Le processus d’élaboration du programme d'éducation électorale est un outil de planification d’ordre itératif [1]. Cette section explique en quoi consiste cet outil, qui comprend sept étapes comme suit.
Déterminer l’objet principal du programme
Lorsque l’on parle d’éducation civique et d'éducation électorale, l’objet du programme aura été déterminé de manière générale. Le mandat ou la mission du formateur sera de s’y conformer, voire même lui donner un accent encore plus précis (voir Le mandat de formation).
Cet accent est essentiel afin de déterminer l’angle de départ pour analyser le public cible que l’on veut rejoindre. Si cela n’est pas fait, l’exercice sera voué à l’échec. Mais l’accent sur un élément ne devrait pas être confondu avec les objectifs de formation, lesquels restent à établir.
La compréhension des participants et de leur univers
Les formateurs ont besoin de comprendre l’univers des participants aux sessions de formation pour y accéder. Cela est particulièrement vrai pour les formateurs qui viennent de l’extérieur, mais cela est également nécessaire pour ceux qui estiment faire partie de l’univers des participants. Quoi qu’il en soit, à un certain moment les formateurs auront besoin de prendre une certaine distance qui permette la réflexion et l’analyse.
L’analyse visera à réunir des renseignements de base et à découvrir un éventail de besoins de formation.
Comprendre les ressources à la disposition des formateurs
En plus de comprendre l’univers des participants, les formateurs auront besoin de connaître les ressources à leur disposition. Une telle compréhension garantit que les objectifs du programme soient réalistes et faisables compte tenu des ressources disponibles.
Il y aura probablement un dialogue continu sur les objectifs fixés avec les ressources disponibles. En premier lieu, les formateurs sont susceptibles de surestimer ce qui peut être fait, ou les autres pourraient avoir des attentes trop élevées à leur égard. De part et d’autre, inévitablement il faudra s’ajuster et le meilleur moment pour ce faire sera lors de la période d’évaluation et de conception, plutôt que pendant la mise en œuvre.
Sélection des objectifs de formation
Pendant cette période d’élaboration, les formateurs devraient discuter des messages éventuels et des thèmes génératifs ainsi que fixer un ensemble d’objectifs de programme qui soient utiles, pratiques, réalistes et mesurables (voir Les objectifs de la formation). Ces objectifs devront être formulés de manière à ce que le participant soit au cœur du programme.
Pour s’assurer que le programme soit évalué, un ensemble d’indicateurs devraient être mis au point afin d’attester la réalisation de ces objectifs.
- Objectifs primaires et supplémentaires. Dans un programme complexe, il est probable que les objectifs fixés soient les objectifs primaires et un ensemble d’objectifs complémentaires viendront compléter la conception du programme. À la fin du processus de conception, cela pourrait être décrit comme l’arbre des objectifs. Par exemple, afin que « les électeurs en milieu rural soient en mesure de voter avec confiance », ils pourraient avoir besoin « de trouver leur chemin vers le bon bureau de vote », « d’être capable d’écrire avec un stylo » et « de comprendre le rôle des partis politiques dans une démocratie ».
- L’arbre des objectifs. Certains formateurs estiment que l’arbre des objectifs représente l’aspect le plus fondamental de la conception d’un programme de formation. D’autres le trouvent superficiel en raison de sa croyance voulant que tous les résultats sur le plan de la formation peuvent être déterminés avant même que les formateurs aient interagi avec les participants. On y aura particulièrement recours lorsque le programme de formation proposé est axé fortement sur les compétences et lorsque le programme de cours est prédéterminé plutôt que d’être de nature générative.
Un programme d’éducation à la citoyenneté et un programme de formation électorale se retrouvent quelque part entre les deux. Ils nécessitent à la fois des compétences techniques et un élément génératif.
Ceci dit, il faudra fournir une description préalable des objectifs que l’on veut atteindre à tous ceux qui soutiennent un tel programme (les donateurs et autres parties prenantes). De même, les formateurs devraient faire connaître leurs intentions aux participants adultes, qui auront le droit de savoir les résultats probables de leur relation avec le formateur.
Il est essentiel de bien préciser par écrit un ensemble détaillé d’objectifs.
Les personnes qui fonctionnent principalement avec des messages ou des thèmes génératifs pourraient trouver que ceux-ci sont faciles à communiquer. Mais au final, ce qui compte, ce n’est pas la première communication : c’est le changement sur le plan des connaissances, du comportement ou des attitudes du bénéficiaire ou du participant. Le changement est la raison d’être de la formation; il ne s’agit pas seulement de diffuser des messages sur les ondes.
L’élaboration du programme
Dès que les objectifs auront été établis, les formateurs devraient initier le processus de conception. Ce processus devrait viser à élaborer l’ensemble du programme selon un cadre logique et chronologique.
Plusieurs formateurs ont une certaine expérience avec ce type de travail, mais applicable à un seul groupe de participants. L’élaboration d’un calendrier est un exemple de conception globale.
