Pour couvrir les élections professionnellement, les journalistes bénéficient d’une formation, d’un soutien et d’une mise en pratique appropriés. Ils ont besoin de domaines de connaissances supplémentaires pour couvrir ces événements, à savoir :
- la compréhension du système politique et électoral ;
- la compréhension du processus électoral global ;
- une certaine connaissance de la législation électorale, surtout en ce qui concerne la couverture ;
- la compréhension du rôle des médias dans la couverture électorale ;
- la connaissance de l’histoire électorale du pays ;
- la connaissance détaillée des mécanismes de l’inscription des électeurs, du découpage de la carte électorale, du vote, du dépouillement et de toute autre question pertinente (telle que l’utilisation de la technologie pour le vote ou l’utilisation du vote par correspondance, si ces questions peuvent être sujettes à controverse) ;
- les candidats, leurs soutiens, leurs relations, leurs qualités de dirigeant, etc. ;
- les différents rôles des hommes et des femmes pendant les élections et les mesures prises pour veiller à la participation des femmes ;
- les types de reportage plus ou moins spécifiques aux élections (comme la couverture des sondages d’opinion) ;
- la couverture électorale et la sécurité ;
- les nouveaux médias dans le contexte de la couverture électorale, des campagnes des candidats, du journalisme citoyen, etc. ;
- le journalisme d’investigation dans un contexte électoral ;
- l’attitude du public envers les candidats et les élections ;
- les besoins du public en matière d’information électorale.
Les journalistes chargés de la couverture électorale ont généralement des parcours différents. Certains d’entre eux ont rejoint un organe d’information avec ou sans diplôme universitaire alors qu’ils étaient encore de jeunes journalistes, tandis que d’autres sont des autodidactes qui ont pu intégrer le journalisme professionnel en rédigeant des articles ou en préparant des reportages. Une partie d’entre eux a suivi une formation universitaire en journalisme, d’autres ont participé à des formations sur le terrain de courte durée et d’autres encore n’ont suivi aucune formation théorique. Les journalistes qui possèdent une formation universitaire peuvent avoir participé à des cours ayant trait aux élections, par exemple en sciences politiques ou en politiques publiques, et d’autres peuvent être titulaires de diplômes de disciplines plus éloignées. Dans beaucoup de pays, les institutions de formation qui proposent des cours de journalisme spécialisé sont peu nombreuses.
Cependant, malgré le déséquilibre ou les écarts importants entre les programmes, le nombre de programmes de formation et d’enseignement journalistiques est en augmentation dans le monde. Une enquête menée en 2008 par l’Université d’Oklahoma et soutenue par la Knight Foundation a permis de recueillir des informations à propos de 2 850 programmes, dont près de 21 % sont issus de la région Asie-Pacifique, soit un pourcentage supérieur à celui de la région nord-américaine qui est de 19,3 %[i]. Le World Journalism Education Council (WJEC) compile actuellement une base de données relative aux programmes d’enseignement de journalisme du monde entier. À la date de mise à jour de cette section sur les médias et les élections de l’encyclopédie (2012), le WJEC a collecté des informations à propos de 2 332 programmes d’enseignement, dont près de la moitié sont des programmes d’Amérique du Nord et d’Europe[ii].
Les statistiques relatives aux programmes d’enseignement n’apportent toutefois aucune indication concernant la qualité ou la nature desdits programmes. Dans certains pays, les formations en journalisme existantes peuvent être au service d’un régime autoritaire qui n’encourage pas ou interdit les pratiques démocratiques. En outre, même s’il existe un vaste éventail de formations en journalisme de qualité de courte ou de longue durée, celles-ci ne portent pas forcément sur la couverture électorale.
Différentes institutions, telles que des OGE ou des ONG œuvrant en faveur du développement des médias, peuvent organiser des ateliers ou des formations en matière de couverture électorale et combler ainsi l’inexistence de formation officielle. Ces formations d’une durée habituellement comprise entre quelques jours et quelques semaines peuvent se dérouler à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. Les formations à l’intérieur du pays permettent à un plus grand nombre de journalistes d’y participer, alors que les formations à l’extérieur du pays offrent aux participants un accès à des ressources qui ne sont pas disponibles dans leur pays et à des contextes d’enseignement différents. En général, les formations offrent aux journalistes quelques outils fondamentaux pour la couverture électorale, mais on constate parfois un dédoublement de leurs contenus. De plus, les journalistes peuvent dans quelques cas participer à des cours plus approfondis qui leur permettent d’accroître de manière méthodique leurs niveaux de compétences. Dans l’idéal, les formations liées aux élections devraient être mises en œuvre pendant toute la durée de processus électoraux. Les participants peuvent ainsi appréhender pleinement les différents outils et difficultés qui sont rattachés à chaque phase électorale.
Pour planifier des formations, les organismes et les institutions doivent répondre à plusieurs questions potentielles :
- Quelle est la durée de formation raisonnable et efficace ?
