Le système électoral de
l’Assemblée législative, qui a d’abord fait l’objet d’un décret du président
Boris Eltsine en septembre/octobre 1993, et le système électoral pour la présidence
font partie de la première Constitution russe postsoviétique, que les électeurs
ont adoptée de justesse en décembre 1993. L’Assemblée fédérale, le Parlement
russe, est bicaméral. La Douma (l’assemblée populaire) est élue tous les quatre
ans. Le Conseil de la Fédération (la Chambre haute) se compose d’un représentant
de l’exécutif et d’un représentant législatif de chacune des 89 régions de la
Russie, selon les lois en vigueur dans chaque région.
On peut classer le
système électoral russe comme un exemple classique d’un système électoral parallèle
(voir système parallèle). Le système de
représentation proportionnelle à scrutin de liste (RPSL) et le scrutin
majoritaire uninominal (SMU) sont utilisés pour choisir les députés à la Douma;
cependant, aucun ajustement n’est fait à partir des listes de partis pour
atténuer les disparités entre les votes reçus et les sièges obtenus, comme c’est
le cas en Allemagne et en Nouvelle-Zélande (voir Allemagne : le système original de scrutin mixte avec compensation et Nouvelle-Zélande : passage d’une démocratie de
Westminster à la RP). Au total, on retrouve 450 députés, choisis à
parts égales sous la représentation proportionnelle (RP) et dans des
circonscriptions uninominales. Dans les faits, le système de RP fonctionne
comme une seule circonscription, puisque les suffrages que les partis
politiques recueillent dans tout le pays sont comptés ensemble. Quoi qu’il en
soit, les partis se font la lutte au niveau régional au moyen de listes fermées,
conformément à une loi de juin 1995 adoptée par l’Assemblée fédérale. Un
candidat qui apparaît sur la liste nationale de 12 représentants peut aussi
chercher à se faire élire dans une circonscription uninominale régionale sous
le SMU. Par conséquent, un parti peut obtenir un siège de plus s’il l’emporte
par l’entremise de la RP. Une fois qu’un parti atteint le seuil de 5 % des
suffrages exigés sous la RP, il peut obtenir des sièges qui sont distribués
selon la méthode du plus fort reste (voir seuil).
En théorie, les petits partis devraient bénéficier d’un tel système, mais cela
ne semble pas avoir été le cas en Russie.
Aux élections
parlementaires de 1995, seuls quatre partis politiques ont atteint le seuil de
5 %, ce qui leur permettait de prétendre à des sièges des listes de RP.
Ces partis n’ont recueilli que 50,5 % de tous les suffrages exprimés, mais
ont reçu deux fois plus de sièges que si ceux-ci avaient été accordés en vertu
d’une formule pure de distribution proportionnelle. L’un des 18 partis, le
parti Femmes de Russie, qui n’a pas réussi à obtenir de sièges à partir de sa liste
de parti, a recueilli 2,3 % de suffrages de moins que le Parti Yobloco qui,
de son côté, a obtenu 31 sièges à partir de sa liste de parti. Des anomalies semblables
se sont produites dans des circonscriptions uninominales, où certains partis ont
remporté la victoire avec moins de 20 % des suffrages alors qu’ils
faisaient concurrence à plusieurs des 43 partis en lice. En conséquence, le
pourcentage de votes gaspillés a été très élevé aux élections législatives de
1995.
L’élaboration du nouveau
système électoral russe est le résultat de compromis entre les parlementaires,
le président russe et l’héritage des pratiques passées. Par voie de décret, Boris
Eltsine avait d’abord déterminé que le tiers de la Douma serait élu par un
scrutin de RPSL et que les autres représentants seraient élus dans des
circonscriptions uninominales comme dans l’ex-Union soviétique. Toutefois, un
certain nombre de groupes pro-démocratie au sein de la législature précédente
était favorable à la RPSL, y voyant un avantage pour leurs organisations qui
sont établies principalement à Moscou. Après avoir été convaincu, semble-t-il,
que les partis communistes bien organisés tireraient profit de circonscriptions
uninominales, Boris Eltsine a adopté en 1993 un système
formé à parts égales de la RP et du SMU. Parallèlement, un large consensus existait
au sujet du mode
d’élection du président et du Conseil de la Fédération; en 1995, l’élection des
membres du Conseil de la Fédération a été décentralisée afin que les élections
aient lieu conformément aux lois électorales de chaque région.
Le seuil de 5 %,
destiné à empêcher la prolifération des partis, n’a pas fonctionné en Russie et
le caractère de la
deuxième Douma, élue en 1995, était fortement
disproportionnel. Depuis, certains groupes ont proposé la suppression complète
du seuil, comme en Islande, ou un pourcentage minimal très peu élevé, comme le
seuil de 0,67 % aux Pays-Bas ou celui de 4 % en Suède. D’autres ont
proposé de passer à un système de scrutin mixte avec pleine compensation, tel
que celui utilisé en Allemagne : les sièges attribués aux partis
refléteraient alors les suffrages recueillis sous la RP au sein de chaque
région, renforçant ainsi le caractère proportionnel et le système de partis
politiques dans son ensemble.
En 1991, une personne
désirant soumettre sa candidature au poste de président devait recueillir 100 000
signatures, dont 7 % d’entre elles tout au plus pouvant provenir de la
même région. En 1995, ce nombre a été haussé à 1 million de signatures. Selon
le système présidentiel, si aucun candidat n’obtient la majorité absolue au
premier tour de scrutin, un second tour se tiendra entre les deux principaux concurrents
et le gagnant obtiendra nécessairement plus de 50 % des votes. Le mandat
est d’une durée de quatre ans renouvelable une seule fois. Une élection
présidentielle ne se tient pas la même année qu’une élection parlementaire. Un
problème avec la procédure de majorité absolue à deux tours de l’élection
présidentielle réside dans le fait qu’elle décourage la formation de coalitions
de partis, contrairement au système majoritaire à un tour pour lequel les
partis ont tendance à former deux blocs (voir Utilisation des systèmes à
deux tours pour l’élection d’un président). La tenue de l’élection
présidentielle en même temps que celle de la Douma réduirait encore la
fragmentation des partis et assurerait une meilleure reddition de comptes par
le président et la Douma.