Dans des systèmes démocratiques établis, il semble que les processus électoraux offrent suffisamment de garanties internes et qu'il n'est pas nécessaire d'y ajouter des systèmes d'observation. Dans ces cas, l'action combinée de l'organisme électoral, des préposés aux bureaux de vote, des représentants des partis politiques qui ont le droit de contester les décisions devant une autorité indépendante, et la présence d'une presse libre, protège l'honnêteté des élections. L'observation par des organismes nationaux politiquement neutres ou par des agences internationales n'est pas nécessaire mais peut être utilisée discrètement à des fins autres que d'assurer l'honnêteté du processus. Il peut s'agir, par exemple, d'invités internationaux ou de petits groupes d'experts qui évaluent l'ensemble du système et peuvent par conséquent contribuer à son amélioration éventuelle.
Par contre, l'observation semble particulièrement utile dans des démocraties en évolution. Dans ces cas, il est possible d'évaluer les procédures et de les classer selon qu'elles doivent faire l'objet d'une observation par un organisme local ou international. L'observation doit toujours être perçue comme une mesure temporaire par les systèmes qui y font appel.
Depuis le début des années 80, des opérations d'observation électorale très complexes ont été effectuées par des organismes internationaux dans des pays d'Afrique (l'Ouganda, le Mozambique, l'Angola, l'Afrique du Sud, etc.) de même qu'en Amérique centrale (le Salvador, le Nicaragua, etc.) dans un contexte de collaboration au processus de transition politique (voir Observation d'élection).
Cependant, depuis 1986, on a vu naître des organismes non gouvernementaux (ONG) nationaux qui font ce travail à la place des énormes missions internationales qui devenaient d'ailleurs de plus en plus dispendieuses.
Comme pionnier du domaine, il faut sans doute mentionner le National Citizens' Movement for Free Elections (NAMFREL) qui, pour les élections de 1986, et avec l'appui de l'Église catholique, a mobilisé plus de 500 000 citoyens des Philippines pour assurer le contrôle des élections présidentielles déclenchées par Marcos. Ce modèle a été suivi par la suite, et encore souvent sous les auspices de l'Église catholique, par la SAKA au Paraguay en 1991 et en 1994, par l'Alliance civique au Mexique en 1994, la Transparence au Pérou en 1995 et la Transparence et démocratie au Guatemala en 1996.
Ce phénomène de l'observation par des organismes nationaux mérite une analyse en profondeur. D'un côté, il est clair que cette option est très avantageuse et beaucoup moins coûteuse que les opérations d'observation internationales et qu'elle contribue sans aucun doute à la création d'une conscience démocratique nationale. Elle est aussi acceptable dans des pays comme le Pérou où les missions d'observation internationales sont interdites par la loi qui proscrit les « invités internationaux ».
Cependant, il ne faut pas perdre de vue le fait que tout système électoral doit aspirer à fonctionner sans observation. Ceci explique pourquoi ce processus est lui-même observé avec beaucoup de méfiance par les organismes électoraux et les partis politiques qui croient parfois que des fonds qui avaient été prévus pour eux sont détournés vers ces ONG. À cause de cette méfiance, leurs efforts ont souffert de mesures répressives à caractère légal ou pratique comme ce fut le cas au Nicaragua en 1996 et au Pérou en 1995, et leur statut et leurs activités ont été restreints par la loi comme ce fut le cas en Estonie en 1996.
En un mot, l'observation par les ONG demeure un phénomène ambigu. C'est une approche très constructive quand on la compare à la mobilisation de milliers d'observateurs internationaux dont la majorité ne connaissent ni le pays ni le processus électoral mais ses avantages sont d'une valeur discutable quand on s'en sert pour remplacer le développement institutionnel de l'organisme électoral et des partis politiques eux-mêmes.
La solution réside peut-être dans leur caractère temporaire. Quand l'observation est encore nécessaire, il y a lieu de faire appel à un organisme national, mais quand les opérations d'observation deviennent inutiles ou que les mécanismes de garantie du processus lui-même ont suffisamment évolué, elles ne doivent plus recevoir d'appui international.