Olufunto Akinduro
Contexte
Le Nigeria a proclamé son indépendance en 1960. Comme la plupart des anciennes colonies britanniques, ses élections sont gérées par un OGE permanent. L’histoire politique du pays est marquée par plusieurs années de régime militaire et quatre gouvernements civils. Chaque programme de transition a vu la création d’une autorité de gestion électorale. Au total, le Nigeria a connu cinq OGE : la Commission électorale de la fédération (Electoral Commission of the Federation, ECF), qui dirigea les élections fédérales de 1964 et les élections régionales de 1965 ; la Commission électorale fédérale (Federal Electoral Commission, FEDECO), qui conduisit les élections de transition en 1979 et les élections controversées de 1983 qui aboutirent au retour du régime militaire ; la Commission électorale nationale (National Electoral Commission, NEC) qui géra le programme triennal de transition et prit fin avec les élections annulées de 1993 ; la Commission électorale nationale du Nigeria (National Electoral Commission of Nigeria, NECON), créée par le général Sani Abacha pour administrer son programme de transition, interrompu après son décès en 1998 ; et enfin la Commission électorale nationale indépendante (Independent National Electoral Commission, INEC). L’INEC, objet de cette étude de cas, est l’OGE le plus durable de l’histoire du pays. Elle a organisé quatre élections : l’élection de transition de 1999 ; l’élection historique de 2003, la première menée à bien sous un régime civil au Nigeria ; les élections cruciales de 2007, qui ont facilité le premier changement de régime civil dans le pays ; et les élections de 2011[1].
Cadre législatif
La longue histoire des réformes constitutionnelles et électorales du Nigeria s’étend de la période coloniale jusqu’en 2010, le débat sur les réformes électorales se poursuivant depuis les élections de 2011. Il est également important de noter que les principaux processus constituants qu’a connus le pays sont étroitement liés à l’histoire de ses programmes de transition. Depuis l’indépendance, tous les OGE ont été nommés par le président, sous réserve de ratification législative. Les OGE créés sous le régime militaire étaient nommés par le Conseil exécutif fédéral (Federal Executive Council). Il est par ailleurs important de mentionner que le principe de fédéralisme (en anglais Federal Character Principle), introduit par la Constitution de 1979, est aujourd’hui encore l’un des critères de sélection des membres des commissions électorales[2].
Les élections au Nigeria sont actuellement régies par la Constitution (révisée) de 1999 et la loi électorale (révisée) de 2010. Comme dans les constitutions précédentes, l’INEC est un organisme exécutif fédéral. La Constitution définit les grandes lignes des pouvoirs et responsabilités de la commission et établit son indépendance et ses modalités de financement. En 1999, elle a introduit la création de 36 commissions électorales indépendantes (State Independent Electoral Commissions, SIEC), une pour chaque État de la fédération, habilitées à organiser les élections des collectivités locales[3]. La Constitution prévoit également la nomination du président et des membres des différentes commissions par le Président de la République, avec l’aval du Sénat. Dans les États, les gouverneurs nomment le président et les membres des SIEC avec l’accord de la Chambre d’assemblée de l’État. La Constitution énonce également les critères applicables à l’enregistrement des partis politiques[4].
La loi électorale précise la structure de l’INEC, ses pouvoirs, les principes de l’inscription des électeurs, les procédures d’organisation des élections, l’enregistrement et la réglementation des partis politiques, ainsi que les infractions électorales et leur traitement.
