Objectif général
Aujourd'hui, il est devenu pratique courante que les participants politiques et leurs représentants (voir Représentants des partis et des candidats), les organisations non gouvernementales (ONG) locales (voir ONG locales et groupes communautaires) et les groupes parrainés par des organismes gouvernementaux et non gouvernementaux internationaux (voir Organisations internationales) observent le déroulement d'élections afin de déceler et de prévenir les erreurs et les tentatives de manipulation. (Pour en savoir plus sur les cadres légaux des programmes d'observation, voir Observation du vote, et sur les rapports entre les organismes électoraux et les groupes d'observation, voir Gestion de l'observation, Invitation et accréditation des observateurs et Liaison avec les ONG et les groupes d'observateurs.)
Types d'observation
Il existe deux types d'observation d'élection :
- l'observation à court terme, qui porte sur le jour de l'élection et le dépouillement du vote;
- l'observation à long terme, qui évalue l'ensemble du processus d'élection.
Ce dernier type d'observation peut porter sur toutes les activités, depuis la formation de l'organisme électoral, l'inscription des électeurs, l'éducation de l'électorat, les mises en candidature et l'inscription des partis politiques, les questions touchant les campagnes électorales et les médias, le vote et le dépouillement, jusqu'à l'entrée en fonction des élus. L'observation à long terme est la plus efficace des deux types, car elle laisse le temps au groupe d'observation d'apprendre à connaître le contexte dans lequel se déroulent le scrutin et le dépouillement. Les observateurs peuvent ainsi formuler des conclusions plus éclairées et des recommandations plus exhaustives.
Comme les ressources financières et humaines disponibles suffisent rarement pour assurer l'observation à long terme de l'ensemble du processus électoral, on doit faire des compromis. Le plus efficace consiste à réduire la portée de l'observation à long terme tout en consacrant une attention soutenue à l'ensemble des activités ou à un échantillon représentatif le jour du vote et du dépouillement. (Pour en savoir plus sur le déploiement de l'observation, voir Déploiement des observateurs.)
Le choix de la période d'observation (court terme, long terme ou mixte) dépend des facteurs suivants :
- les objectifs de l'opération d'observation;
- les ressources financières, humaines et logistiques disponibles;
- le contexte de l'élection - administration et campagne.
Lorsqu'on choisit l'observation à long terme, les programmes d'observation des opérations de vote doivent être intégrés à ceux de l'ensemble de l'élection. Pour un exemple de principe directeur en matière d'observation d'élection, voir handbook for election monitoring - ndi.
Motifs de l'observation
Que les observateurs représentent des groupes politiques participant à l'élection ou des organismes indépendants, leur présence a pour principal objectif de favoriser l'ouverture et la transparence des opérations de vote afin d'accroître la confiance de la population à l'égard du processus électoral et de ses résultats. L'observation a un effet dissuasif sur les pratiques irrégulières et les tentatives de fraude. Les rapports des observateurs, lorsqu'ils sont bien documentés, sont également très utiles pour évaluer les cadres électoraux et le déroulement des opérations de vote, afin qu'ils se déroulent efficacement. Les législateurs, les militants politiques et le personnel électoral peuvent s'inspirer de ces rapports pour améliorer les systèmes électoraux.
L'observation des élections par des organismes indépendants, nationaux ou internationaux, comporte d'autres avantages importants. L'influence et la réputation des organismes parrains peuvent contribuer à faire échec aux pratiques répréhensibles et aux allégations non fondées d'irrégularités. Les équipes d'observation internationales mettent à profit leur connaissance de pratiques différentes pour favoriser la conformité aux normes internationales.
Les équipes d'observation indépendantes doivent s'acquitter de leur mission avec impartialité et diplomatie. En effet, les populations comptent souvent sur les évaluations effectuées par des observateurs indépendants pour juger de la liberté et de l'équité des processus électoraux. Elles considèrent parfois même leur présence comme une assurance de légitimité. (Pour en savoir plus sur les responsabilités des équipes d'observateurs, voir Droits et responsabilités des observateurs.)
