En principe, les élections sont régies par un cadre législatif existant. Dans les sociétés qui sont en transition, ce cadre peut être complexe et comprendre un ensemble de mesures et de lois provisoires découlant d’un décret électoral antérieur. On peut trouver aussi des dispositions transitoires ou des lois habilitantes – ainsi qu’on peut en trouver dans les pays qui formaient autrefois l’Union soviétique et la Yougoslavie – qui viennent modifier provisoirement les anciennes lois ou décréter un moratoire sur celles-ci ou leurs dispositions. Dans de telles circonstances, il arrive aussi que des décrets présidentiels viennent influencer le processus électoral.
Le cadre législatif peut comporter des lois ou des dispositions particulières qui auront une l’incidence sur les initiatives d'éducation électorale. Aussi faut-il définir celles-ci et évaluer leur impact sur la mise en œuvre du programme.
Les impératifs constitutionnels
La constitution définit les qualités nécessaires pour la citoyenneté et les droits connexes, les conditions d’éligibilité pour être électeur et pour être élu, et des mesures électorales d’ordre général. Elle définit les formes que pourront prendre le gouvernement, et ce faisant, l’issue du vote; elle établit aussi la façon dont les citoyens seront représentés et l’efficacité probable de cette représentation. La constitution prévoit également des mesures de sécurité générales, des responsabilités en matière de services que doivent offrir différents organismes et bureaux gouvernementaux vis-à-vis l’un de l’autre et vis-à-vis du public, et des questions d’égalité et d’équité.
Puisque les élections dans une démocratie sont si intimement liées à la succession et à la gouvernance, il est fort probable que la constitution aura prévu une protection de l’activité électorale. Les formateurs doivent se familiariser avec la constitution, les dispositions constitutionnelles pertinentes de leur pays ou de leur État, et la manière dont celles-ci influencent le contenu et la conduite de leur programme d'éducation électorale.
Lorsqu’une constitution est en place, il peut y avoir diverses lois de longue date qui se rapportent à l’organisme de gestion électorale, à ses compétences et à ses pouvoirs, ainsi qu’à sa portée et à ses responsabilités budgétaires (voir Les lois électorales).
Les autres lois au niveau national
Outre les lois qui portent précisément sur les élections, plusieurs autres lois au niveau national peuvent avoir une incidence sur les programmes d'éducation électorale. Celles-ci peuvent parfois être simples, et à d’autres moments être plus complexes et semer la confusion. Un exemple de lois simples peut être le fait de s’assurer que les publications soient enregistrées, identifiées et mises à la disposition des bibliothèques accréditées et des archives publiques. Les lois les plus compliquées peuvent déterminer si les formateurs ont besoin de la permission de l’occupant ou du propriétaire d’une propriété privée, telle qu’une ferme, pour mener des activités d’éducation électorale. Et la frustration peut survenir si on demande aux formateurs de disposer d’une autorisation de sécurité afin de mener une activité d'éducation électorale sur une base militaire.
Cette section vise uniquement à sensibiliser les formateurs, au besoin, d’examiner les lois qui auront une incidence sur le programme d'éducation électorale. Dans des situations où un conflit pourrait surgir, il faudra porter un jugement sur la façon dont le programme satisfait à toutes les exigences légales, même si celles-ci ont été établies pour faire obstacle à la libre circulation de l’information ou à l'éducation électorale. Lorsque ce type de conflit est moins susceptible de se produire, il faudra juger les coûts de la conformité par rapport à certaines lois et, par conséquent, la capacité de livrer tel type de programme.
Les formateurs devront inévitablement prendre en compte certaines parties des lois, y compris :
- les médias et la diffusion;
- la sécurité;
- les activités de financement et les organismes de charité;
- la liberté d’expression;
- l’éducation et la formation; et
- l'accessibilité des locaux.
Les lois peuvent influencer la diffusion de l’information, par exemple la façon dont les médias couvrent le processus électoral, le contenu et la taille des publicités, et la capacité d’obtenir du temps d’antenne gratuit. Les lois peuvent favoriser ou décourager la diversité des médias. En conséquence, cela peut influer sur le nombre de médias en présence, les parts de marché qu’ils détiennent, leur auditoire cible et s’ils sont perçus comme des sources d’information dignes de confiance.
