Motifs
Un exercice de planification stratégique permettra l'utilisation efficace des ressources humaines, financières et matérielles.
Avant d'entreprendre l'exécution de toute activité majeure du processus électoral, l'organisme électoral doit d'abord passer par l'exercice de planification. C'est une activité qui s'impose à tout gestionnaire, qu'il soit responsable d'un organisme électoral national ou d'un bureau de vote. Il doit rédiger un plan d'action clair énonçant la manière de s'acquitter de ses responsabilités. Le contenu du plan variera selon qu'il traite de l'organisation d'une élection spécifique ou des objectifs et des mécanismes permettant d'atteindre le plus haut degré d'efficacité d'un organisme permanent. Les énoncés de mission abondent, tout comme les énoncés de valeurs, les plans à court et à long terme, les plans stratégiques et la description des programmes. Il semble parfois qu'il existe une rivalité entre les organismes à savoir lequel pourra rédiger le plan ou l'énoncé le plus complexe, mais il semble aussi que plus ces documents sont élaborés, moins ils sont respectés.
Contenu du plan
L'American Management Association a publié le Workbook Programme on Strategic Planning14 qui précise qu'un plan doit être simple, flexible et réaliste. Il doit d'abord énumérer les tâches principales à accomplir. Il doit définir les différents domaines d'activités et les personnes responsables de chacun. Il doit énoncer les principes de base que devront refléter les activités de l'organisme électoral. Le plan opérationnel (voir Planification opérationnelle) devrait éventuellement appliquer ces principes aux diverses tâches électorales pour lesquelles un plan d'action détaillé établira les échéanciers et les programmes. Tout plan stratégique devrait prévoir une évaluation régulière du processus parce qu'il est nécessaire de déceler les problèmes qui pourraient survenir.
Profiter de l'expérience acquise
Sauf s'il s'agit d'une toute première élection, la planification stratégique en vue d'une élection débute dès la fin de l'élection précédente et il convient d'évaluer les parties du processus qui ont bien ou mal fonctionné. Les activités électorales sont normalement de nature répétitive et on peut bénéficier des leçons que chacune peut fournir. Très souvent les mêmes problèmes se répètent d'une élection à l'autre, comme un nombre important d'électeurs non inscrits, une mauvaise disposition des bureaux de vote causant des retards et de l'incertitude, un dépouillement des votes inefficace à cause des locaux inadéquats ou d'un manque d'uniformité dans la manière de traiter des situations semblables d'un bureau de vote à l'autre à cause d'une formation insuffisante. Il est donc important de préciser les problèmes survenus lors de l'élection précédente et de prendre des mesures pour qu'ils ne se répètent pas. Si ces problèmes ne relèvent pas de la compétence de l'organisme électoral, il est tout de même bon de les souligner pour que les responsables puissent les rectifier.
Tâches principales et objectifs
Il est essentiel d'abord d'identifier les principales tâches à accomplir et les objectifs que chacune vise. Le processus électoral est normalement assujetti à des dispositions législatives et le plan stratégique devrait être dressé de manière à respecter ces dispositions.
Le plan peut porter sur l'activité globale d'un organisme électoral national ou sur la préparation et l'exécution d'une tâche principale du processus électoral comme l'inscription des électeurs ou la tenue d'une élection nationale.
Dans son plan couvrant la période de 1993 à 1996,15 la commission électorale de l'Australie a défini ses cinq tâches principales comme étant le maintien du registre des électeurs, la tenue des élections, la sensibilisation de la population, les élections pour les relations industrielles et la gestion corporative. Elle a ensuite précisé l'objectif majeur de chacune de ses activités et dressé un plan lui permettant d'atteindre cet objectif.
Pour réaliser ses objectifs, la commission australienne dispose de gestionnaires électoraux dans chaque État et territoire, responsables de l'organisation des élections. Au niveau national, l'administration centrale comprend les cinq directions suivantes :
- les services corporatifs - responsables de la gestion des ressources, du personnel, des services administratifs et de la planification stratégique;
- l'information et l'éducation;
- la recherche et le développement - responsable des opérations électorales, des services juridiques, de la formation, de la recherche et des relations internationales;
- les élections pour les relations industrielles - la commission est chargée de tenir certaines élections en rapport avec les relations industrielles;
- la technologie de l'information.
Cette structure permet à la commission non seulement de s'acquitter de sa tâche opérationnelle, la tenue d'élections, mais aussi de disposer des ressources nécessaires pour s'engager dans de nouvelles initiatives et dans la recherche, d'entreprendre la planification qui s'impose et de développer des systèmes technologiques.
Mesures de contingence
Tout plan stratégique doit prévoir des mesures pour faire face à des situations d'urgence imprévues. Voici un extrait d'un article intitulé Preparing for the Worst écrit par David Leahy et paru dans Elections Today (volume 5, no 4) :
Peu importe où nous vivons, des désastres naturels ou autres peuvent survenir. Si un plan de contingence détaillé n'a pas été prévu, le gestionnaire devra très rapidement évaluer la situation, déterminer une solution réaliste et faire appel à toutes les ressources disponibles. Avant qu'un désastre ne survienne, il faut prévoir des mesures d'urgence en prévision de catastrophes qui pourraient affecter votre environnement de travail immédiat. Non seulement est-il prudent de préciser les mesures à prendre, mais le simple fait de le faire sera utile si un désastre majeur survient. Il est souhaitable de mettre sur pied à l'avance un réseau vous permettant de communiquer avec tous les employés (et pas nécessairement par téléphone). Dès que le désastre frappe, il faut savoir si les employés sont en sécurité et déterminer s'ils ont des besoins urgents, puis leur faire connaître les heures et l'endroit auxquels ils doivent se présenter au travail. Il faut identifier la personne sur qui repose la décision d'ajourner une élection. Que ce soit un gouverneur, un secrétaire d'État ou un tribunal, il ne faut pas tarder à déterminer si l'élection sera ajournée ou non.
