Le fait d'avoir recours à des systèmes coûteux de haute technologie n'assure pas des élections honnêtes ni le calcul exact des résultats. La réussite dépend plutôt de facteurs tels que :
- l'objectivité des administrateurs du processus;
- le contrôle que ces derniers maintiennent sur les progrès du processus; et
- la possibilité pour les partis d'opposition et pour les observateurs impartiaux d'intervenir et d'interjeter appel si nécessaire.
La technologie ne garantit même pas une plus grande efficacité dans les tâches qui pourraient être exécutées manuellement, bien au contraire. Si on a recours à des systèmes de haute technologie trop avancés pour la formation des personnes qui les utiliseront et pour la capacité des ressources qui soutiennent le processus, ces systèmes ont plus de chances d'échouer que de réussir.
Pamela Reeves, dans un article sur les élections en Guinée équatoriale en 1995, examine l'impact de la technologie sur le déroulement du processus électoral et les tentatives d'amélioration. À la suite des élections locales, l'opposition a émis des accusations de fraude envers le gouvernement qui a mis dix jours à compléter le calcul des résultats et à proclamer l'élection des candidats du parti du gouvernement. Pendant ce temps, les partis de l'opposition avaient déjà fait leur propre calcul.
Dans le but de faire preuve de transparence et d'équité lors des élections suivantes, le gouvernement a dépensé 750 000 $ pour installer dans les 18 bureaux de circonscription des télécopieurs à transmission par satellite achetés auprès d'une firme britannique réputée et opérés par des techniciens spécialisés. La tâche de ces techniciens était de transmettre à Malabo les relevés des votes et les documents officiels de chaque bureau de vote. Par mesure de précaution, les responsables des bureaux de vote devaient transmettre pour vérification finale l'original des registres des votes et d'autres documents. Malabo disposait de cinq télécopieurs pour revevoir les résultats et d'un photocopieur pour tirer deux exemplaires des relevés, un pour l'organisme électoral et l'autre pour les observateurs internationaux.
En principe, chacun des techniciens devait transmettre les résultats vers un centre de communications situé au Canada. De là, ils devaient être re-transmis vers un centre téléphonique public situé sur le territoire continental de la Guinée. De ce centre téléphonique, ils devaient être transmis à Malabo par le biais d'un système à ondes électromagnétiques situé sur l'île Bioko, pour finalement atteindre, par un réseau téléphonique local, les cinq photocopieurs du bureau chef.
Toutefois, le jour des élections, le système téléphonique canadien a subi une panne qui a réduit la capacité de réception d'appels à 30 %, ralentissant considérablement tout le processus. Dans le but de réduire le volume de transmission aux cinq télécopieurs centraux, il fut décidé de transmettre les registres des votes au bureau chef par porteur à partir des bureaux de vote, partout où les circonstances le permettaient. Des urnes se sont perdues et la publication des résultats fut retardée de cinq jours. Lorsqu'on a retiré les télécopieurs au cinquième jour, environ 75 % des résultats avaient été compilés. L'organisme électoral a décidé de remettre la publication des résultats préliminaires jusqu'à ce qu'il reçoive les données des circonscriptions dont les télécopieurs étaient tombés en panne. Les résultats finaux n'ont été publiés que 15 jours plus tard.
L'impact de la haute technologie : les résultats ont été connus cinq jours plus tard que lors de l'élection précédente.