Considérations structurelles
Les organismes qui préparent un programme de surveillance ou d'observation d'élections doivent étudier le contexte général qui prévaut dans le pays ainsi que ses ressources et sa structure internes. Des caractéristiques comme l'étendue du pays, son infrastructure, le niveau d'alphabétisation de sa population, son développement économique et sa démographie sont des éléments clés de l'évaluation du contexte.
Outre ces caractéristiques générales, les groupes d'observation doivent prendre en considération les facteurs liés à l'élection, notamment le type d'élection et les circonstances dans lesquelles elle a lieu. Le type d'élection - partielle ou générale, nationale, provinciale ou locale, élection présidentielle ou référendum - aura des conséquences différentes pour la société. Les méthodes d'observation doivent être adaptées à l'importance de l'élection et aux pouvoirs qu'auront les élus.
La méthode d'observation diffère selon que l'élection a lieu dans un environnement "régulier" et stable ou qu'elle constitue une étape d'un processus de transition politique majeure, par exemple, lorsqu'elle sert à :
- résoudre un conflit;
- assurer la légitimité des structures d'un gouvernement après une guerre;
- établir la souveraineté d'un nouvel État;
- consolider des assises démocratiques récentes.
Parmi les facteurs importants liés au contexte, on compte :
- la maturité et la visibilité des partis politiques;
- les cadres administratif et légal de l'élection;
- la liberté d'expression à l'égard des enjeux électoraux accordée aux médias et à la population et celle qu'ils s'autorisent.
Les facteurs à prendre en considération au chapitre des ressources internes du groupe d'observation sont les suivants :
- la capacité d'exercer une surveillance continue ou à long terme (s'applique plutôt aux participants politiques locaux ou aux groupes indépendants qu'aux missions internationales, qui ne sont généralement invitées à observer qu'un événement électoral en particulier);
- le caractère permanent ou à court terme de l'infrastructure d'observation (personnel, logistique et installations);
- les compétences électorales et le nombre d'observateurs disponibles (voir Sources et recrutement des observateurs).
Objectifs de l'observation
Les objectifs des groupes d'observation et la portée de leurs activités doivent être clairement définis et compris par tous les membres. Ils doivent être communiqués aux organismes électoraux, aux participants politiques et au public. Ces objectifs ne sont pas les mêmes pour les représentants des candidats ou des partis en lice à l'élection et pour les observateurs indépendants.
Les représentants des partis et des candidats sont généralement préoccupés par le traitement accordé aux candidats et aux sympathisants, soit à l'échelle du processus électoral, soit à des étapes précises. Partisane dans son approche, cette forme d'observation repose sur les mécanismes de contrôle mis en oeuvre par les participants politiques dans un but de transparence et d'ouverture (voir Représentants des partis et des candidats).
Les groupes indépendants limitent souvent leur observation à certains aspects techniques risquant de poser problème. Ils peuvent aussi tenter d'évaluer l'intégrité et l'équité du processus électoral et de son contexte. Quel que soit l'objectif poursuivi, l'organisme d'observation doit disposer des compétences et des ressources suffisantes pour l'atteindre. Une évaluation exhaustive du caractère libre et équitable des processus électoraux est impossible à obtenir en l'absence d'observateurs à long terme ou si l'observation ne porte que sur certains aspects du vote ou de son dépouillement.
Les paragraphes suivants portent sur l'observation par des groupes indépendants. (Pour en savoir plus sur l'organisation de la surveillance par des représentants des partis ou des candidats, voir Rôle comme observateurs.)