Il importe de communiquer et de collaborer avec les préposés aux mesures d'urgence ou la force policière, de leur faire part de l'impact du désastre sur vos activités, de prendre part aux réunions sur les mesures d'urgence et de se familiariser avec les mesures que les préposés entendent prendre et les ressources qui seront déployées afin d'y avoir accès le plus possible.
Un membre de votre personnel devrait être affecté au centre d'urgence dès que le désastre survient afin (a) d'évaluer le degré du désastre; (b) d'être en communication rapidement avec les responsables des mesures d'urgence comme les services téléphoniques et autres; et (c) de transmettre les informations en matière électorale dans les bulletins de nouvelles. Une autre personne devrait être chargée de coordonner l'aide de diverses sources qui pourrait vous être offerte, afin d'en tirer le plus grand avantage. Lors d'un désastre, il importe non seulement de porter son attention sur la logistique de l'élection mais également de s'assurer que les dispositions prises pour la tenue de l'élection soient exécutées. Il faut surtout s'assurer que l'élection demeure la plus équitable possible pour les électeurs et les candidats.
Il est également important de conserver les détails des coûts excédentaires occasionnés par la situation afin d'être en mesure d'appuyer une demande de crédits additionnels, le cas échéant.
Plusieurs autres considérations peuvent être incluses dans un plan de contingence, mais le gestionnaire électoral doit se rappeler que, peu importe l'efficacité du processus électoral et la compétence du personnel qui l'exécute, et peu importe la planification dont il a été l'objet, il surviendra toujours des problèmes qui parfois peuvent être sérieux. Même si ces problèmes sont entièrement en dehors des pouvoirs du gestionnaire, leur effet sera moins sérieux si un plan de contingence ou d'urgence est en place. Sans un tel plan, un problème provenant d'ailleurs peut rapidement occasionner des plaintes sur la façon dont le gestionnaire électoral y a fait face. Dans les pays en voie de développement, de tels problèmes sont souvent causés par l'insuffisance de services provenant de sources externes comme l'eau, l'électricité, les carburants, et qui peuvent avoir un effet majeur sur des échéanciers déjà très serrés.
Autres considérations de planification stratégique
Il convient également de se pencher sur les questions suivantes :
- préciser toutes les ressources externes possibles - le personnel, le matériel, la technologie, les locaux et les sources d'aide;
- déterminer quelles tâches pourraient être effectuées par des ressources contractuelles ou venant de l'étranger;
- identifier les autres organismes à qui la loi confie des responsabilités dans le processus et assurer une coordination avec eux;
- établir un processus permettant d'évaluer chaque tâche une fois complétée;
- élaborer des programmes de formation;
- mettre sur pied des systèmes efficaces de budgétisation et de contrôle des déboursés.
D'importance majeure est la nécessité de maintenir le principe des chances égales pour tous les partis politiques autant que les circonstances le permettent.
Valeurs
Parce que les valeurs d'un organisme ont une forte incidence sur la façon dont il opère et sur la réalisation de ses objectifs, son plan stratégique devrait énoncer les valeurs que s'est données cet organisme. Dans son plan stratégique, Élections Canada16 traduit ses valeurs en engagements » :
- garantir l'intégrité et la transparence dans le processus électoral;
- favoriser un système équitable, ouvert et accessible à tout l'électorat du Canada;
- faciliter la participation de tous les Canadiens et Canadiennes au processus électoral;
- assurer la formation et le perfectionnement de notre personnel, de sorte que nous puissions fournir à notre clientèle le meilleur service possible;
en « aspirations »:
- offrir à notre clientèle un service professionnel, rentable et de première qualité;
- favoriser des relations harmonieuses entre les membres du personnel, ainsi qu'avec le public;
- jouer sur la scène mondiale un rôle de premier plan en matière d'innovation et de rendement parmi les organismes électoraux;
- réaliser nos objectifs avec efficience et efficacité;
en « croyances »:
- l'impartialité et l'indépendance du Bureau;
- l'esprit d'équipe et la communication franche dans toute l'organisation;
- l'esprit de corps parmi les membres du personnel, dans un milieu de travail imprégné du sens du partage, de l'estime mutuelle et de l'entraide;
en volonté « d'encourager »:
- l'innovation, la créativité, le sens d'initiative et l'ouverture parmi tous les membres du personnel.
Par ce document, Élections Canada transmet clairement au lecteur ses objectifs, ses valeurs et ses idéaux, et s'engage à les concrétiser.
Sommaire
Les documents publiés par les organismes électoraux nationaux du Canada et de l'Australie font état du travail accompli précédemment de même que des plans qu'ils envisagent à court terme, à moyen terme et à long terme. Le gestionnaire électoral qui se prépare en vue d'une élection importante aurait avantage à consulter ces documents qui touchent toutes les questions majeures. Il est évidemment possible d'organiser des élections sans processus de planification stratégique, mais l'absence d'un tel plan ne permettra pas d'atteindre le degré d'excellence souhaité. Une planification stratégique efficace vise, à moyen terme et à long terme, à évaluer et à améliorer chaque étape du processus électoral pour le bénéfice de tous les participants. Il est très difficile d'obtenir une image complète du processus sans l'implication et la consultation des personnes oeuvrant à tous les niveaux de l'organisme électoral et des représentants politiques. Cette consultation met en évidence la transparence du travail du gestionnaire électoral.