L’élaboration générale du programme. Or, dans le cas d’un programme national, la conception globale doit être beaucoup plus détaillée que si l’on a affaire à un seul groupe de participants. Ceci pourrait comprendre de préparer des calendriers pour une formation de longue durée, pour la diffusion du matériel dans les médias, pour les estimations générales du nombre d’activités qui seront organisées ainsi que l’ordre de présentation. Cette conception devrait tenir compte de toute l’information amassée sur les éléments qui devraient faire partie du programme. Elle devrait se fonder sur un paradigme stratégique d’ordre général et chercher à se conformer aux ressources disponibles, en n’étant ni trop ambitieuse ni trop timide.
L’élaboration du programme et ses composantes précises. Le deuxième aspect de la conception est l’élaboration de projets pour des composantes précises du programme. Ces éléments, élaborés de manière plus détaillée, pourraient s’apparenter à des plans de leçon, mais ils n’en sont pas car ils risquent d’être des éléments du programme qui varieront dans le temps, selon les lieux et sur le plan des méthodes. Pour la formation, on pourrait donc y retrouver un éventail de possibilités pour élaborer des stratégies.
Ce travail sera fait avant que le programme ne s’amorce ainsi que pendant l’étape de mise en œuvre. Se pencher sur les éléments de manière détaillée est un processus fastidieux, mais ses bénéfices viendront de son incidence sur les participants au programme de formation et sur la possibilité ainsi offerte au programme de recourir à des formateurs et à des producteurs de matériel qui ne sont pas toujours des ressources de premier plan.
Les concepteurs chercheront à s’assurer que chaque aspect du programme se conforme aux théories d’apprentissage, qu’il tienne compte des connaissances que l’on détient au sujet des participants et qu’il puisse être réalisé dans les endroits et selon le calendrier prévus, avec le personnel et les ressources financières et de formation auxquels on a accès.
Il importe de voir à l’élaboration d’ensemble du programme ainsi qu’à ses composantes plus précises car cela sera déterminant pour les documents à produire. Il ne suffit pas d’élaborer un ensemble de documents et ensuite de chercher des moyens de transmettre le contenu qu’on y retrouve.
Il est nettement préférable de déterminer le plan de formation et de préparer les documents en conséquence. Cela est plus rentable puisque les documents qui seront produits correspondront à ce qui est requis sur le plan du contenu, du format et des quantités.
Lorsqu’on n’a pas le choix et qu’il faut utiliser les documents existants, par exemple un manuel, les concepteurs devront réfléchir aux meilleures façons d’adapter son contenu au contexte particulier de la formation.
La mise en œuvre du programme
À cette étape, on pourrait croire que la conception du programme de formation est terminée. Or, l’étape de mise en œuvre est le moment où le programme est mis à l’essai et où l’on peut tirer d’autres leçons. Il se pourrait que l’on doive intégrer ces leçons sans plus attendre, mais d’autres seront intégrées seulement au prochain cycle de formation.
Un programme de formation peut certes comporter une étape pilote qui permettra de mettre à l’essai les documents et de les adapter. Mais de fait, c’est l’ensemble du programme qui devrait pouvoir faire preuve d’ouverture à l’innovation et être adapté afin de s’assurer que le résultat visé soit atteint.
Les évaluateurs pourraient préférer qu’un programme se déroule comme prévu, sans égard immédiat pour les écarts par rapport à ce qui était prévu. Or, les gens ne sont pas des objets d’expérimentation. S’il appert que l’ensemble d’un programme, ou une de ses composantes, ne répond pas aux besoins des gens et ne permet pas d’atteindre les objectifs fixés, il faudra le modifier dès que possible.
Le programme d’évaluation et la préparation du prochain cycle
Avec la conclusion du programme s’amorce alors une phase d’évaluation qui permet de mieux comprendre les participants et leur univers, ainsi que les ressources à la disposition du formateur. Le processus de formation et de préparation revient dès lors à son point de départ.
Lorsque l’on parle d’un programme national d’éducation à la citoyenneté et de formation électorale, un tel processus s’avérera probablement nécessaire. Mais il pourrait tout autant servir pour un volet plus précis du programme.
Il est probable que ce processus puisse servir différemment aux formateurs selon que ceux-ci s’occupent de différents volets du programme ou qu’ils œuvrent au sein de différentes organisations au sein d’un grand réseau de formation.
Un formateur dont ce serait la tâche de mener un programme global pour les femmes dans un milieu urbain défavorisé dans un pays moderne aurait à entrer dans leur univers, déterminer leurs besoins, fixer des objectifs pour ce programme précis, le concevoir, le mettre en œuvre et l’évaluer. À partir de là, que ce soit seul ou avec d’autres, il aurait à préparer de futures activités de formation destinées à ce même groupe.
Note :
[1] Le mot « itératif » est utilisé pour désigner un processus qui est en partie linéaire, où les étapes se suivent l’une à la suite de l’autre, et en partie circulaire. Il arrive parfois qu’il faudra reprendre une ou plusieurs étapes au fur et à mesure que de nouveaux renseignements apparaîtront ou que des changements ayant une incidence électorale auront été apportés.