Introduction
Bien qu'il soit plus normal que le vote se fasse en un seul jour, dans certains systèmes et certaines circonstances, le vote peut durer plus d'une journée. En ce cas, le vote prend généralement une des formes suivantes :
Plus d'un tour de scrutin
Les systèmes qui demandent deux tours de scrutin occasionneront un surcroît de travail aux gestionnaires électoraux et augmenteront les coûts de l'élection en plus d'ajouter aux besoins dans des domaines très coûteux comme la production de matériel, les préposés au vote et au dépouillement, la logistique et la sécurité. Dans le cas de bulletins sur lesquels les électeurs indiquent leur choix par une marque, la pression sera énorme pour produire à temps les bulletins du deuxième tour. La planification opérationnelle devra étudier attentivement et séparément les besoins de chaque tour. La production et la distribution du matériel en général et surtout pour le deuxième tour devront être attentivement planifiées et on devra tenter d'y trouver des économies en s'assurant qu'à chaque tour on utilise les mêmes emplacements et les mêmes préposés pour le vote et, autant que possible que les formulaires sont conçus pour servir aux deux tours.
Élections échelonnées
Le fait d'échelonner des élections selon les régions géographiques peut produire des économies si l'équipement, les facilités de logistique et de sécurité et le personnel expérimenté sont plutôt rares ou encore si l'envergure même de la population rend difficile la tenue d'une élection en un seul jour (voir election calendar - india, 1996). Coordonné par un organisme électoral national, un tel vote durant plus d'une journée permettra de partager efficacement les ressources et augmentera la capacité de l'organisme. Surtout en ce qui concerne des éléments importants comme la formation et la sécurité, échelonner les besoins par régions géographiques permettra le maximum d'efficacité avec peu de ressources.
Les désavantages de cette méthode concernent surtout le contrôle des renseignements au sujet du dépouillement et des résultats et la possibilité que la tension et les problèmes de sécurité augmentent à cause de la durée du vote. Taire les résultats jusqu'à la fin du vote risque de causer des accusations de négligence professionnelle. Cette approche exige également que le matériel qui est prêt pour le dépouillement soit entreposé en sécurité dans un endroit central. Si le dépouillement se fait et les résultats sont annoncés à mesure que le vote progresse, on risque d'affecter le vote et de créer des tentations de manipulation dans les régions où le vote a lieu plus tard.
Vote durant plus d'une journée dans un même endroit
Cette approche présente plusieurs défis administratifs pour la prestation de services de façon économiquement efficace. Elle peut cependant être une occasion pour que les administrateurs ajustent les services à la lumière des problèmes rencontrés au début en ce qui concerne la logistique, l'affectation du personnel ou les procédures.
Dans l'examen de ces défis, il est utile de faire la différence entre les installations pour le vote spécial comme le vote des absents et les équipes ambulantes (voir Vote des absents, Vote à l'extérieur du pays, Vote par anticipation et Autres formes spéciales de vote), et les bureaux de vote ordinaires.
Bien qu'il soit plus normal que le vote ne dure qu'une seule journée, il y a des circonstances où il est préférable qu'il dure plus d'une journée, à cause du manque d'emplacements de vote ou de facteurs culturels, ou pour augmenter l'accès aux occasions de voter. Il ne s'agit ici ni du vote en deux tours ni des élections échelonnées sur plusieurs jours dans différentes régions géographiques dont on a traité plus haut.
L'efficacité économique de cette approche dépendra de la structure des coûts dans un environnement donné. Cependant, les coûts directs comme les salaires, et les coûts indirects comme la sécurité et les coûts inhérents au maintien de la confiance populaire seront probablement plus élevés que les dépenses reliées aux lieux de vote additionnels (formation, recrutement, transport, matériel et sécurité). En allongeant la période de vote, on peut toutefois augmenter l'accès au vote et le taux de participation. Ceci est particulièrement attrayant dans des pays qui comptent une grande masse d'électeurs ou pour lesquels l'occasion d'un vote populaire est une nouvelle expérience.
