Les OGE doivent veiller à ce que la composition de la société en termes de genre se reflète dans la conduite de leurs activités internes et externes. Certains éléments de cette responsabilité peuvent être définis par les lois électorales ou relatives à l’égalité des sexes. D’autres peuvent être adoptés volontairement par les OGE. Dans la majeure partie du monde, la parité vise les femmes, car elles représentent généralement moins de la moitié des participants aux élections, alors qu’elles constituent la moitié de la population. Dans de nombreux pays d’Asie, la parité tient également compte du troisième sexe.
La parité hommes-femmes au sein du pouvoir législatif ou entre les candidats est inscrite dans le droit électoral de nombreux pays. Les OGE peuvent jouer un rôle, par exemple en veillant à ce que les partis politiques présentent au moins le nombre de candidates requis par la loi et en refusant les listes de candidats non conformes (p. ex. Argentine, Belgique, Costa Rica, Guyana, Iraq, Mexique, Mongolie, Palestine, Paraguay, Pologne). En 2013, l’Albanie a condamné des partis politiques, y compris les principaux partis au gouvernement et de l’opposition, à des amendes pour manquement aux obligations de quota instaurées. D’autres éléments peuvent faire l’objet d’une campagne sociale menée par les OGE : en 2004, l’OGE indonésien a demandé aux partis de revoir leurs listes de candidats lorsqu’elles ne respectaient pas le quota recommandé (mais non obligatoire) de 30 % de femmes. Il est recommandé aux OGE de promouvoir l’égalité en plaidant pour l’inclusion de mesures favorisant la parité hommes-femmes dans la législation électorale ainsi que dans leurs propres règlements ou codes de conduite.
La définition et la mise en œuvre de sanctions sont la méthode la plus importante pour garantir l’application effective des quotas. Lorsque ces derniers sont fixés par la loi, l’existence et l’application diligente de sanctions proportionnées augmentent sensiblement la probabilité du respect des quotas par les partis. Les sanctions sont habituellement prévues par la loi électorale, et les OGE sont chargés de contrôler la conformité. La majorité des pays recourant à des quotas légaux de candidats ont établi des sanctions en cas de manquement ; les OGE rejettent les listes (ou les parties de liste) qui contreviennent aux règles établies. Certains pays préfèrent exercer des sanctions financières ; outre la détection des manquements, les OGE ont alors pour tâche supplémentaire d’imposer les sanctions financières. La détermination des OGE à surveiller consciencieusement ces processus est primordiale pour assurer le respect des obligations internationales et de l’État de droit dans ce domaine.
Lorsque les règles de quota hommes-femmes prévues par les lois électorales sont ambiguës ou se prêtent à diverses interprétations et exploitations de la part des acteurs politiques, les décisions des tribunaux électoraux se sont révélées efficaces pour renforcer leur application. Au Costa Rica, un quota de 40 % a été mis en place pour les élections de 1998, mais les autorités électorales n’ont pas refusé les listes qui ne respectaient pas ce principe. Par conséquent, l’année suivante, une décision du Tribunal suprême électoral (Tribunal Supremo de Elecciones) a précisé la méthode d’application de la loi sur les quotas : les listes devaient être composées d’au moins 40 % de candidats des deux sexes, et les femmes devaient obtenir 40 % des sièges éligibles, c’est-à-dire des sièges que le parti avait remportés dans la circonscription concernée lors de l’élection précédente. Au Mexique, en 2011, la Cour fédérale électorale (Tribunal Electoral del Poder Judicial de la Federación) a confirmé en appel le recours de plusieurs femmes qui contestaient la pratique consistant à ignorer le quota hommes-femmes de 40 % sur les listes de candidats lorsque les partis sélectionnaient leurs candidats par le biais d’élections primaires. La Cour a jugé que tous les partis devaient respecter le principe des quotas, et précisé que, le cas échéant, les candidates ne pouvaient être remplacées que par des femmes.
Il est tout aussi important de veiller à ce que les femmes soient pleinement représentées à tous les niveaux du secrétariat de l’OGE et de son personnel électoral temporaire (responsables et personnels des bureaux de vote). Certaines lois électorales ont établi un quota hommes-femmes pour la composition du comité et du personnel (Timor-Oriental) ou des employés (Kenya). Au Népal, des directives parlementaires imposent que la moitié du personnel électoral en contact avec les électeurs soit de sexe féminin, et que chaque bureau de vote engage une employée pour prendre les empreintes des votantes et une autre pour gérer la file d’attente des femmes. En Guinée, le processus de sélection des membres de l’OGE prévoit la prise en compte du principe de parité. En Bosnie-Herzégovine, les règles relatives à la composition de la commission électorale municipale et des comités des bureaux de vote exigent que chaque sexe soit représenté par au moins 40 % des membres.