Le cadre juridique électoral du Nigeria a connu plusieurs réformes depuis 1999. Une loi électorale a été adoptée en 2001, et trois autres ont suivi en 2002, 2006 et 2010. Outre de nombreux autres changements, la loi de 2006 a notamment habilité l’INEC à nommer son secrétaire, à prendre en charge l’éducation des électeurs et à engager des poursuites contre les auteurs d’infractions. Elle a également clarifié les ambiguïtés entourant la nomination et la révocation des commissaires électoraux résidents (Resident Electoral Commissioners, REC). La loi de 2010 avait pour but de pallier les défauts de celle de 2006 et d’harmoniser la loi avec la Constitution révisée. Il est important de noter que les débats entourant l’adoption de la loi ont coïncidé avec ceux sur les réformes constitutionnelles, en amont des élections de 2011. La loi électorale de 2010 s’est donc concentrée sur des points que les efforts de réforme électorale précédents n’avaient pas pu traiter, car ils auraient imposé la révision de la Constitution de 1999. La loi a également été modifiée une fois avant les élections de 2011 afin d’augmenter le délai accordé pour l’inscription électorale, de reporter les élections de janvier à avril 2011 et de simplifier ses pouvoirs de réglementation des activités des partis politiques, notamment concernant la désignation des candidats par le biais d’élections primaires au sein des partis[5]. La loi de 2010 interdit par ailleurs aux partis de modifier le nom des personnes désignées comme candidats, fixe de nouveaux plafonds pour les dépenses de campagne, autorise l’INEC à annuler l’enregistrement des partis politiques sous certaines conditions prévues par la loi et limite les pouvoirs d’annulation des résultats d’une élection accordés aux tribunaux compétents en matière de demande d’invalidation, mais interdit aux juridictions de déclarer les vainqueurs d’une élection. Elle confie l’annonce et la publication des résultats électoraux aux bureaux de vote, introduit des dispositions pénales pour les infractions électorales et autorise l’INEC à engager des poursuites contre leurs auteurs.
La Constitution de 1999 a été révisée deux fois en 2010, après plus de dix ans de discussions nationales sur les réformes constitutionnelles. Après les élections de 2007, considérées comme les pires de l’histoire du pays [6], feu le président Yar’Adua a mis en place un Comité de réforme électorale (Electoral Reform Committee, ERC), chargé d’examiner l’histoire électorale du Nigeria ainsi que son cadre juridique et institutionnel relatif à la conduite des élections afin d’émettre des propositions de réforme. L’ERC a lancé une vaste consultation et reçu 1 466 notes. Son rapport, présenté en 2008, a été largement accepté comme le reflet de l’opinion des Nigérians sur la réforme électorale. Il a également exercé une profonde influence sur les réformes constitutionnelles et électorales qui ont précédé les élections de 2011. Dans son analyse approfondie des enjeux de la gouvernance électorale au Nigeria, l’ERC, observant que l’INEC était une institution surchargée, a proposé de créer trois autres institutions pour partager ses responsabilités. Il a également suggéré de déléguer les compétences du président en matière de nomination des membres de l’INEC au Conseil judiciaire national, en recommandant à cette fin un processus ouvert. Dans le cadre de son rapport, l’ERC soumettait cinq propositions de loi visant à réviser différents aspects du processus électoral nigérian, dont trois destinées à décharger et restructurer l’INEC.
Bien que le pouvoir exécutif n’ait pas entièrement adopté le contenu du rapport de l’ERC, le document a néanmoins donné le ton des délibérations nationales autour des réformes constitutionnelles et électorales qui ont précédé les élections de 2011. En 2010, l’exécutif a rédigé et présenté à l’Assemblée nationale une proposition de révision de la Constitution de 1999. Bien qu’il y ait dans tout processus de révision constitutionnelle différentes questions nationales pressantes à aborder, les affaires électorales ont été traitées en priorité. La première révision de la Constitution de 1999 a établi l’autonomie financière de l’INEC, avec le prélèvement de son budget et de la rémunération de son président et de ses membres sur le fonds consolidé. La neutralité et l’impartialité des membres des commissions ont également été inscrites dans les révisions, ainsi que le calendrier électoral, la compétence des tribunaux en matière de demandes d’invalidation, la composition des tribunaux compétents en matière de demande d’invalidation et les délais de décision dans ce domaine [7]. La deuxième proposition de révision constitutionnelle impliquait un réexamen des nouveaux calendriers d’organisation des élections nationales[8].
Structure institutionnelle
Le Nigeria repose sur un système de gouvernement fédéral à trois échelons, avec un Parlement bicaméral. Le premier échelon est le niveau fédéral, le deuxième est celui des États (le pays compte 36 États, auxquels s’ajoute le territoire de la capitale fédérale) et le troisième est composé de 774 collectivités locales. Chaque échelon de gouvernement possède une branche exécutive et une branche législative : les Chambres d’assemblée pour les États et les Conseils de collectivité locale au niveau local. Les élections au niveau de la fédération et des États sont organisées par l’INEC, tandis que les élections locales dépendent des SIEC. Le pays est divisé à des fins administratives en six régions géopolitiques qui jouent un rôle central dans la vie politique nigériane.
