Jeong-Gon Kim
Le système électoral démocratique a été introduit en Corée pour l’élection de l’Assemblée nationale constituante en 1948. Il offre à tous les électeurs habilités à voter la même possibilité de voter directement et à bulletin secret. Lors de la création de l’État coréen, la Commission électorale faisait partie du pouvoir exécutif, et son impartialité était difficile à garantir. Par conséquent, elle a été transformée en organe constitutionnel indépendant par la cinquième révision constitutionnelle de 1963, lors de la Troisième République de Corée.
Contexte
Au départ, la Commission électorale se consacrait à la gestion équitable des élections et des référendums, conformément aux lois électorales, ainsi qu’à la promotion de la souveraineté des électeurs. En 1973, ses fonctions ont été étendues et elle est passée du rang de bureau à celui de ministère adjoint.
L’introduction des élections directes pour la 13e élection présidentielle en 1987 et les progrès de la démocratie ont permis d’augmenter sensiblement la liberté des activités électorales. Cependant, les activités de campagne illégales se sont elles aussi multipliées. Pour garantir des élections libres, équitables et crédibles, la Commission électorale a appliqué avec rigueur la législation électorale, ce qui lui a valu le soutien de l’opinion publique. Son pouvoir de contrôle sur la licéité des activités de campagne a été renforcé et confirmé par écrit en 1992. La Commission a continué de faire preuve de rigueur dans l’application de la loi électorale et a consolidé ses pouvoirs d’enquête. En 1987, une révision constitutionnelle lui a octroyé le droit de publier un règlement interne. La loi sur la commission électorale a été révisée en 1992 pour que la Commission puisse présenter une proposition de loi à l’Assemblée nationale lorsqu’il s’avère nécessaire d’adopter une nouvelle loi ou de modifier une loi existante concernant les élections. La loi révisée a également élevé la commission au rang des ministères, entraînant sa restructuration.
En 1996, la Commission électorale nationale (CEN), l’échelon supérieur de la Commission électorale, a créé l’Institut coréen d’éducation civique pour la démocratie (Korean Civic Education Institute for Democracy), qui propose des programmes d’éducation civique pour les partis politiques, les candidats et le grand public. La Commission électorale gère et supervise l’élection des membres du Comité d’éducation et celle du superintendant de l’éducation.
En 2004, l’élection de la 17e Assemblée nationale a marqué un tournant en matière d’élections libres, équitables et crédibles en abolissant les onéreuses branches locales des partis ainsi que certaines méthodes de campagne. Afin de prévenir les activités de campagne illicites, des récompenses en espèces étaient offertes à tous ceux qui signaleraient des violations de la loi électorale. Des amendes administratives ont sanctionné ceux qui acceptaient des contributions illégales (argent, nourriture, etc.) de la part des candidats. Ces efforts ont permis de garantir des élections libres, équitables et crédibles.
La CEN a également mis en place une Commission pour la diffusion des débats électoraux (EBDC) et une Commission de délibération sur la diffusion sur Internet d’informations électorales (IENDC). L’EBDC encourage les discussions et débats actifs entre partis politiques, tandis que l’IENDC surveille les médias sur Internet pour vérifier qu’ils rendent fidèlement compte des faits. L’autorité de la Commission électorale a été renforcée pour qu’elle puisse enquêter sur l’utilisation illicite des financements politiques et demander l’inspection et la soumission des documents de communication. Elle a également mis en place une unité de cybersurveillance des élections pour les violations de la loi électorale.
Depuis un référendum qu’elle a géré en 2004, elle prend également en charge les élections des directeurs des coopératives locales d’agriculture, d’élevage, de pêche et de foresterie, ainsi que celles des présidents des universités nationales depuis 2005. En 2006, la Commission s’est saisie de la gestion des votes de révocation des habitants concernant les responsables des collectivités locales et les membres des conseils.
Suite à la révision, en 2010, de la loi sur l’entretien et l’amélioration des zones urbaines et des conditions de logement des résidents, les responsabilités de la Commission électorale intègrent désormais la gestion d’élections à des charges non publiques, notamment pour les administrateurs d’organisations liées au logement.
La Commission électorale a étendu son rôle en matière de coopération internationale en rejoignant l’Association des autorités électorales asiatiques (Association of Asian Election Authorities, AAEA) en 2008, dont elle est devenue présidente en 2011. Elle a également signé un protocole d’accord avec les organes de gestion électorale d’autres pays pour nouer des relations de coopération dans le domaine des élections. La Commission organise par ailleurs des séminaires et des actions de formation pour les agents électoraux étrangers en vue d’un partage de points de vue et d’expériences de pratiques électorales différentes.
