Un certain nombre de dispositifs automatisés sont présentés comme des outils d’amélioration des méthodes de scrutin et de réduction des coûts électoraux, notamment des coûts de personnel. Les fabricants de certaines machines vantent leur grande fiabilité et leur résistance à la fraude électorale. Un grand nombre d’entre elles disposent aujourd’hui de fonctions de piste de vérification. Il s’agit, entre autres, des machines à voter électroniques (MVE) qu’utilisent des pays tels que l’Australie, la Belgique, le Bhoutan, le Brésil, les États-Unis, l’Inde et le Venezuela. Bien que le recours aux nouvelles technologies de vote et de dépouillement n’ait fait l’objet d’aucune analyse fiable du rapport coût-efficacité, des preuves tangibles indiquent que les machines à voter électroniques, par exemple, sont susceptibles d’abaisser le coût des élections au fil du temps, notamment ceux liés à l’impression et à l’entreposage des bulletins papier, ainsi qu’au dépouillement. L’utilisation de machines de dépouillement à lecture optique (OMR) peut également à la fois assurer l’exactitude et la rapidité du processus électoral et générer un bulletin papier qu’il sera possible d’examiner physiquement si nécessaire, en cas de problème après la consultation.
Il est important d’évaluer l’utilisation de nouvelles technologies par rapport au niveau de confiance du public dans le processus électoral, de faire participer les parties prenantes aux essais pilotes des nouveaux systèmes électroniques et d’obtenir l’accord des parties prenantes principales sur l’introduction de ces technologies. Du fait de l’opacité potentielle du vote et du dépouillement électroniques, l’utilisation de MVE risque de susciter la méfiance de leurs détracteurs, qui peuvent arguer que cette technologie se prête facilement à la manipulation. Cette réaction n’a rien de surprenant compte tenu des défaillances de la sécurité, des omissions et des erreurs d’enregistrement des votes régulièrement constatées aux États-Unis sur les systèmes d’enregistrement électronique direct des votes (EED) et d’autres machines à voter électroniques.
La précision et l’intégrité de ces machines dépendent des entreprises et des personnes qui les conçoivent, les programment, les testent et en assurent l’entretien. Il est possible de mettre en place des MVE apportant au processus électoral des bénéfices en termes d’intégrité, de coût et de temps à condition d’appliquer les contrôles et de prendre les mesures de responsabilité clairs décrits au chapitre 9 du présent document. Le manuel du Conseil de l’Europe de 2010 relatif au vote électronique fournit un contexte utile pour ces contrôles.
Il n’est pas conseillé aux pays pauvres qui ne parviennent pas à nourrir et à développer leur population de se lancer dans les nouvelles technologies électorales (cartes d’électeurs biométriques, listes électorales informatisées, vote et dépouillement électroniques), qui ne constituent pas une priorité en présence de problèmes pressants tels que la santé et l’éducation. La technologie électorale sera peut-être plus pertinente dans les pays où elle peut être utilisée à d’autres fins. Il convient également de réfléchir à son introduction non seulement en termes de coûts immédiats et d’autres emplois possibles des fonds, mais aussi par rapport aux coûts futurs qu’elle implique et aux compétences humaines que requiert son entretien. L’évaluation de la pérennité de cette technologie doit donc tenir compte des conséquences à long terme.
Dans de nombreux pays, le dépouillement constitue la première cible de l’automatisation et des initiatives de réduction des coûts. Or, de multiples machines automatiques remplissent les deux fonctions d’enregistrement et de pointage des votes. En l’absence de pistes de vérification papier pour chaque vote, ces comptages automatiques risquent de manquer de transparence. Considéré comme le maillon faible des élections, le dépouillement doit toujours être mené de manière transparente et pouvoir être vérifié par un personnel convenablement formé.
L’exigence de transparence à tous les stades du dépouillement et de la comptabilisation des votes risque aussi de limiter les mesures de réduction des coûts applicables au dépouillement manuel. Les parties prenantes des élections de l’Union à Zanzibar (Tanzanie) en 1995 et 2000 et celles des élections de 2007 au Kenya se sont plaint d’événements s’étant produits lors du pointage et ayant eu des conséquences néfastes sur les résultats des élections, et ont souligné l’importance de la transparence du début à la fin du processus. Dans ces deux cas, des personnes inconnues avaient modifié certains résultats après la publication des chiffres des bureaux de vote. Les partis d’opposition étaient convaincus que ces manipulations avaient influé sur l’issue des élections.