De même, les organismes de gestion électorale et les partis pourront devoir se pencher sur les dispositions qui réglementent l’accès gratuit au temps d’antenne. Il est probable aussi qu’ils doivent examiner la question de la divulgation, en particulier l’exigence d’identifier la source et les responsables des messages et des produits relatifs aux élections, y compris le matériel d'éducation électorale. Il faudrait aussi que le matériel imprimé soit révisé par les autorités compétentes, avant sa diffusion.
Pour plus de renseignements sur ces questions, voir le sujet portant sur les médias et les élections, en particulier Les principes juridiques, Le cadre juridique des médias, La loi ou les règlements sur les médias pendant les élections et L’information des électeurs.
Dans certains pays, les lois sur la sécurité peuvent avoir une incidence sur la tenue des réunions publiques, leur organisation, le moment où elles se déroulent et leur promotion. Les activités en plein air peuvent être soumises à des couvre-feux. Ces lois peuvent être de nature très restrictive (s’appliquant à une partie ou à l’ensemble le pays) ou encore, apporter un soutien constructif aux élections. Dans tels cas, les responsables de la planification de l'éducation électorale devront comprendre le rôle que les unités de la police et de l’armée pourraient jouer en ce qui concerne, par exemple, le contrôle de la foule, l’appui logistique et l’accès à leur propre personnel aux fins de l'éducation électorale.
Le financement des programmes électoraux nécessite l’appui de l’État, de fondations ou d’autres sources philanthropiques, solidaires et individuelles. Plusieurs pays disposent de lois sur les activités de financement, la production de rapports financiers, l’inscription des responsables financiers ou du personnel affecté aux activités de financement, et la façon dont ces fonds sont imposés ou exemptés des impôts.
Les programmes d'éducation ayant cours dans les pays dotés de lois sur la liberté d’information devront eux-mêmes se conformer aux dispositions législatives. Lorsque de telles lois existent, ceci les aide aussi à promouvoir la transparence gouvernementale, normalement un élément essentiel pour l’efficacité des programmes d’information publique et d'éducation électorale. Si aucune loi sur la liberté d’information n’existe, ou si cette liberté est restreinte, il est probable qu’il soit plus difficile de réaliser ces activités, sans que cela soit pour autant impossible.
Puisque l’éducation civique et l'éducation électorale sont avant tout des activités d’éducation informelles – à moins qu’un programme ait été intégré au système scolaire formel – les formateurs n’auront peut-être pas à composer avec des lois générales sur l’éducation. Mais ils pourraient avoir à se conformer à des lois portant sur le recrutement et l’emploi des formateurs et à toute norme nationale ayant trait à la formation. De plus, ils pourraient avoir intérêt à utiliser des lignes directrices nationales sur la formation.
Les lois et les ordonnances locales
Quel que soit le pays, il est probable aussi qu’il y ait un ensemble de lois ou d’ordonnances locales qui affecteront les activités d'éducation électorale que mèneront des groupes locaux ou des organisations internationales. Très souvent, les responsables locaux adopteront des ordonnances régissant certaines activités comme les rassemblements publics (par exemple, on pourrait exiger d’obtenir une permission spéciale sous forme d’un laissez-passer) ou encore, ils détermineront les endroits où pourra être affiché le matériel électoral et de campagne, par exemple les affiches, et les personnes responsables de retirer ledit matériel. On voudra aussi tenir compte des ordonnances traitant des niveaux de bruit et des dérangements publics. Si les personnes menant des activités d'éducation électorale ne prennent pas connaissance des ordonnances locales ou ne s’y conforment pas, elles pourraient s’exposer à des amendes et d’autres pénalités au niveau local.
En aucun cas, le présent examen des lois se veut-il complet et il ne prend pas en compte non plus le droit commun fondamental des pays et leurs lois générales sur le plan du travail, du commerce et des droits civiques. Les programmes d’éducation civique et les programmes d'éducation électorale ne sont pas à l’abri des lois simplement parce qu’ils traitent des élections ou de questions générales d’ordre politique, sociale ou économique. Les formateurs devront comprendre les lois du pays et être capables de s’y conformer, le cas échéant. Ceci pourra compliquer grandement la tâche des organisations internationales qui désirent soutenir la prestation d’activités d'éducation électorale. En conséquence, souvent il est essentiel de nouer des partenariats avec les organisations locaux ou sous l’égide de l’organisme de gestion électorale lui-même.