Un élément essentiel de la plupart des organismes de réglementation des médias durant les élections ainsi qu’en d’autres temps est la procédure de plaintes. C’est le moyen par lequel le public, les partis politiques et les médias peuvent demander un jugement sur des questions de présumées entraves à la législation ou aux règlements sur la couverture médiatique des élections. La période électorale étant souvent courte, les mécanismes de plaintes doivent permettre de régler rapidement les cas de plainte. Si, par exemple, la plainte concerne une inexactitude factuelle pouvant influer sur le vote des électeurs, il est inutile de corriger l’erreur après le scrutin.
Les plaignants auront toujours la possibilité de recourir à une des procédures prévues par le droit national – une poursuite au civil dans une cause de diffamation, par exemple. En outre, il devrait toujours y avoir une possibilité de recours pour les plaignants ou les médias auprès d’une cour supérieure indépendante. Mais en général, l’accent sera mis sur la résolution rapide, non coûteuse et non conflictuelle des conflits. Cela est particulièrement important dans les situations où l’hostilité est grande entre les partis ou les communautés et où les différends à régler risquent d’être nombreux. Par exemple, l’organe chargé de gérer ces plaintes en Bosnie-Herzégovine, la Sous-commission d’appel des élections, a pu résoudre rapidement une série de plaintes qui lui avaient été confiées par la Media Experts Commission durant l’élection présidentielle de 1998. Cela a permis de réduire les tensions entre les différentes communautés en évitant que les différends entre les partis et les médias ne s’enveniment. Il était important qu’il en soit ainsi, compte tenu du rôle important joué par les médias dans l’attisement des violences politiques en ex-Yougoslavie.
Les types de procédures de plaintes sont aussi nombreux que les différents genres d’organismes de réglementation. Il peut même ne pas y avoir une seule et unique forme de procédure. La Grande-Bretagne, par exemple, a un organisme, régi par la loi, qui est chargé des plaintes en matière de radiodiffusion et un autre, de nature volontaire, qui est chargé des plaintes en matière de presse écrite. Aucun de ces organismes ne se limite au domaine électoral. L’avantage d’un organe spécialisé dans les plaintes électorales est qu’il peut mieux assurer une résolution rapide des conflits. Par exemple, le Conseil suprême électoral du Nicaragua reçoit les plaintes et, à travers sa Direction des médias, rend des décisions privées contre les médias dont la culpabilité est établie. La décision n’est publiée que si le média ne s’y conforme pas[1]. Au Monténégro, par contre, les médias publics sont obligés de publier toute décision des autorités compétentes concernant « toute violation des principes d’égalité et d’objectivité relatives à l’information des citoyens sur les candidats et leurs programmes... »
Peu de mécanismes de plaintes sont aussi complexes que ceux de la Russie. La Chambre juridique pour les conflits en matière d’information n’est pas spécialisée dans les plaintes électorales, même si elle est née du besoin de créer un organe chargé de la gestion des conflits survenus durant les élections parlementaires et le référendum constitutionnel de 1993. Son prédécesseur était la Cour d’arbitrage des questions d’information, qui avait spécifiquement été établie pour s’occuper des différends électoraux[2].
[1] ARTICLE 19, Guidelines for Election Broadcasting in Transitional Democracies, 1994, p. 38.
[2] Viktor Monakhov, « Information Disputes Relating to Election Campaigning via the Mass Media: The Experience of the Judicial Chamber in the 1999 Election Campaign », dans IFES, The Media and the Presidential Elections in Russia 2000, Human Rights Publishers, Moscou, 2000.