L’INEC a des bureaux dans les 36 États et dans la capitale ; elle est également présente dans les 774 collectivités locales de la fédération (dans des bureaux partagés avec les autorités locales ou dans des bureaux distincts). Bien que la commission soit une structure décentralisée, l’élaboration des politiques est centralisée au niveau national par le biais d’un système de comités. En revanche, la mise en œuvre des politiques est décentralisée. Le président de l’INEC est le directeur général au niveau national, un rôle exercé dans les États par les REC, avec le soutien d’un secrétaire administratif, chargé à titre permanent de diriger les services comptables et l’administration. Dans les collectivités locales, un responsable électoral sert de représentant de la commission.
L’INEC est composée d’un président, le commissaire principal aux élections, et de 12 membres, appelés commissaires électoraux nationaux. Elle compte des bureaux dans les 36 États et dans la capitale, qui sont dirigés par les REC, eux-mêmes nommés par le Président de la République avec l’aval du Sénat. Si les commissaires nationaux sont au nombre de deux par région géopolitique, un REC est nommé dans chaque État fédéré pour être envoyé dans les bureaux de l’INEC en dehors de son État d’origine. Lors de l’élection présidentielle, le président de la commission exerce les fonctions de directeur du scrutin, tandis que les REC assument ce rôle pour l’élection du gouverneur et de l’Assemblée des États. Les membres de la commission et les REC sont nommés pour un mandat renouvelable de cinq ans.
Il est important de noter qu’avant l’adoption de la loi électorale de 2006 et de la révision constitutionnelle de 2010, les rapports hiérarchiques entre la commission et les REC étaient imprécis, et que le cadre juridique ne fournissait aucune procédure de révocation. Cela posait des difficultés, car les REC ne rendaient pas compte à la commission, mais au Président qui les avait nommés9. Ce problème a été résolu pendant la réforme, les nouvelles dispositions définissant leur mandat et leur responsabilité devant la commission. La révision de la Constitution a également pris en compte la nécessité de définir les procédures de révocation des REC [10].
Le secrétaire de la commission dirige le secrétariat et l’administration. Avant la loi électorale de 2006, il était choisi par le chef de la fonction publique parmi les secrétaires permanents. Dans le cadre des réformes structurelles de l’INEC qui se sont déroulées avant les élections de 2007, le pouvoir de nommer le secrétaire a été transféré à la commission. En vertu de son statut d’organe exécutif fédéral, la commission a le statut d’une administration, et est à ce titre indépendante de la fonction publique fédérale. Elle est habilitée à nommer son personnel et à appliquer des sanctions disciplinaires à son encontre.
Les responsables administratifs de ses bureaux dans les États sont les secrétaires administratifs, qui exercent des fonctions de haut rang au sein de la commission. Dans les collectivités locales, les responsables électoraux travaillant à titre permanent pour les SIEC sont responsables du fonctionnement des bureaux de l’INEC et rendent compte aux REC.
L’INEC est la deuxième administration du pays en termes d’effectifs, juste derrière la police nigériane. En décembre 2013, elle comptait environ 14 000 employés à temps plein dans tout le pays[11]. La commission nomme également du personnel temporaire en période électorale : près de 300 000 personnes ont ainsi été recrutées pour les élections de 2011 [12]. L’importance du personnel permanent et temporaire suscite des inquiétudes concernant l’efficacité de son système administratif et la professionnalisation des employés. Il est important de noter que le personnel permanent de l’INEC est recruté selon le règlement de la fonction publique. En juin 2005, l’Institut électoral (Electoral Institute) a été créé dans le cadre des efforts de la commission visant à renforcer les capacités de son personnel et de professionnaliser l’administration électorale au Nigeria. L’institut, dont le siège est à Abuja, compte plusieurs centres d’apprentissages proposant des programmes diplômants et certifiants en administration électorale. Ces formations ont contribué à la création d’un vivier de professionnels nigérians de l’administration électorale, au sein duquel sont sélectionnés les employés temporaires en période électorale.
La structure administrative de l’INEC a été modifiée à plusieurs reprises depuis 1999 afin de gagner en efficacité, en fonction de la politique de la direction. Lors de sa création en 1999, la commission comptait huit services et trois unités [13]. Peu de temps après, l’équipe de direction a décidé de réorganiser la structure en six services, trois directions et trois unités [14]. Après les élections de 2003, elle a procédé à de nouvelles restructurations pour créer d’autres services et allonger la chaîne hiérarchique. Lors des changements à la direction de la commission en juillet 2010, celle-ci comptait 16 services et un Institut électoral doté de quatre services[15]. La restructuration la plus récente a eu lieu en avril 2013, sous l’égide de la nouvelle équipe de direction, entrée en fonctions en juin 2010. L’INEC compte à l’heure actuelle 20 services, auxquels s’ajoutent l’Institut électoral et ses trois services [16].
