En matière de formation électorale, la détermination des publics qui sont les plus appropriés ne relève pas entièrement du formateur électoral. La politique, les constitutions et les lois posent des contraintes pour le programme ou orientent celui-ci.
Le rôle de la politique
La formation électorale contribue à rendre les gens autonomes. Elle les encourage à s’inscrire pour voter et, s’ils sont inscrits, à voter. Elle leur apprend la façon de marquer correctement leurs bulletins de vote afin de s’assurer qu’ils ne soient pas invalidés lors du processus de dépouillement. Elle les encourage à décider d’eux-mêmes de la personne pour qui voter, et elle leur donne des aptitudes nécessaires pour soupeser les options qui leur sont offertes. Voilà des activités ayant des conséquences politiques. Aussi il n’est pas surprenant que des intérêts politiques cherchent à élargir le mandat de formation électorale ou au contraire, à lui faire obstacle par des moyens formels et informels.
Lorsque les élections se tiennent à intervalles réguliers et qu’un consensus social général prévaut au sujet du bien-fondé des élections et de la possibilité qu’il y ait régulièrement alternance au gouvernement, les organismes électoraux pourraient être à même d’établir un programme de formation qui soit complet et inclusif. Cependant, dans les sociétés où les enjeux sont encore très élevés et où les élections découlent de pressions exercées au niveau international ou d’une tendance à vouloir établir une légitimité publique sans élargir le pouvoir politique, certains chercheront à limiter les occasions de procéder à une formation électorale électeurs à large échelle.
Dans un tel contexte, il sera nécessaire de gérer les formes d’ingérence dans la formation électorale. Celles-ci pourraient comprendre des gestes d’intimidation et de violence ciblant les formateurs et les participants, des tentatives de limiter l’accès des électeurs, discréditer les formateurs, leurs programmes et leurs décisions par rapport au budget, à la loi, au moment où se tiennent les élections et d’autres enjeux auxquels doit faire face le gouvernement.
Les constitutions jugent et confèrent des droits
Lorsque des constitutions existent, et en particulier dans les sociétés qui fonctionnent en vertu de déclarations de droits, il est probable que surgiront des questions d’équité. Dans certaines sociétés, il est possible que la formation électorale mette l’accent sur des groupes particuliers. Ceci dit, les organismes publics feront vraisemblablement face à une exigence prévoyant que tous les électeurs devraient recevoir un traitement et un service équitable. Ceci pourrait servir à motiver les formateurs électoraux; mais cela pourrait aussi les amener à n’offrir à tous que des renseignements de base.
Tout ce qui va au-delà d’un programme de formation électorale de base ou général exigera une différenciation. Et ceci devra être fait avec soin afin d’éviter toute controverse pouvant saper le programme. Par exemple, ceci pourrait être le cas si l’on remet en cause, sur le plan juridique, un programme qui n’est donné qu’à un seul segment de la société ou encore, s’il est offert à des différents coûts selon l’endroit dans le pays.
En certains endroits, il se peut qu’il n’y ait aucune constitution. Ceci peut résulter d’une société qui fonctionne à partir d’un ensemble de documents et de précédents historiques, telle la Grande-Bretagne. Ou il se peut qu’un pays soit à réviser son cadre constitutionnel ou qu’un conflit a sapé sa constitution antérieure. Dans de tels cas, cela pourrait avantager les formateurs électoraux qui pourraient être en mesure de tirer profit de d’autres mandats afin de concentrer leur enseignement sur des groupes cibles, par exemple les gens qui n’avaient pas le droit de vote dans le passé, les combattants, les minorités ethniques et linguistiques, et ainsi de suite. Quel que soit le cas, les formateurs ne devront pas tenir pour acquis qu’une formation universelle et limitée représente la forme la plus appropriée et la plus efficace pour former les électeurs.
La loi fixe les responsabilités et les limites
La loi, ou dans un certain cas un décret de l’exécutif, accorde un mandat particulier aux organismes électoraux. Ce mandat peut comprendre la responsabilité d’informer ou de former les électeurs. Les organismes électoraux de certains pays, par exemple en Russie, en Ukraine, en Australie, au Mexique et au Paraguay, disposent d’un mandat important comportant l’éducation à la citoyenneté ou la formation électorale.
Ailleurs, particulièrement dans les pays en développement ou dans les sociétés en transition, il se pourrait que l’organisme électoral ne dispose d’aucun mandat clair au chapitre de la formation électorale. Bien qu’une forme officielle de formation électorale puisse paraître évidente, les organismes électoraux, particulièrement ceux évoluant dans un contexte politique très divisé, pourraient hésiter à outrepasser leur mandat légal, ou seront à tout le moins particulièrement sensibles à de telles perceptions. Dans les cas où la loi impose des contraintes aux formateurs électoraux officiels, ceux-ci pourraient utiliser leurs relations avec les formateurs de la société civile pour élargir leur propre programme ou pour s’assurer que la responsabilité de la formation électorale soit assumée par une entité qualifiée et appropriée. Cependant, c’est la loi qui déterminerait alors si ce travail élargi ou alternatif aurait droit aux fonds publics.