Les engagements à accroître la participation des femmes à des postes de direction au sein des OGE et à parvenir à la parité hommes-femmes à tous les niveaux de l’administration électorale doivent être mis en œuvre de bonne foi, de manière à ce que ces efforts respectent les principes prévus et évitent de reléguer les femmes à des postes subalternes dans l’administration. Par exemple, lors des élections de 2012 en Ukraine, les femmes représentaient 72 % du personnel au sein des commissions électorales de circonscription, mais elles n’étaient que quatre sur les 15 membres (26 %) de la Commission électorale centrale (CEC). Lors des élections législatives en Géorgie la même année, les femmes représentaient les deux tiers des membres des commissions électorales de circonscription et environ la moitié des commissions électorales de district, mais une seule femme siégeait à la CEC.
En veillant à ce que la parité hommes-femmes soit respectée au sein de leur personnel et dans leurs activités, que cela soit exigé ou non par la législation électorale ou la politique gouvernementale, les OGE gagneront en crédibilité et pourront pleinement utiliser les ressources disponibles pour leurs membres, leur personnel professionnel ou de soutien, leurs consultants et leurs employés permanents et temporaires.
Adopter une politique interne d’égalité des sexes, procéder à une cartographie ou à un audit de l’ensemble de leurs activités à la lumière de ce principe, suivre une politique de prise en compte de la parité hommes-femmes et désigner un responsable chargé de contrôler le respect de ces principes sont autant de moyens pour les OGE de garantir que les femmes participeront pleinement à tous les aspects d’une élection. Les OGE doivent donner l’exemple en matière d’égalité des sexes dans toutes leurs activités.
Il est essentiel de créer à tous les échelons des OGE un environnement de travail professionnel appliquant la tolérance zéro à l’égard de la discrimination ou du harcèlement sexistes contre n’importe quel membre de l’institution, qu’il s’agisse d’un employé permanent ou temporaire. Cela permet de faire progresser l’objectif d’une véritable égalité des sexes au sein des OGE. Les cas de harcèlement ou d’exploitation sexiste du personnel féminin par leurs supérieurs sont rarement signalés ou consignés, ce qui empêche l’investigation et l’élimination de ces pratiques. Dans ce contexte, les OGE doivent s’efforcer de réviser et de réformer leurs procédures de surveillance interne, instaurer des politiques efficaces de non-discrimination et de lutte contre le harcèlement, encourager le signalement des incidents et mener des enquêtes approfondies sur ces derniers afin d’infliger à leurs auteurs des sanctions appropriées.
Le recrutement et l’organisation du processus d’inscription et des bureaux de vote peuvent avoir un impact majeur sur la capacité des femmes à voter. Dans certains pays, elles sont concrètement privées de leur droit de vote lorsque leur époux ou leur père vote à leur place. S’il s’agit d’une pratique courante, les OGE s’emploient à garantir que les femmes puissent voter elles-mêmes, à bulletin secret. Dans l’ancienne République yougoslave de Macédoine, l’OGE a adopté une stratégie visant à prévenir ces pratiques et imposé une directive ferme à l’ensemble de ses employés. Par ailleurs, les femmes enceintes ou accompagnées de jeunes enfants sont souvent autorisées à passer en tête des files d’attente dans les bureaux de vote en Afghanistan, au Cameroun, au Népal, en Ouganda et en Tanzanie. En Ouzbékistan, une pièce à part est prévue pour les mères dans tous les bureaux de vote.
Lorsque les femmes sont voilées, des employées doivent être présentes dans le bureau de vote et pour l’inscription électorale si une photo est requise dans le cadre du processus. Dans ces pays, les hommes et les femmes votent dans des bureaux de vote distincts (Afghanistan, Liban, Pakistan, Palestine…). Cette pratique est également répandue en Amérique du Sud.
Il est important d’intégrer les questions relatives à l’égalité des sexes dans le contenu des formations et des programmes d’éducation et d’information des électeurs. Quand les images d’une élection montrent uniquement des hommes parmi les employés du bureau de vote, le personnel de sécurité, les candidats et les électeurs, les femmes peuvent avoir l’impression que leur participation n’est pas la bienvenue. En réfléchissant mûrement à la représentation des élections sur l’ensemble des supports, on peut encourager la participation des femmes à la vie politique, renforcer l’efficacité de la communication des OGE et répondre aux besoins de toute la société. Des affiches de sensibilisation des électeurs montrant des femmes parmi le personnel des bureaux de vote ou en train de voter ont été utilisées au Ghana, au Kenya et au Kosovo.
Si l’on sait que les femmes constituent moins de la moitié des listes électorales ou sont moins enclines à voter, une éducation ciblée peut s’avérer efficace. De nombreux OGE aideront les OSC compétentes pour ce genre d’action. Ces dernières sont également plus à même de mener des initiatives encourageant les femmes à se présenter à une élection. En Tanzanie, lors des élections de 2010, une brochure a été distribuée pour encourager les femmes à se porter candidates et à voter, et pour leur rappeler qu’elles avaient le droit de voter elles-mêmes pour le candidat de leur choix.