Pouvoirs et fonctions
En vertu de la Constitution de 1999, l’INEC a pour mission d’organiser les élections aux charges exécutives et législatives de la fédération et des États ; d’enregistrer, contrôler et réglementer les activités des partis politiques ; de contrôler le financement et les campagnes des partis ; de créer et tenir à jour un registre d’électeurs habilités à voter ; de délimiter les circonscriptions électorales en vue d’une représentation à l’Assemblée nationale correspondant au nombre de sièges prévus par la Constitution ; de déléguer ses pouvoirs aux REC ; et d’exécuter toute autre fonction qui lui serait confiée par la loi. La loi électorale y ajoute l’organisation de l’éducation des électeurs et l’engagement de poursuites en cas d’infractions aux responsabilités électorales de l’INEC. La commission est par ailleurs habilitée à recruter son personnel et à publier des directives et des règlements afin d’orienter la conduite des élections.
Indépendance
Le mode de nomination des membres de la commission continue de susciter des préoccupations à l’égard de son indépendance, de nombreuses voix estimant que les commissaires n’étaient peut-être pas tout à fait impartiaux envers l’autorité de désignation. La révision de la Constitution de 1999 a renforcé l’indépendance de la commission en garantissant son autonomie financière. Elle est financée par le fonds consolidé, ce qui lui évite d’être entravée dans ses opérations par les nombreux processus bureaucratiques de l’établissement du budget et du versement des fonds.
Au-delà de son indépendance financière, la Constitution garantit également la sécurité du mandat de la commission en prévoyant que ses membres et les REC seront relevés de leurs fonctions (en cas de faute professionnelle ou d’incapacité à exercer leurs fonctions) par le Président de la République avec l’aval d’une majorité des deux tiers du Sénat.
La révision constitutionnelle a également répondu aux inquiétudes soulevées par les critères de sélection précédents des membres de la commission. Auparavant, ces derniers devaient présenter les mêmes qualifications que les membres de la Chambre des représentants, ce qui pouvait être interprété dans le sens de l’appartenance à un parti politique. La révision a clarifié la question en précisant que les personnes nommées à la commission ne devaient pas être affiliées à un parti politique.
La loi électorale protège également la commission de toute influence inappropriée du pouvoir exécutif en imposant que les REC rendent compte à la commission et en habilitant cette dernière à nommer et à sanctionner son personnel et son secrétaire.
Rapports avec les partis politiques, les OSC, les médias et les autres administrations
L’organisation des élections au Nigeria est une tâche considérable, qui nécessite des efforts de la part de toutes les parties prenantes et administrations publiques. Compte tenu de la longue tradition de fraudes et de violences électorales du pays, les organismes de sécurité jouent un rôle important dans la conduite des élections. Depuis sa création, l’INEC travaille en étroite collaboration avec la police et les forces armées pour garantir la sécurité du processus électoral. Même si l’armée n’est pas déployée autour des bureaux de vote, elle intervient en sécurisant les frontières entre les États lors des élections. Les forces aériennes et navales apportent également leur soutien en distribuant le matériel électoral dans les régions difficiles d’accès.
Un comité consultatif interinstitutionnel pour la sécurité des élections (Inter-Agency Consultative Committee on Elections Security) a été créé pour coordonner les actions des différents organismes de sécurité participant à la sécurisation des élections de 2011. Ces mesures ont contribué à la réussite du scrutin et à la répression des violences postélectorales qui ont éclaté dans le nord du pays[17].
En période électorale, l’INEC met en place un mécanisme de dialogue lui permettant de rencontrer les partis politiques et les groupes de la société civile afin de les tenir informés des préparatifs de l’élection. Les relations entre la commission et les partis politiques n’étaient pas particulièrement cordiales, en raison de la méfiance importante qu’elle inspirait et du fait qu’elle n’était pas perçue comme indépendante. Les élections de 2011 se sont toutefois révélées différentes, la nouvelle direction de la commission ayant redoublé d’efforts pour améliorer la transparence de ses travaux. Cinquante-deux partis politiques ont signé un code de conduite avant les élections, et la commission a réaffirmé aux parties prenantes sa volonté d’assainir le processus électoral en engageant des poursuites contre les auteurs d’infractions, y compris au sein du personnel électoral [18] La commission actuelle jouit d’un niveau élevé de confiance, comme en témoigne l’acceptation des résultats des élections de 2011.