- Comment est-il possible d’adapter la formation à la situation dans le pays concerné (y compris en tenant compte du niveau d’instruction relatif aux médias) ?
- Quels sont les problèmes de sécurité qui peuvent avoir une incidence sur les formations ?
- L’environnement politique et sécuritaire permettra-t-il aux journalistes de mettre en pratique ces nouvelles compétences en matière de couverture électorale ?
- Comment les participants seront-ils sélectionnés ? Devront-ils passer un test d’admission, seront-ils désignés par leurs institutions, etc. ?
- Sera-t-il possible de toucher suffisamment de journalistes pour que cette initiative porte ses fruits ?
- Les femmes journalistes seront-elles autorisées à participer aux formations et quelles sont les mesures qui permettront de garantir leur participation ?
- Quelle sera la période de formation la plus adaptée pour assurer des retombées optimales sans empiéter sur les activités professionnelles des journalistes ?
- Quel type d’activité de suivi peut être mis en œuvre pour que la formation soit intégrée dans un programme de développement des médias plus large ?
Il n’existe pas de réponses simples à ces questions. Cependant, pour y répondre de la meilleure manière possible, il convient de préparer ces formations en collaboration étroite avec les principales parties prenantes : les OGE, les organismes de réglementation des médias, les propriétaires des médias, les syndicats et les organisations professionnelles de journalistes. Il peut également être utile au préalable de procéder à un exercice de cartographie des médias pour élaborer ces programmes de formation afin d’assurer la participation des médias les plus influents et de médias issus de différents horizons.
Il existe différentes ressources pertinentes pour les journalistes et les formateurs, qui comprennent des conseils et des méthodes de formation en matière de couverture médiatique professionnelle des élections :
Une publication récente du Center for International Media Assistance (CIMA), intitulée « Covering Elections: The Challenges of Training the Watchdogs », fournit une description générale de la formation en matière de couverture électorale ainsi qu’une liste importante d’exemples de formations dans différents pays. Cette publication est accessible à la page suivante : http://cima.ned.org/publications/covering-elections-challenges-training-watchdogs
La Fédération internationale des journalistes a élaboré plusieurs documents intéressants sur lesquels les journalistes peuvent s’appuyer pour la couverture électorale (et pour leurs activités en général). Il s’agit, entre autres, d’un code de bonne conduite et d’un manuel de couverture électorale qui est accessible à la page suivante : http://www.ifj.org/en/articles/election-reporting-handbook
Le Guide pratique du journaliste en période électorale, élaboré par Reporters sans frontières, fournit des informations complètes pour la couverture électorale, notamment des informations qui ont été adaptées en fonction de chaque phase des élections, ainsi que des recommandations approfondies sur la couverture des campagnes. http://fr.rsf.org/le-guide-pratique-du-journaliste-20-07-2012,43041.html
Le Guide pratique du journaliste, également réalisé par Reporters sans frontières, fournit des conseils aux journalistes pour travailler en toute sécurité dans les situations dangereuses (http://fr.rsf.org/le-guide-pratique-du-journaliste-12-04-2007,21667.html).
Le Guide de Sécurité des Journalistes du Comité pour la Protection des Journalistes est un manuel destiné aux journalistes intervenant dans les situations dangereuses. Il comprend des informations sur la sécurité numérique (cpj.org/security/guide_fr.pdf).
Même si l’Institute for Media, Policy and Civil Society (IMPACs) n’est plus actif, ses publications restent des ressources précieuses pour le personnel des médias. Il est particulièrement intéressant pour le sujet qui nous intéresse de consulter la publication de 2004 intitulée « Les médias et les élections – Un manuel de reportage sur les élections » (accessible ici).
Les modules de formation BRIDGE (Building Resources in Democracy, Governance and Elections) ont principalement été élaborés à l’intention du personnel d’administration électorale, des prestataires de services d’assistance, des observateurs et des autres parties prenantes. Ces formations sont également utiles pour les membres des médias car elles fournissent des informations détaillées à propos des procédures et des mécanismes de chaque étape des processus électoraux. Elles sont riches en enseignements pour les journalistes qui couvrent des élections. De plus, l’un des modules consacrés aux médias et aux élections examine le rôle des codes de conduite ainsi que les relations de travail entre les OGE et les médias. Pour de plus amples informations, veuillez consulter le site web suivant : http://bridge-project.org.
Le document « Media and the Elections Process » de la Fondation Reuters fournit des informations utiles et claires sur les processus électoraux tels que les modes de scrutin, les systèmes de dépouillement, les problèmes liés au découpage de la carte électorale ou au financement de campagne, etc. Vous le trouverez ici.
[i] David E. Kaplan, « Empowering Independent Media, U.S. Efforts to Foster Free and Independent News Around the World. Inaugural Report: 2008 », rapport du Center for International Media Assistance, éd. Marguerite H. Sullivan, Washington DC : National Endowment for Democracy, 2008, p. 48
[ii] Page web « World Journalism Education Census », World Journalism Education Council, dernière visite le 30 août 2012, http://wjec.ou.edu/census.php