Le droit de réplique ne suscite pas l’enthousiasme des médias, mais il est de plus en plus utilisé par les tribunaux et par les organismes internationaux chargés d’établir des pratiques acceptables. Les journalistes n’auront peut-être d’autre choix que d’accepter ce moindre mal, à défaut de quoi ils pourraient être tenus responsables de souscrire aux opinions d’un candidat ou d’un autre.
Évidemment, la meilleure façon d’éviter de se voir imposer un droit de réplique est de s’assurer que la couverture médiatique est équilibrée. Même les médias américains, en principe libres de réglementation, ont dû se conformer à une doctrine d’équité pour leurs reportages électoraux garantissant que tous les principaux partis aient voix au chapitre dans les émissions de nouvelles et d’affaires publiques. Les stations de radio et de télévision doivent offrir « une possibilité raisonnable de laisser les points de vue opposés s’exprimer[1] ». Il convient de remarquer que c’est le mot « raisonnable » qui est utilisé ici, plutôt que « égale ». La couverture n’est pas mesurée au chronomètre. L’idée est simplement de s’assurer que tous les points de vue sont exprimés.
Cette approche d’équité n’est pas toujours suffisante. Les dispositions de la US Communications Act concernant les attaques personnelles prévoient que lorsqu’une attaque vise les qualités personnelles ou le caractère d’une personne, cette dernière doit en être informée et avoir la possibilité de répliquer[2].
Lors de l’élection de 1994 en Afrique du Sud, il existait une disposition législative un peu plus large que celle des États-Unis, mais basée sur le même principe. Cette disposition, qui est courante dans les textes législatifs électoraux, vise à permettre des débats tempérés. La disposition législative de l’Afrique du Sud stipulait que si une critique était exprimée contre un parti politique sans que ce dernier ait l’occasion d’y répondre à ce moment-là ou sans que son point de vue soit exprimé, le radiodiffuseur devait accorder à ce parti l’occasion raisonnable de répliquer à la critique.
La législation énonçait également que si une chaîne avait l’intention de diffuser dans les 48 heures précédant le début du vote une émission au cours de laquelle un parti politique serait critiqué, le radiodiffuseur de cette émission devait accorder à ce parti l’occasion de répliquer au cours même de cette émission ou aussitôt que possible après. Cette disposition ne touchait que les émissions sur lesquelles les radiodiffuseurs avaient un contrôle éditorial et non pas les messages politiques ou les annonces publicitaires diffusés par les partis eux-mêmes[3].
La législation du Brésil contient une disposition touchant les fausses déclarations exprimées volontairement lors des émissions en accès direct. Elle prévoit que la personne victime d’une fausse déclaration peut faire appel à un tribunal. Si le tribunal lui donne gain de cause, le plaignant se voit accorder un temps d’antenne déterminé et gratuit aux fins de réplique, et un temps égal est alors déduit du temps d’antenne gratuit qui avait été accordé au contrevenant.
[1] Robert M. Entman, « The Media and U.S. Elections: Public Policy and Journalistic Practice », dans Yasha Lange et Andrew Palmer (dir.), Media and Elections: a Handbook, European Institute for the Media, Dusseldorf, 1995.
[2] Ibid.
[3] Article 21, Independent Media Commission Act, 1994.