Le succès de ce scrutin peut être attribué à l’ouverture et à la transparence de la commission actuelle. Cette transparence est entrée en jeu lorsqu’il a été décidé de reporter les élections législatives d’une semaine alors que le vote avait commencé dans certains bureaux. Cette décision n’a pas entraîné d’actes de violence, car les parties prenantes avaient appris à faire confiance à la commission et étaient conscientes des difficultés logistiques impliquées. Un Conseil consultatif multipartite (Inter-Party Advisory Council) a également été créé pour améliorer le dialogue entre la commission et les partis politiques.
Les relations de la commission avec les médias constituent un autre aspect important de ses échanges. La responsabilité de la réglementation des médias incombe à l’Organisation de radiodiffusion du Nigeria (Broadcasting Organisation of Nigeria, BON). L’article 100 de la loi électorale de 2010 prévoit toutefois une réglementation de la couverture médiatique des candidats lors d’une élection. La BON et l’INEC travaillent donc de concert pour veiller à ce que les médias respectent les codes applicables à la radiodiffusion et aux élections.
La commission s’est également associée au Programme national de service civil des jeunes (National Youth Service Corps) pour recruter des jeunes en service civil comme personnel temporaire lors du processus électoral. Cette initiative a été une réussite en 2007 et en 2011.
Les organismes internationaux de donateurs et les groupes d’assistance technique jouent un rôle important dans la conduite des élections au Nigeria. L’INEC entretient donc depuis longtemps des relations avec ces groupes. Au fil des années, les groupes d’assistance technique tels que l’IFES et le PNUD ont participé au recrutement d’experts pour travailler au sein de la commission. Les organismes de donateurs aident également la commission en finançant certains aspects des élections nécessitant le recrutement d’une aide.
Financement
L’INEC est désormais financée directement par un compte de la fédération. Cela n’a pas toujours été le cas : avant la révision de la Constitution de 1999, elle était financée comme toutes les autres administrations, c’est-à-dire qu’elle devait soumettre son budget pour approbation à l’Assemblée nationale et passer par les processus bureaucratiques de versement des fonds. Lors des élections de 1999, de 2003 et de 2007, le versement des fonds en vue de l’organisation des élections a constitué un problème majeur, cause d’importants retards dans le processus électoral. L’inscription électorale a par exemple dû être reportée en 2003 et en 2007, car les fonds n’avaient pas été versés à temps.
En vertu des procédures actuelles, la commission est directement financée par le fonds consolidé. Elle peut donc préparer son budget pour accord, et celui-ci lui est ensuite versé directement sur le Fonds de l’INEC (Independent National Electoral Commission Fund), créé par les lois électorales de 2006 et 2010. La création du fonds a permis à la commission de gérer directement le versement de ses fonds.
Responsabilité
L’Assemblée nationale exerce des fonctions de supervision à l’égard de l’INEC concernant l’exécution de son mandat. Bien qu’il n’y ait aucune voie hiérarchique obligatoire entre la commission et les comités concernés de l’Assemblée nationale, elle leur rend des comptes lorsque cela lui est demandé. Dans le cadre de ses procédures de reddition de comptes, elle publie également des rapports d’activité réguliers destinés au public.
En termes de responsabilité financière, le budget de la commission est présenté aux comités compétents de l’Assemblée nationale. Elle doit également présenter un rapport au bureau de l’auditeur général en fin d’année [19]. Pour l’achat du matériel électoral, elle est tenue de respecter les exigences de procédure établies en passant par l’Unité de surveillance budgétaire et de renseignement sur les prix (Budget Monitoring and Price Intelligence Unit , BMPIU[20]).
Gestion de la réforme électorale
L’INEC a joué un rôle très actif dans les débats nationaux sur les réformes constitutionnelles et électorales. Il est important de mentionner que la proposition de loi électorale de 2004 a été rédigée par la commission avant d’être soumise à l’Assemblée nationale, puis adoptée sous le nom de loi électorale de 2006. Cette démarche a été critiquée, car elle ne respectait pas la procédure prescrite [21]. La commission réalise également des travaux d’examen postélectoral au cours desquels les points à réformer sont cernés.
