Seuils
La pratique courante veut que les partis et les candidats qui souhaitent recevoir du financement public se voient imposer une exigence minimum. Celle-ci peut prendre plusieurs formes différentes :
(a) une condition pour l'aide financière à des candidats individuels peut être qu'ils devraient obtenir un certain pourcentage des voix exprimées dans leurs circonscriptions à l'élection pour laquelle la subvention est sollicitée. Comme il ne sera pas clair avant l'élection si chaque candidat obtiendra le seuil nécessaire d'appui, ce n'est qu'après l'élection que les frais seront remboursés aux candidats qui remplissent les conditions requises. Ce système a un inconvénient pour les candidats qui ne sont pas certains que leur niveau d'appui a de bonnes chances d'être suffisant pour obtenir la subvention : ils seront soumis à des pressions pour limiter leurs dépenses de crainte qu'ils ne reçoivent pas de remboursement postélectoral.
Par ailleurs, pour des subventions de routine à des partis politiques le seuil peut être basé sur les résultats de l'élection générale la plus récente;
(b) pour un parti politique, la condition requise pour obtenir une subvention aux frais de la campagne peut être de présenter des candidats à un certain nombre de sièges;
(c) pour les subventions pour frais organisationnels de routine ou frais de campagne, les partis peuvent être tenus de remporter un certain nombre de sièges dans l'assemblée législative;
(d) le critère peut être un certain pourcentage du vote national;
(e) il peut y avoir une combinaison de critères : un pourcentage minimum du vote national et un nombre minimum de sièges dans l'assemblée législative.
Les seuils pour subventions publiques varient entre 0,5 % du vote national en Allemagne et 15 % du vote pour candidats individuels au Canada. Il convient de noter que, dans les pays où les partis ont besoin d'atteindre un seuil d'appui électoral pour remporter des sièges à l'assemblée législative, un seuil différent pourrait s'appliquer aux subventions publiques. En Allemagne, par exemple, le seuil de base pour les sièges au Bundestag est de 5 % du vote national, mais pour les subventions publiques, le seuil n'est que de 0,5 %.
Voici quelques seuils d'appui électoral pour l'obtention d'un financement public depuis 1995. Il s'agit de subventions à des organisations nationales de parti aussi bien qu'à des candidats pour divers mandats électifs :
Taïwan 75 % des voix requises par chaque candidat pour assurer son élection
Canada 15 %
Turquie 7 %
Italie Pour les campagnes sénatoriales 5 % des voix dans la région, ou 15 % du total des voix pour candidats indépendants
France Pour l'élection à l'Assemblée Nationale 5 %
Grèce 3 à 6 %
Australie 4 %
Suède 2,5 % aux 2 dernières élections
Japon 2 % ou plus de 5 candidats membres sortants de la Diète
Mexique 1,5 %
Israël moins de 1 %
Allemagne 0,5 %
L'argument en faveur d'un seuil bas est l'équité à l'égard de partis politiques naissants. Les arguments pour des seuils plus élevés sont, d'abord, qu'ils dissuadent les partis et les candidats frivoles tel que The Monster Raving Loony Party en Grande-Bretagne, qui pourraient autrement se créer dans l'intention spécifique de s'attribuer une portion des deniers publics. En outre, un seuil élevé peut éviter de devoir donner des fonds publics à des partis extrémistes qui les utiliseront vraisemblablement pour répandre des doctrines antidémocratiques et, dans bien des cas, extrémistes. Cependant, dans certains pays l'appui aux partis extrémistes est suffisamment vaste qu'aucun seuil ne les privera de l'argent des contribuables sans en priver aussi certains partis significatifs et légitimes par la même occasion. La possibilité que le financement public encouragera des partis non démocratiques est une conséquence fâcheuse, mais parfois inévitable de l'introduction de l'aide financière de l'État.
Formules
La distribution de fonds publics aux partis et aux candidats se fait selon divers critères dans différents pays :
(a) la subvention peut être une proportion des dépenses effectives et l'obtention d'argent public conditionnée par le fait que le parti ou le candidat recueille aussi de l'argent de sources privées;
(b) la subvention peut être conditionnée par l'assentiment du récipiendaire de renoncer au droit de recueillir de l'argent de campagne de sources privées (ceci est la règle pour le financement public des campagnes présidentielles aux États-Unis);
(c) la subvention aux partis politiques peut être proportionnelle au nombre de voix qu'ils ont obtenu lors de l'élection générale précédente;
(d) la subvention peut être proportionnelle au nombre de sièges de chaque parti dans l'assemblée législative;
(e) la subvention peut être proportionnelle à la représentation de chaque parti à l'assemblée législative mais moyennant la disposition additionnelle que les partis qui appuient le gouvernement reçoivent moins par siège que les partis d'opposition;
(f) la subvention peut être soumise à plusieurs de ces critères.
Exemples
Canada
Le système canadien offre un exemple de remboursement des frais de campagne :
(a) chaque candidat reçoit un remboursement de 50 % des frais de campagne. Les candidats doivent recevoir 15 % du vote pour se qualifier et ils doivent aussi respecter une limite fixe de dépenses;
(b) pour les dépenses de campagne d'organisations nationales de parti, le remboursement est de 22,5 % du total. Là encore, il y a un plafond de dépenses. Les partis nationaux ne sont pas tenus d'obtenir un pourcentage minimum du vote pour se qualifier; mais ils sont tenus, primo, de dépenser au moins 10 % du budget maximum permis et, secundo, ils doivent mettre en campagne au moins 50 candidats.
Allemagne
Le système allemand comporte une formule de subventions annuelles - de routine - aux organisations nationales de parti :
(a) la subvention publique est calculée sur la base du résultat de la dernière élection. Pour chacun des premiers 5 millions de voix, chaque parti reçoit 1,30 DM la première année et 1 DM pour chaque année subséquente;
(b) en outre, 0,5 DM est alloué pour tout 1 DM reçu par le parti en cotisations de membres;
(c) la subvention directe ne doit pas dépasser le montant recueilli par chaque parti en cotisations de membres et d'autres sources privées;
(d) pour se qualifier pour des subventions équivalentes, les cotisations de membre ne doivent pas dépasser 6 000 DM par personne par an;
(e) le parti doit avoir obtenu au moins 0,5 % des voix à la dernière élection (ou 1 % des voix dans une élection d'État);
(f) selon un amendement de 1993 à la Loi des partis, il y a un plafond absolu de 230 millions de marks par an sur le total des subventions directes à tous les partis réunis 23.
Nicaragua
Pour les élections de 1990, le Conseil électoral suprême fut autorisé à allouer un montant spécifique aux partis politiques. Cinquante pour cent de cette somme était à répartir entre eux en parts égales, le reliquat en fonction du nombre de voix obtenues aux élections de 1984. Les partis qui n'avaient pas participé à l'élection de 1984 recevaient chacun le même montant que le parti ayant obtenu le moins de voix.