L’appui des donateurs peut contribuer à améliorer la qualité d’une élection et, dans certains cas, s’avérer indispensable à sa tenue. Mais pour de nombreux OGE, il a des conséquences sur la conduite pérenne d’élections libres, équitables et crédibles (voir par exemple les études de cas sur l’Afghanistan page 61, la Bosnie-Herzégovine page 328, le Kenya page 273 et le Nigeria page 128).
Si l’appui des donateurs peut prendre la forme de contributions budgétaires et d’assistance technique, y compris dans le domaine des nouvelles technologies, certains d’entre eux évitent de financer les budgets récurrents des OGE, c’est-à-dire les coûts de base du personnel, la location des locaux et du mobilier, et d’autres postes budgétaires non techniques, tels que les véhicules et le carburant.
Les donateurs accordent parfois une aide conditionnée, qui contraint les OGE bénéficiaires à acheter des biens et des services à des fournisseurs du pays des bailleurs de fonds. Les prix pratiqués par ces fournisseurs étrangers sont souvent beaucoup plus élevés que ceux des fournisseurs locaux, ce qui accroît le montant global des coûts électoraux.
Dans certaines situations de post-conflit, comme en Bosnie-Herzégovine, en Haïti, au Liberia, en République démocratique du Congo et au Timor-Oriental, les donateurs ont assumé la quasi-totalité du coût des élections de transition. Les élections suivantes n’obtenant pas un financement équivalent, la qualité des services électoraux a baissé, ce qui peut générer du mécontentement à l’égard des élections. De toute évidence, cette situation soulève le problème de la création de structures transitionnelles auxquelles les autorités locales peuvent s’intégrer par la suite, ainsi que celui du développement du savoir-faire nécessaire pour générer les ressources financières qui permettront de mener les élections suivantes. Dans d’autres contextes post-conflit, l’assistance extérieure peut s’avérer vitale bien qu’il ne soit pas souhaitable d’un point de vue politique ou économique que des autorités étrangères s’approprient l’organisation et la conduite des élections de transition : l’Afghanistan, l’Iraq et la Libye pourraient relever de cette catégorie. Les États et les OGE défaillants peuvent eux aussi requérir une aide extérieure considérable de divers donateurs. L’ONU joue alors parfois le rôle de coordinateur, comme au Liberia en 2004-2005.
Les donateurs doivent veiller à ce que l’aide électorale qu’ils apportent aux OGE soit efficace et vise la pérennité. Les principaux points dont ils doivent tenir compte en la matière sont les suivants :
- coordination de l’aide avec l’OGE et les autres donateurs ;
- collaboration avec le gouvernement bénéficiaire, par exemple dans le cadre d’une coopération avec plusieurs organisations, afin de garantir que la prestation de l’assistance électorale tient compte des priorités du gouvernement en matière de développement ;
- planification de la mise en œuvre de l’aide afin de l’aligner sur les besoins de l’OGE ;
- adéquation des systèmes/solutions envisagés à l’environnement de l’OGE ;
- inclusion du renforcement des capacités de l’OGE et de son personnel ;
- participation du personnel de l’OGE à la gestion des programmes financés par les donateurs ;
- coûts à long terme des systèmes/équipements fournis.
Le projet CORE rapporte que la dépendance du Cambodge envers les donateurs était inférieure à 50 % lors des élections de 2003. De la même manière, le Timor-Oriental a réussi, depuis qu’il a recouvré son indépendance en 2002, à couvrir les coûts électoraux avec son budget annuel au lieu de compter sur un apport financier important des donateurs. Bien que le transfert de compétences au personnel électoral local pendant la période électorale de transition soit un objectif souhaitable, il est rarement atteint de manière satisfaisante au niveau des dirigeants, même s’il génère souvent du personnel d’encadrement des agents électoraux bien formé. Par conséquent, la nécessité de développer les capacités sera probablement toujours d’actualité lors des élections post-transitionnelles. Après un conflit, l’aide extérieure initiale joue un rôle essentiel dans la restauration de la démocratie et de la stabilité, mais le processus électoral et la démocratie risquent d’essuyer des revers si les donateurs cessent à moyen terme d’aider les OGE à développer leurs capacités.
Les nouvelles technologies peuvent contribuer à améliorer la qualité des processus électoraux, notamment concernant le traitement rapide de gros volumes de données comme dans le cas du découpage électoral, de l’inscription des électeurs, du vote et du dépouillement. Un nombre croissant d’OGE adopte des solutions électroniques d’inscription des électeurs comportant souvent des aspects biométriques. Même certains OGE autonomes, comme celui du Costa Rica, ont besoin d’une aide extérieure pour financer l’introduction de nouvelles technologies. Mais ces dernières peuvent aussi alourdir les coûts à long terme (entretien du matériel ou frais de licences des logiciels, par exemple). Lorsque les donateurs sont à l’origine de l’introduction des solutions technologiques, des exigences politiques en faveur d’une dépendance accrue envers les technologies fournies peuvent apparaître, comme cela a été le cas pour l’inscription des électeurs en Haïti. Les avis sont donc partagés quant à la pérennité d’un financement de l’informatisation du scrutin, d’Internet, des services de télécommunication, et d’autres technologies électorales telles que la numérisation et la biométrie pour l’inscription des électeurs. Les OGE et les donateurs doivent tenir compte des points suivants :
- rapport coûts/avantages financiers, sociaux et politiques du recours à l’aide des donateurs pour le financement des nouvelles technologies comparé à son utilisation pour d’autres programmes d’aide électorale ;
- durée de vie de la technologie : remplacement nécessaire de l’équipement moyennant un coût aussi élevé lors de la prochaine consultation électorale ou utilisation pendant plusieurs années et pour de futures élections ;
- capacités locales en matière d’entretien de la technologie. Sans capacité technique ou financière pour assurer l’entretien du matériel ou des logiciels fournis par les donateurs internationaux ou sans transfert de compétences permettant d’assurer leur fonctionnement au niveau local après le départ des consultants internationaux, la technologie fournie par d’autres pays peut s’avérer une solution à usage unique extrêmement onéreuse ;
- possibilités de mise à disposition de la technologie à d’autres organisations gouvernementales ou sociétales après la consultation électorale ou de prêt à d’autres pays pour leurs élections ;
- formation du personnel électoral temporaire à l’utilisation de cette technologie d’origine étrangère, qui doit être transférable à leurs environnements de travail postélectoraux.