Défis et opportunités
Le mandat et la stabilité de la commission posaient problème par le passé, aucun président de la commission n’ayant conduit plus d’une élection. Toutefois, le calendrier de la commission en charge des élections de 2011 a offert une occasion de continuité en permettant à l’INEC de conduire deux élections. Ce sera une première dans son histoire. Il est également important de noter que le renouvellement du mandat de certains commissaires nationaux, de même que la nomination de certains REC et commissaires nationaux, offrent également de meilleures chances de stabilité et de continuité des politiques.
Le nombre important d’employés de la commission peut être à la fois une opportunité et une contrainte. La commission est en mesure de déployer davantage de personnel permanent tout en recourant à du personnel temporaire pour la conduite des élections nationales. Cependant, le volume de son personnel peut être considéré comme une contrainte compte tenu du degré de supervision requis. En l’absence de structures administratives efficaces et modernisées, l’efficacité du personnel n’est pas garantie.
La création de l’Institut électoral et le soutien de partenaires techniques tels qu’IDEA international, le PNUD et l’IFES offrent la possibilité de professionnaliser la commission et de renforcer la capacité de son personnel, par l’intermédiaire, par exemple, des formations BRIDGE. La grande confiance dont bénéficie la commission actuelle lui donne également la possibilité de planifier les futures élections dans une atmosphère de confiance et de transparence.
Notes
[1]JINADU Adele, « Nigeria », dans FALL Ismaila M., HOUNKPE Mathias, JINADU Adele L. et KAMBELE Pascal (dir.), Election Management Bodies in West Africa [Les organismes de gestion électorale en Afrique de l’Ouest], OSIWA, 2011
[2] IBRAHIM Jibrin et GARUBA D., Governance and Institution-Building in Nigeria: A Study of the Independent National Electoral Commission [Gouvernance et renforcement des institutions au Nigeria : étude de la Commission électorale nationale indépendante], Abuja : Center for Democracy and Development, 2008, p. 27
[3] Article 197 de la Constitution de 1999
[4] Troisième programme (article 153) de la Constitution de 1999.
[5] Loi électorale (révisée) de 2010
[6] Jinadu 2011, p. 153.
[7] Loi constitutionnelle de 2010 (première modification)
[8] Loi constitutionnelle de 2010 (deuxième modification)
[9] Guobadia, Abel I.,Reflections of a Nigerian Electoral Umpire [Réflexions d’un arbitre électoral nigérian], (Benin City: Mindex Publishing Co, 2009).
[10] L’article 7 de la loi électorale de 2006 et l’article 6 de la loi électorale de 2010 définissent le mandat des REC et la voie hiérarchique entre la commission et ces derniers.
[11] Entretiens avec les commissaires et le personnel de haut rang de la commission, Abuja, 1er au 16 août 2010 et 28 juin 2014
[12] Jega, Attahiru, Improving Elections in Nigeria: Lessons from 2011 and Looking to 2015 [Améliorer les élections nigérianes : leçons de 2011 et perspectives pour 2015],(Londres: Chatham House, 2012).
[13]COMMISSION ELECTORALE NATIONALE INDEPENDANTE [INEC], Report of Activities, August 1998–December 1999 [Rapport d’activité, août 1998–décembre 1999], Abuja : INEC, 1999
[14] COMMISSION ELECTORALE NATIONALE INDEPENDANTE [INEC], Report of Activities 2000–2003 [Rapport d’activité 2000–2003], Abuja : INEC, 2003, p. 35-39
[15] Entretiens avec les commissaires et le personnel de haut rang
[16] Entretien avec le personnel de haut rang de la commission et de l’Institut électoral. Voir la liste des directions http://www.inecnigeria.org/wp-content/uploads/2013/09/INDEPENDENT-NATIONAL-ELECTORAL-COMMISSION-LIST-OF-DIRECTORS11.pdf
[17] Jega 2012.
[18] International Crisis Group [ICG], Lessons from Nigeria’s 2011 Elections, [Leçons tirées des élections de 2011 au Nigeria], Policy Brief n° 81, ICG, 2011, p. 2 ; Jega, p. 6
[19] Articles 3 à 5 de la loi électorale révisée de 2010
[20] Jinadu 2011, p. 134.
[21] La proposition de loi électorale de 2004 n’était proposée ni à titre privé ni par un membre de l’exécutif.
Bibliographie
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Loi de révision de la Constitution de la République fédérale du Nigeria (deuxième modification), 2010
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