Plusieurs activités différentes tombent sous cette catégorie :
- les activités commerciales authentiques, y compris les ventes de littérature du parti, d'insignes et d'autres objets politiques;
- les arrangements qui peuvent être considérés comme comportant un élément de pression ou d'extorsion;
- les activités commerciales qui peuvent être factices et servir à échapper aux règlements relatifs aux contributions politiques étrangères ou à la divulgation de contributions domestiques (voir Temps d'antenne).
Dans le passé, les partis de gauche auxquels faisaient défaut les contributions de compagnies dont bénéficiaient leurs rivaux politiques, géraient souvent des entreprises qui étaient la propriété du parti.
Vente de littérature et autres activités commerciales
Il y a de solides raisons politiques pour que les partis vendent leur littérature et leurs affiches à perte. Après tout, la campagne demande qu'elles soient distribuées aussi largement que possible, ce qui exige des prix de vente bas ou des distributions gratuites. Néanmoins, les organisations de parti peuvent décider d'adopter une ligne de conduite plus dure en matière de fixation des prix de la littérature et du matériel de campagne, visant à couvrir leurs frais et même à un profit. Elles peuvent aussi commercialiser un attirail politique tel qu'insignes, cravates, chemises, rubans, tasses et même des cartes de voeux de Noël.
Les plans d'affaires modernes adoptés par certains partis politiques comportent des cartes de crédit « d'affinité ». Par arrangement avec une banque, les supporters du parti peuvent utiliser une version spéciale d'une carte de crédit importante. Celle-ci inclura d'habitude un logo spécial du parti et la banque qui gère la carte remettra un petit pourcentage de toutes les dépenses faites avec la carte - normalement 0,25 % - aux fonds du parti.
Les activités commerciales qui peuvent être considérées comme authentiques comprennent aussi des librairies gérées par le siège du parti et même des entreprises sans connexion politique apparente, telles que l'agence de voyages qui fut gérée pendant quelque temps par le Parti travailliste britannique ou les magasins gérés par le mouvement coopératif britannique, affilié au Parti travailliste. En Autriche, même les services de dépannage routier sont affiliés aux principaux partis.
Méthodes comportant des pressions sur des donateurs majeurs
C'est devenu une habitude pour les principaux partis politiques britanniques d'aménager des kiosques à leurs conférences annuelles. Les compagnies doivent payer une somme considérable pour y louer un espace. Le motif clairement fourni aux entreprises est qu'elles auront l'occasion pendant les journées que durera la conférence du parti d'obtenir accès aux délégués. Ces délégués constituent une audience ayant une influence politique exceptionnellement imposante. Les organisateurs de parti promettent spécifiquement que les dirigeants du parti visiteront l'exposition au cours de la conférence. Les kiosques d'exposition fournissent ainsi une excellente occasion pour faire du lobbying et pour établir une image de marque. Il arrive parfois que l'on attire les délégués, qui comprennent des députés, à une visite des kiosques par de petits cadeaux ou des boissons gratuites.
Une autre forme d'entreprise commerciale est le système qui consiste à faire payer un prix fou aux journalistes pour une place dans l'avion ou l'autobus qui rend le chef du parti à ses randonnées pendant la campagne électorale.
Le motif pour lequel ces combines peuvent être considérées comme impliquant une pression est qu'en fait, on fait payer les journaux pour avoir accès aux chefs de partis lors de leurs tournées; on dit aux compagnies que si elles souhaitent obtenir un accès privilégié à des personnalités éminentes du parti pendant la conférence annuelle du parti, elles devront payer pour ce privilège. Une défense du système est que les charges perçues sont de notoriété publique et que la vente d'accès pendant les conférences est une pratique relativement innocente comparée à d'autres modes de trafic d'influence. Une défense supplémentaire est que les conférences et conventions nationales coûtent cher aux partis et que ceux-ci doivent trouver des moyens de récupérer certaines de leurs dépenses.
