À l’ouverture des centres de vote, le rôle des médias évolue par rapport à celui qui leur était dévolu pendant la période de campagne électorale, et il peut être nécessaire d’établir des règles spécifiques régissant ce changement. Les campagnes des candidats et des partis sont alors terminées et dans certains pays, la couverture de l’actualité est fortement limitée, voire interdite pendant cette période. Cependant, il s’agit de la période de plus grande effervescence dans les salles de presse et pour les journalistes, car chacun essaye de recueillir des informations sur l’avancée du scrutin et sur les résultats probables des élections. Les journalistes sont présents dans les centres de vote pour rendre compte des premiers résultats. Les médias peuvent également mener des sondages de sortie des urnes pendant cette période. Leur forte présence peut jouer un rôle essentiel pour garantir une conduite pacifique, libre et équitable des élections pendant le ou les jours du scrutin.
Silence pendant la campagne et silence médiatique
En pratique, le passage de la période de campagne à la période de scrutin peut survenir avant et même bien avant le jour même du scrutin et peut entraîner l’application d’une interdiction de couverture de la campagne politique et des sondages d’opinion, de diffusions en accès direct ou de publicités, ou de tous ces éléments à la fois. Pour de plus amples informations, consultez la section suivante : Périodes d’interdiction de bulletins de nouvelles.
Les problèmes résultant d’une interdiction de couverture pendant la période de scrutin ou le jour du scrutin deviennent bien plus complexes selon la durée effective du scrutin et le nombre de fuseaux horaires du pays concerné. Dans ce dernier cas, les résultats d’un fuseau horaire peuvent être disponibles avant la fin du scrutin dans un autre fuseau. De même, si les résultats sont comptabilisés par circonscription ou par état, certains décomptes peuvent être disponibles avant d’autres.
En fait, deux principaux impératifs sont en jeu :
- préserver l’intégrité du processus électoral et la sécurité du vote ;
- s’assurer que la publication précoce d’information n’influencera le vote d’aucune façon.
Le premier enjeu est plus simple que le second. Il n’est généralement pas difficile de trouver un équilibre qui assure un accès spécial aux médias pour couvrir le scrutin tout en garantissant le secret du vote et la sécurité.
Toutefois, assurer une transparence et une circulation maximales de l’information sans s’ingérer de façon inappropriée dans le processus peut s’avérer plus difficile. Diverses approches ont été adoptées pour relever ce défi.
Accès des médias aux centres de vote
Il est important que les médias soient présents dans les bureaux de vote pour qu’ils puissent assumer leur rôle de surveillant. Les électeurs peuvent également ainsi être informés de l’avancée du scrutin et du comptage. Les nouveaux médias ont joué un rôle plus particulièrement bénéfique dans ces deux domaines grâce à une actualisation des informations en temps réel. Pour préserver la transparence du processus, il est essentiel que les OGE facilitent la présence cruciale des médias dans les centres de vote.
Globalement, les médias ont besoin d’un accès plutôt général pour filmer ou photographier des électeurs potentiels patientant dans les files d’attente, déposant leurs bulletins de vote, etc. Les journalistes jouissent souvent d’un certain degré d’accès qui n’est pas accordé au grand public. Parfois, les personnes qui ne votent pas se voient refuser tout accès aux bureaux de vote – une mesure destinée à minimiser l’intimidation de dernière minute – mais les journalistes et les observateurs qui peuvent présenter leur accréditation sont exemptés de cette mesure d’exclusion. Cependant, les médias et les observateurs, malgré ce privilège, sont assujettis aux mêmes restrictions de base que le reste de la population. Cela signifie que les journalistes ne peuvent rien faire dans un centre de vote (ou dans tout autre lieu pour la question qui nous intéresse) qui puisse constituer de l’intimidation ou une pression sur le processus électoral. En outre, l’accès des journalistes aux centres de vote est uniquement contrôlé par le fonctionnaire électoral qui est responsable des lieux et qui doit donner son assentiment.
L’Institut électoral d’Afrique du Sud a dressé une liste utile d’autorisations et d’interdictions pour les médias pendant les élections dans ce pays en 1999. Les professionnels des médias pouvaient :
- présenter leur carte de presse au fonctionnaire responsable des bureaux de vote et de dépouillement ;
- prendre des photos et mener des entretiens avec le consentement du fonctionnaire responsable ;
- faire partie d’un « groupe de représentants de la presse » (regroupement d’un grand nombre de journalistes qui veulent une photo ou un entretien avec une personnalité et qui sont représentés par un petit nombre de journalistes).
Les lignes directrices soulignaient également que certains électeurs pouvaient ne pas vouloir être photographiés ou interrogés.
Les professionnels des médias ne pouvaient pas :
- compromettre le secret du vote et la bonne conduite de l’élection ;
- publier de fausses informations dans l’intention de déranger ou d’empêcher l’élection ;
- publier des informations incitant à l’hostilité ou à la crainte dans le but d’influencer les résultats des élections ;
- publier des informations susceptibles d’influencer la conduite ou les résultats d’une élection ;
- publier les résultats d’un sondage de sortie des urnes pendant les heures de scrutin.
L’Institut électoral d’Afrique du Sud rappelait aussi un certain nombre d’interdictions générales qui s’appliquaient également aux professionnels des médias, qui ne pouvaient donc pas :
- entraver l’indépendance et l’impartialité de la Commission électorale indépendante ;
- inciter par la force ou la persuasion quiconque à s’inscrire ou à ne pas s’inscrire ;
- inciter par la force quiconque à soutenir ou à ne pas soutenir un candidat ou un parti politique ;
- participer à des activités politiques illégales ;
- se faire passer pour un représentant ou un candidat d’un parti politique ;
- prétendre travailler avec la Commission électorale indépendante ;
- fournir des informations sur le scrutin ou le dépouillement des votes, briser un scellé ou ouvrir une urne contenant du matériel électoral[i].
[i] Raymond Louw, « A Handbook on the Media and Electoral Law », Johannesburg : Institut électoral d’Afrique du Sud, 1999 http://www.eisa.org.za