Grâce à la révision de la loi sur l’élection des agents publics en 2009, les citoyens coréens en visite ou résidant à l’étranger (y compris les titulaires de visas de résidence permanente) peuvent désormais voter aux élections présidentielles et législatives.
Cadre législatif
La CEN a été créée par la loi sur la commission électorale de 1992, conformément à l’alinéa 1 de l’article 114 de la Constitution nationale. Il s’agit d’un organe constitutionnel indépendant, œuvrant de concert avec l’Assemblée nationale, le gouvernement, les tribunaux et la Cour constitutionnelle de Corée, ayant vocation à assurer la gestion d’élections équitables et de référendums nationaux, et à prendre en charge les affaires administratives relatives aux partis politiques et aux financements politiques. La loi sur la commission électorale définit les règles de création et les fonctions des commissions électorales à chaque échelon, les procédures de nomination et les qualifications requises des commissaires électoraux, ainsi que les pouvoirs et les rôles du président et du commissaire à temps plein.
Après son auto-évaluation suite à l’élection illégale du 15 mars 1960, la CEN est devenue un organe constitutionnel avec l’entrée en vigueur de la cinquième révision constitutionnelle de 1963. Le mandat et le statut de chaque commissaire électoral sont strictement garantis, conformément à la Constitution et à la loi, pour leur permettre d’exercer leurs fonctions équitablement, sans ingérence extérieure.
Structure institutionnelle et professionnalisme
La Commission électorale coréenne est un organisme de gestion électorale doté d’organes nationaux permanents. Il s’agit d’une structure à quatre niveaux, composée de la CEN au sommet, puis des commissions électorales (CE) de province (do) et de ville spéciale ou métropolitaine (si), des CE d’arrondissement (gu), de ville (si) et de district (gun), et enfin des CE de commune et de quartier (eup, myeon et dong). Des comités de vote à l’étranger sont mis en place dans les missions coréennes à l’étranger pour les élections présidentielles et législatives. On compte actuellement 16 CE de si/do, 251 CE de gu/si/gun et 3 470 CE d’eup/myeon/dong.
La CEN se compose de neuf commissaires, parmi lesquels figurent un président et un commissaire à temps plein. Le président, un magistrat de la Cour suprême en exercice, ne siégeant pas à plein temps, un commissaire dont le rang équivaut à celui d’un ministre exerce donc à temps plein pour l’aider et superviser le secrétariat.
Le secrétariat, qui compte un secrétaire général ayant rang de ministre et un secrétaire général adjoint ayant rang de ministre adjoint, est composé de deux antennes, d’un bureau, de six départements et de 27 divisions, en plus de l’Institut coréen d’éducation civique pour la démocratie (Korean Civic Education Institute for Democracy), chargé de l’éducation démocratique, civique et politique. L’IENDC et l’EBDC sont subordonnées à la CEN. Les 16 CE de si/do disposent d’un commissaire à temps plein choisi parmi les fonctionnaires de haut rang, de commissaires à temps partiel, d’un secrétariat et de l’EBDC. Le secrétariat est administré par un directeur général et composé de quatre divisions. Les 251 CE de gu/si/gun sont membres de la commission et disposent d’un secrétariat ; leurs membres n’exercent pas leurs fonctions à plein temps.
À l’exception du commissaire à temps plein de la CEN, les commissaires électoraux n’exercent pas à plein temps. Par conséquent, chaque commission électorale, quel que soit son niveau, dispose d’un secrétariat chargé de traiter les affaires électorales. Tous les employés des secrétariats sont des fonctionnaires qui ont réussi l’examen d’entrée dans la fonction publique. Le commissaire à temps plein de la CEN, le directeur du secrétariat et le secrétaire général sont des fonctionnaires ayant un rang équivalent à celui de ministre. Si les commissaires sont limités à un mandat de six ans à temps partiel, les fonctionnaires travaillant au secrétariat possèdent une expertise et de nombreuses années d’expérience dans la gestion électorale, ce qui leur confère une certaine indépendance par rapport aux commissaires sur le plan de leurs fonctions. En outre, à l’exception des affaires requérant une décision de la commission (règles et règlements relatifs aux fonctions de la commission électorale, règles de délégation et d’arbitrage, enregistrement des candidats, annonce des résultats électoraux, décision des vainqueurs, révision et adoption des règles, et modification de tous ces éléments), les pouvoirs et fonctions des CE sont délégués à leur secrétariat, qui peut en assumer les responsabilités en toute autonomie et indépendance.
L’autonomie des secrétariats est essentielle pour qu’ils puissent exercer leurs fonctions de manière impartiale, et permet d’assurer leur indépendance des pouvoirs législatif, judiciaire ou exécutif, mais aussi des partis et factions politiques.
