tout ce que l'Internet faisait était de les mettre à la disposition du public.
Les médias traditionnels, pour leur part, ont prétendu, au contraire, que les journalistes détiennent souvent des informations qu'ils ne partagent pas mais qu'ils s'engagent à ne pas publier. Certains maintiennent que la publication des résultats de tels sondages alors que le vote est toujours en cours offrent le danger que des électeurs s'abstiendront de voter parce qu'ils le jugent inutile, soit parce que le candidat de leur choix est presque déjà élu ou, inversement, presque déjà défait.
Certains journalistes internautes ont qualifié l'attitude des médias traditionnels de paternaliste. L'un deux a déclaré :
Nous présentons ce que les gens nous déclarent, ce qui est le rôle des journalistes. Je considère ridicule que des moralisateurs du genre fonctionnaire ne fassent pas confiance au public en voulant les priver de certaines informations. Si le fait de savoir qui mène dans la course incite des personnes à ne pas voter, elles ne devraient peut-être même pas, au départ, avoir le droit de le faire.122
L'approche traditionnelle de ne pas publier les résultats des sondages à la sortie des bureaux de vote (ou même les sondages d'opinion) se base sur l'opinion qu'ils pourraient avoir un impact direct sur les résultats de l'élection, sans compter qu'ils constituent un manque de respect envers les électeurs qui n'ont pas encore voté. D'autre part, l'Internet comporte un élément qui est absent chez les autres médias, soit le fait que les internautes doivent prendre l'initiative de puiser les informations plutôt que de les recevoir involontairement de la télévision ou de la radio.
Lors des primaires américaines, les journalistes internautes ont fait marche arrière devant des menaces de poursuites judiciaires mais se sont tout de même dits satisfaits d'avoir fait valoir leur point de vue. La seule conclusion prudente de cet épisode est peut-être qu'il a lieu de rédiger des lignes directrices sur cette question.