De nombreux pays ont opté pour un OGE multipartite, en particulier ceux qui ont connu une transition difficile entre un régime autoritaire et une démocratie multipartite. Dans ces pays, les fonctionnaires ont souvent été fortement discrédités en tant que décideurs électoraux, puisqu’ils servaient auparavant le parti ou le régime militaire autoritaire au pouvoir. La lutte contre l’autoritarisme peut avoir polarisé la société au point qu’il soit difficile de trouver des personnalités publiques considérées par le plus grand nombre comme impartiales pour travailler dans un OGE lors d’une élection transitoire. De nombreux pays d’Europe centrale et de l’Est ont opté pour des OGE multipartites durant leur transition.
Les OGE multipartites se composent de représentants des partis politiques. Le cadre juridique peut autoriser tous les partis politiques reconnus ou enregistrés qui se présentent à une élection à être représentés sur un pied d’égalité au sein de l’OGE (comme à Guam). Un seuil peut également restreindre la représentation, par exemple aux partis représentés à l’assemblée législative ou ayant un nombre de parlementaires supérieur à une proportion spécifiée. Sur les 20 membres nommés par les partis politiques en Guinée, dix sont désignés par le parti présidentiel et les autres par les partis de l’opposition. En Albanie, les membres affiliés à des partis reflètent la répartition des sièges au Parlement. Au Venezuela, au milieu des années 1990, les grands partis disposaient chacun de leur propre représentant, tandis que les petits partis, de gauche comme de droite, étaient représentés collectivement.
La nomination en fonction des partis politiques implique souvent que les membres de l’OGE servent de représentants ou agents du parti qui les a désignés et que, tout en gérant les processus électoraux de manière impartiale, ils cherchent à protéger les intérêts de leurs partis respectifs. Cependant, bien que chaque membre soit considéré comme partisan, chacun veille aussi à ce que les autres ne bénéficient pas d’un avantage déloyal – de sorte que l’OGE peut tout de même être perçu, de façon crédible, comme un organe impartial. Les membres issus de partis politiques occupent souvent leur charge pour une durée déterminée et ne peuvent être démis de leurs fonctions, sauf en cas de manquement à leurs devoirs ou suite à leur retrait par l’autorité qui les a désignés. Toutefois, un remplacement fréquent des représentants par les partis peut perturber le travail de l’OGE.
En Guinée et au Mozambique, les membres de l’OGE désignés par les partis politiques sont des personnalités éminentes qui doivent respecter des normes strictes d’impartialité et de professionnalisme et qui n’agissent donc pas en tant que représentants d’un parti politique.
De nombreux analystes électoraux estiment que la présence de représentants de partis politiques au sein d’un OGE favorise le consensus parmi les acteurs de la compétition électorale et contribue à accroître la transparence, ce qui renforce la confiance dans le processus électoral. Les électeurs peuvent être plus enclins à participer aux élections si les dirigeants de partis politiques jouent un rôle actif dans le processus électoral, en particulier par le biais d’une représentation au sein de l’OGE.
Les OGE multipartites contribuent à promouvoir la confiance dans les processus électoraux aux premières étapes des transitions démocratiques. Leur dépolitisation sera peut-être plus adaptée à mesure qu’augmente la confiance dans le processus électoral.
Cependant, la composition multipartite d’un OGE peut mettre en péril ou entraver la prise de décision, en particulier dans les situations où les intérêts majeurs des partis politiques sont en jeu. La présence de personnalités politiques au sein d’un OGE peut également compromettre la confidentialité dans des domaines tels que la sécurité du matériel de scrutin. Les systèmes multipartites ont aussi tendance à engendrer le mécontentement, notamment chez les partis minoritaires qui en seraient exclus, soit parce qu’ils ne sont pas représentés à l’assemblée législative, soit parce qu’ils n’ont pas participé à la négociation ayant conduit à la désignation initiale des membres de l’OGE.