Pouvoirs et fonctions
La CEN peut publier des règlements relatifs à la gestion des élections, des référendums, des affaires administratives concernant les partis politiques (se limitant aux actes relatifs à la gestion électorale) et de la discipline interne, sous réserve que ces règlements soient conformes à la loi électorale (article 114, alinéa 6, de la Constitution).
Outre la garantie de l’égalité des chances des partis et des candidats et la conformité aux processus électoraux, les CE sont engagées dans des activités de prévention qui incitent la population à respecter les lois électorales. Elles surveillent et contrôlent également avec rigueur les activités empêchant la tenue d’élections équitables.
Par ailleurs, des programmes d’éducation démocratique, civique et politique sont proposés pour encourager les électeurs à participer au processus électoral, les aider à exercer leur droit de vote et leur permettre de concrétiser la démocratie dans leur vie quotidienne.
Les lois sur l’élection des agents publics, sur les partis politiques et sur les financements politiques ont fait l’objet de fréquentes modifications et révisions en fonction des intérêts et compromis politiques, et des politiques en vigueur. La CEN soumet des propositions de loi relatives aux lois ou révisions qui portent atteinte aux intérêts des partis politiques représentés à l’Assemblée nationale après un examen minutieux des tendances de l’opinion publique.
Financement
Lors de l’élaboration des budgets d’organes indépendants tels que la CEN, l’Assemblée nationale, la Cour suprême et la Cour constitutionnelle, conformément à l’article 40 de la loi de finances nationale, l’autorité financière doit solliciter l’avis de leurs responsables et respecter autant que faire se peut leur opinion.
Lors de l’élaboration des budgets, les autorités financières ont tendance à limiter les budgets aux seules dépenses essentielles. Toutefois, les dépenses prévues pour l’élection d’agents publics font rarement l’objet d’ajustements excessifs, car elles servent habituellement à l’exécution des travaux de procédure et d’administration définis par la loi. De même, les discussions et la coordination de l’autorité financière et de la CEN se déroulant pendant les délibérations, les dépenses nécessaires à l’organisation d’élections équitables sont généralement intégrées dans le budget sans être limitées.
L’autorité financière soumet une proposition de budget à l’Assemblée nationale après consultation de la CEN. Cette dernière soumet cette proposition au vote et rend sa décision après délibération (y compris sur l’augmentation/la réduction éventuelle du budget). L’autorité financière et l’Assemblée nationale ne sont pas autorisées à réduire le budget final.
Rapports avec d’autres institutions et organisations
Conformément à l’article 115 de la Constitution et à l’article 5 de la loi sur l’élection des agents publics, les CE de tous les niveaux peuvent demander l’aide des administrations compétentes (gouvernement, collectivités locales et organismes publics) en matière de gestion électorale : aide en personnel ou en équipement, promotion des élections, répression des infractions électorales, etc. Les administrations sollicitées doivent traiter leur demande en priorité.
Gestion de la réforme électorale
En vertu de l’alinéa 2 de l’article 17 de la loi sur la commission électorale, la CEN a progressivement contribué à l’amélioration de la législation afin de garantir des élections publiques pratiques et équitables, d’améliorer le système électoral et de remédier aux problèmes existants en présentant des propositions relatives à la loi sur l’élection des agents publics.
La CEN a soumis une proposition de révision de cette dernière à l’Assemblée nationale en 2008, à la suite de quoi la loi a effectivement été révisée. L’objectif était de promouvoir des élections libres en garantissant les droits des électeurs à l’étranger et en élargissant les campagnes électorales sur Internet et les campagnes électorales préliminaires des candidats. La proposition de révision comportait également la création et l’entrée en service de l’EBDC et durcissait les règlements relatifs aux campagnes négatives, notamment la diffamation et les informations mensongères.
En 2009, la CEN a proposé une autre révision de la loi sur l’élection des agents publics à l’Assemblée nationale. Elle visait à améliorer la liberté de la campagne électorale en assouplissant les règlements relatifs aux activités des partis politiques et des campagnes des candidats.
En 2011, la Cour constitutionnelle a jugé que l’interdiction des campagnes électorales sur Internet était anticonstitutionnelle. En 2012, la CEN a décidé d’autoriser l’utilisation des services de réseaux sociaux pour les campagnes électorales à titre permanent, ce dont l’Assemblée nationale a tenu compte lors de sa révision de la loi sur l’élection des agents publics. L’autorisation de mener campagne sur Internet tout au long de l’année (à l’exception du jour du scrutin) a étendu la liberté d’expression politique des électeurs. En vertu de cette nouvelle directive, les candidats et leurs partisans peuvent organiser des activités de campagne sur des sites Internet, des blogs et des sites de réseaux sociaux, et via les messageries électroniques et mobiles.