Commerces factices
Dans les pays où les compagnies ou les individus sont soumis par la loi à de sévères limitations aux contributions politiques, ou encore s'il y a un possible stigmate attaché aux contributions, une manière d'éluder les plafonds des contributions autorisées ou d'éluder les règles de divulgation est de déguiser une contribution en transaction d'affaires.
Une des techniques implique l'échange d'argent pour quelque service fourni par le parti. Une autre technique implique la fourniture de services ou de biens à un parti ou à un candidat en échange de quelque paiement, mais à un tarif inférieur au prix du marché.
L'inscription d'une contribution en tant que paiement pour service est une recette consacrée. Par exemple, certaines organisations de parti ont depuis de nombreuses années produit des annuaires ou des répertoires politiques. Ceux-ci comportent des annonces publicitaires de compagnies. S'il s'agit de publicités authentiques ou plutôt de contributions déguisées dépend des tarifs appliqués. Il n'est pas douteux que les compagnies ont souvent payé des taux dépassant à tel point le prix du marché que de bonne foi ces taux ne pouvaient guère être justifiés comme étant des coûts de publicité.
Des combines plus modernes de paiement pour service incluent les prétendus services de consultance. Une organisation de parti peut produire une série de consignes politiques privées comportant une information d'une telle rigueur et valeur politique qu'elles justifient une cotisation élevée pour les banques et autres corporations qui prennent des souscriptions. Comme il est presque impossible de mettre une valeur marchande précise sur un conseil ou une information, des cotisations d'abonnement même élevées peuvent se justifier. La simple logique suggère que de tels services d'information sont des méthodes à peine voilées de permettre à des corporations de cautionner un parti sans le déclarer à leurs actionnaires ou aux autorités régulatrices.
G. Wewer a exposé en détail quelques-unes des manières ingénieuses dont les partis politiques allemands et aussi, de temps en temps, les fondations de parti ont fourni une couverture commerciale aux contributions.41
Exemples d'entreprises commerciales de parti
(a) Israël. Dans un rapport classique, encore que dépassé, publié en 1981, Khayyam Paltiel a donné divers exemples d'entreprises commerciales de parti. Il citait Israël comme un pays avec probablement le plus large éventail d'entreprises reliées à des partis :
« La plupart des partis israéliens ont commencé comme des mouvements d'établissement et furent par nécessité poussés à entrer dans presque tous les aspects de la vie sociale et économique avant même la proclamation de l'État en 1948. Les partis publient des quotidiens, possèdent leurs propres maisons d'édition, ont leurs propres mouvements de récréation et équipes de sport, possèdent des banques, des complexes de logement, des coopératives de vente en gros et au détail, contrôlent les plus grandes mutuelles d'assurance-maladie, y compris des hôpitaux, et sont les plus grands employeurs dans le domaine de l'industrie lourde par le truchement des industries contrôlées par les syndicats. »42
(b) Europe occidentale. Paltiel donnait aussi des exemples d'Italie, de France, d'Allemagne, d'Autriche et de Scandinavie :
« À côté des installations de récréation, les communistes italiens gèrent des chaînes de magasins, des maisons de confection, des agences de voyage et des agences d'import-export qui traitent une bonne part du commerce du pays avec l'Europe de l'Est. Le parti communiste français ne possède pas moins de 310 entreprises. La Bank fur Gemeinschaft en Allemagne et la Sparkasse en Autriche sont étroitement reliées aux sociaux-démocrates de ces pays. Et les partis socialiste et communiste scandinaves possèdent des agences de voyage et des entreprises quasi commerciales dans le secteur import-export. »43
(c) Inde. Un exemple d'arrangement d'affaires prétendument bidon dans lequel les contributions semblaient être déguisées en publicités ou en achats de biens a été esquissé dans une étude de V.B. Rao :