Les paragraphes qui suivent traitent des questions qu'il faut bien étudier lors de la planification et de l'opération de bureaux de vote qui seront ouverts durant plus d'un jour pour un seul tour de scrutin.
La sécurité
Les lieux qui servent à un vote durant plus d'un jour exigent un effort additionnel des forces de l'ordre qui doivent être sur place. Surtout dans les situations où le degré de risque est élevé, il faut bien étudier les capacités des forces de l'ordre avant de choisir les lieux de vote et de décider que le vote durera plus d'un jour. De plus, si des électeurs passent la nuit dans les environs des bureaux pour pouvoir voter le lendemain matin, il faudra peut-être assurer la sécurité durant cette période.
Il est préférable que le matériel de vote demeure sur place jusqu'à la fin du vote. Par conséquent, pour un vote durant plus d'une journée, les lieux de vote et le matériel qu'ils contiennent doivent être protégés entre la fermeture à la fin du premier jour et l'ouverture pour le deuxième jour. Ce n'est que dans les cas où les participants politiques ont complètement confiance dans les organismes de l'État, qu'on doit envisager la possibilité d'entreposer le matériel dans les installations des forces de l'ordre pour la nuit. Des procédures semblables à celles ayant trait aux bureaux de vote mobiles sont nécessaires à la fin de chaque jour de vote (voir Clôture des bureaux de vote itinérants).
Les emplacements de vote
Étant donné que le matériel devra être protégé durant la nuit, il faut en tenir compte quand on choisit les emplacements de vote. Des structures temporaires ou des installations au grand air pourraient ne pas suffire.
Matériel et équipement
Tout le matériel et l'équipement devraient quand même être livrés aux bureaux avant le début du vote à moins que le contexte local comme les moyens de transport et la sécurité ne rende l'échelonnage des livraisons plus économique. Pour certains matériaux, les volumes livrés dépendront du nombre de jours que durera le vote. La planification doit prévoir une réserve plus importante de matériel comme les isoloirs et les urnes pour servir en cas de dommages occasionnés par une circulation plus intense dans les bureaux.
Transparence
Il est important que des représentants des participants politiques puissent s'assurer de l'intégrité du matériel électoral tout au long de la durée du vote. Là où la méfiance règne, ceci pourrait nécessiter leur présence sur les lieux durant toute la durée du vote et même durant la nuit. Des solutions plus pratiques mettent l'accent sur les méthodes d'entreposage durant le vote. Des urnes fabriquées de matériel durable seraient préférables à des boîtes de carton par exemple. À la fin et au début de chaque jour de vote, les gestionnaires des bureaux devraient, en présence de représentants des candidats, noter l'état des urnes et des sceaux.
D'autres articles dont l'intégrité est essentielle au succès de l'élection devraient également être entreposés dans des urnes scellées pour la nuit ou d'autres façons sécuritaires. Il pourrait s'agir de listes d'électeurs, de bulletins non utilisés, de formulaires ayant trait au vote des absents, au vote assisté, aux contestations ou à l'admissibilité d'électeurs dont le nom n'apparaît pas sur la liste, des sceaux et d'équipement servant à combattre la fraude. À la fin et au début de chaque jour de vote, les gestionnaires des bureaux devraient également, en présence de représentants des candidats, noter l'état de ces urnes et des sceaux.
Planifier la capacité des lieux de vote
Pour un vote durant plus d'une journée, planifier la capacité des lieux de vote devient plus difficile surtout si le pays en est à sa première élection ou est en période de transition. Il ne s'agit pas simplement de diviser le nombre d'électeurs par le nombre de jours. Il faut analyser les habitudes de travail quotidiennes des électeurs, l'effet des campagnes d'information, l'horaire des services de transport et le comportement passé des électeurs.
Faute de données historiques, il faut prévoir servir entre 60 et 75 % des électeurs chaque jour. Cependant, la participation peut défier la logique et variera du début du premier jour à la fin du dernier selon le contexte social et général de l'élection. Pour assurer un service constant, il faut planifier une réserve de ressources, par exemple des préposés de plus, le dernier jour.