« Les annonces dans les journaux de parti par les grandes entreprises, qui sont disposées à payer un prix exorbitant, est un autre mode de recueillir de l'argent. Les ventes de souvenirs par le Parti congressiste d'Indira Gandhi ont rapporté un montant élevé pour ce parti en 1972. On croit que ce parti recueillit environ 100 millions de roupies (à l'époque quelque 10 millions de dollars américains) grâce à des publicités pour un souvenir qui ne vit jamais le jour. »44
(d) Espagne. Les détails d'un service de consultance prétendument bidon sont donnés dans la même étude de la bibliothèque du Congrès :
« Le premier ministre Gonzalez déclencha une élection générale le 6 juin 1993. Ce geste repoussa à plus tard les problèmes internes du Parti socialiste qui venait d'être touché par un scandale concernant le financement illégal de sa campagne de 1989 par l'entremise de son agence de consultance (FILESA). La nouvelle de l'affaire FILESA parut dans la presse à l'automne 1991. Le cas fut sous investigation pour 15 mois par le tribunal de vérification des comptes, un organisme qui surveille les comptes des partis politiques d'Espagne et dont la structure reflète l'équilibre du pouvoir au parlement. Le tribunal disculpa le parti, dû à la voix prépondérante de son président nommé par le parti.
Le cas se serait probablement éteint sauf qu'un juge entreprit une enquête judiciaire en l'affaire. Le 4 avril 1993, un rapport officiel, prescrit par un juge de la Cour suprême, révéla que deux personnalités marquantes du Parti socialiste étaient impliquées dans deux compagnies connues sous les noms de FILESA et de TIME EXPORT, qui avaient reçu des paiements pour services non existants de consultance d'un montant de 8,5 millions de dollars américains. Une partie de l'argent avait, selon les allégations, été utilisée pour payer les dépenses électorales du parti. Les inspecteurs des impôts compilèrent, à la demande du tribunal, un rapport qui énumérait une liste de paiements, pour un total de 8,4 millions de dollars, que le groupe FILESA avait reçu de banques domestiques et de compagnies de premier plan en échange de services de consultance ainsi qu'une liste de paiements subséquents que le groupe avait fait parvenir au Parti socialiste pour couvrir ses dépenses électorales.
Le rapport prétend aussi que le groupe FILESA a payé directement des compagnies de service qui subvenaient aux besoins du siège central de la campagne socialiste et qu'afin de déguiser les paiements, il a accepté des reçus établis en son nom de la part d'un groupe de compagnies appelées 2020, qui est contrôlé par un ancien coordonateur national des finances du Parti socialiste.
Le cas FILESA fut considéré par certains comme simplement la pointe d'un iceberg de corruption. Le groupe 2020 lui-même a été associé dans des rapports de presse aux vastes paiements de consultance effectués par le groupe allemand Siemens à l'époque où il négociait le contrat pour fournir le TGV Madrid-Seville. »45
(e) France. Selon le professeur Pierre Avril, certaines des sources véritables de financement politique incluent certaines qui sont moins innocentes, faisant appel à des organisations de recherche semblables à celles des services de consultance utilisés dans la politique espagnole. Les autorités municipales contrôlées par le parti font usage de ces services.
« La municipalité peut payer des services de recherche à des tarifs plus élevés que leur vraie valeur (la différence étant utilisée pour financer des dépenses du parti), comme ce fut le cas en 1982 lors des opérations de planification de la ville de Paris. La municipalité peut aussi forcer les compagnies qui cherchent à obtenir des contrats à s'attacher les services de ces organismes de recherche, qui alors perçoivent une commission de 2 à 2,5 % de la valeur du contrat. La compagnie Urbatechnic, qui soutient le Parti socialiste, prétend fournir un service égal aux commissions qu'elle reçoit. Elle rapporte aussi que les trois-quarts de sa commission sont remboursés à la trésorerie nationale du parti après déduction de ses dépenses de fonctionnement. »46