Certaines mesures administratives peuvent aider à améliorer la participation au cours des jours de vote. On pourrait diviser les électeurs et leur assigner un jour pour voter. Une division géographique est efficace mais d'autres divisions comme le nom ou l'emploi risquent de semer la confusion. Il serait préférable que les gestionnaires électoraux communiquent avec les partis politiques et les communautés pour tenter d'organiser un service de transport échelonné sur toute la durée du vote.
Services aux électeurs
Pour un vote durant plus d'un jour, il faut prévoir le nettoyage des bureaux et les services de toilettes et d'eau potable. Surtout dans les pays moins développés, les électeurs devront peut-être effectuer un long voyage fatigant pour se rendre aux bureaux de vote et vouloir passer la nuit sur place si les bureaux sont fermés à leur arrivée. Si des installations ne sont pas disponibles pour le leur permettre, il y a risque de troubles et même de violence. Le choix des lieux de vote et la planification sécuritaire doivent prendre ces éléments en considération.
Affectation du personnel
Le travail dans les bureaux de vote implique de longues heures et se révèle souvent être une expérience très fatigante. Plus il y a de jours de vote, plus le besoin s'impose d'avoir une réserve de préposés bien entraînés pour prendre la relève en cas de maladie ou d'absence ou pour faire face à une participation plus élevée que prévue. Il est également sage que le rapport préposés-électeurs soit ajusté pour permettre des périodes de repos plus fréquentes. Ceci éliminera l'économie apparente créée par l'utilisation de lieux de vote plus grands dotés de moins de préposés.
Renseigner les électeurs
Dans le cas d'un vote durant plus d'une journée, il y a des informations additionnelles à transmettre aux électeurs (voir Localisation et heures d'ouverture des bureaux de vote). En plus d'annoncer les lieux, les dates et les heures du vote, des renseignements diffusés dans les jours qui précèdent le vote peuvent aider à répartir la participation parmi les jours de vote. En plus de faire appel aux médias, on peut aussi échelonner sur la durée du vote, l'affichage invitant les citoyens à venir voter. Durant le premier jour de vote, il faut surveiller le taux de participation pour savoir s'il y a lieu d'amplifier la publicité, soit sur tout le territoire ou dans certaines régions. Il ne faut pas oublier ces éléments dans la planification du budget de l'information.
Vote durant plus que la seule journée prévue
Il y a aussi d'énormes différences administratives si le vote dure plus d'une journée selon la planification ou si on est forcé de le faire à cause de lacunes imprévues sur l'ensemble du territoire ou dans une région donnée. Il est prudent que le cadre législatif prévoie ces possibilités. Les lacunes dont il est question pourraient inclure :
- l'absence ou l'arrivée tardive de matériel ou d'équipement essentiel;
- l'ajournement du vote en raison de menaces, de la violence ou d'un désastre naturel;
- l'impossibilité de servir le jour même tous les électeurs qui se sont présentés (c'est le signe d'une mauvaise planification);
- une décision à l'effet que la participation obtenue le jour prévu ne suffit pas à assurer la crédibilité de l'élection.
Dans ces cas, l'efficacité de la planification de mesures d'urgence (voir Plans de contingence) est essentielle au succès du vote durant plus d'une journée.
Ajouter une ou plusieurs journées au vote n'est pas une décision qu'il faut prendre à la légère, car en plus de l'effet sur les ressources, on retardera le dépouillement au-delà des dates annoncées. Le cadre législatif devrait stipuler que la responsabilité de telles décisions incombe aux agents supérieurs de l'organisme électoral. Dans certains cas, la loi pourrait exiger qu'une telle décision reçoive l'approbation d'un tribunal ou du gouvernement.
Pour garder la confiance du public en de telles circonstances, il faudra :
- s'assurer que le résultat d'un dépouillement partiel n'est pas publié avant la fin du vote;
- s'assurer que le matériel de vote est traité avec sécurité et transparence pour toute la durée du vote;
- faire appel aux ressources additionnelles nécessaires pour s'assurer que l'horaire publié pour le dépouillement est respecté dans toute la mesure du possible.