Cadre d'observation
Pour être efficace, le cadre d'observation d'une élection doit comprendre les éléments suivants :
- une structure de gestion de l'observation;
- la description des activités électorales qu'il faut surveiller;
- la planification détaillée de l'observation;
- la description des processus électoraux observés ainsi que du personnel de scrutin et des participants politiques;
- une méthode d'observation crédible et ouverte fondée sur des documents probants et des normes de comparaison reconnues des processus électoraux;
- des observateurs compétents et sensibles au contexte de la communauté et de l'élection (voir Sources et recrutement des observateurs et Formation des observateurs);
- la capacité et la volonté de diffuser publiquement les résultats de l'observation par l'entremise de porte-parole crédibles;
- des documents de référence sur lesquels les observateurs pourront appuyer leurs rapports (voir Documents de référence à l'intention des observateurs);
- des ressources financières, administratives et logistiques suffisantes (voir Observateurs).
Planification
Les projets d'observation doivent reposer sur un plan de gestion de l'observation qui
- correspond aux objectifs et à la portée de l'observation;
- convient au type d'élection et aux circonstances;
- a un lien avec les activités électorales clés;
- répartit efficacement les ressources disponibles.
L'effort consenti et la durée de la période d'observation sont tributaires des ressources financières et humaines disponibles ainsi que de la compétence du personnel. Lorsque le manque de ressources empêche l'observation à long terme de l'ensemble du processus électoral, on peut fonder les évaluations des risques sur le déroulement des élections précédentes et la situation politique et administrative du moment. Cette méthode permet de cibler les activités ou les régions où doivent être concentrées les ressources d'observation.
Les activités essentielles comme le vote et le dépouillement des bulletins constituent tout naturellement les cibles premières de l'observation. Or, d'autres étapes cruciales comme la compilation des registres électoraux, l'inscription des candidats et des partis, la liberté de faire campagne et la formation du gouvernement peuvent être aussi importantes que les activités qui se déroulent lors de la journée de l'élection.
Observation globale ou partielle
Le jour de l'élection, les ressources peuvent être insuffisantes pour réaliser une observation globale ou exhaustive. On peut alors observer le déroulement des élections à certains endroits ou surveiller entièrement, ou presque, tous les secteurs de l'activité électorale pendant de courtes périodes. Dans le premir cas, on s'assure que les circonscriptions observées sont représentatives en tenant compte de l'évaluation des risques, de leur situation géographique, de leur taille et de la composition de l'électorat. Dans le deuxième cas, le calendrier des visites d'observation doit être souple et comporter un certain élément de surprise pour garantir que les opérations de vote se déroulent comme d'habitude.
Éléments du programme d'observation
Le programme d'observation doit porter sur les éléments suivants :
- les objectifs et la portée de l'observation;
- la structure de gestion;
- le budget et la comptabilité;
- la nature et le lieu des activités électorales devant être surveillées;
- la stratégie de collecte d'information;
- la logistique;
- le recrutement des observateurs;
- la production et la distribution de documents destinés aux observateurs;
- le programme de formation des observateurs;
- le plan de déploiement des observateurs;
- la structure des rapports et l'échéancier de leur production;
- la stratégie de diffusion de l'information;
- le soutien administratif des observateurs.
Communication de l'information
Les groupes d'observateurs doivent consulter les autorités responsables des élections, les administrateurs, le public, les participants politiques et les groupes d'intérêt concernés afin d'obtenir de l'information et de diffuser efficacement leurs conclusions. Les programmes d'observation varient d'un pays à l'autre, mais quels qu'ils soient, les principes suivants permettent d'accroître leur efficacité :
Le droit d'accès à l'information sur l'élection et les participants doit avoir été négocié avec les organismes électoraux bien avant le début de l'observation, de même que la portée de l'observation.
Les réseaux d'information doivent avoir été définis. On doit désigner des personnes-ressources dans l'administration électorale et les organisations politiques et nommer les porte-parole du groupe d'observation. Tous les membres du groupe doivent connaître précisément leur rôle en ce qui concerne la collecte et la diffusion de l'information, en particulier avec les représentants des médias.
On doit définir les publics visés et des méthodes de communication appropriées. La participation des médias est requise lors des conférences de presse ou de l'émission des communiqués. Une attention particulière doit être accordée aux rapports et aux bulletins publiés. Il importe de veiller à ce que leurs conclusions reposent sur des preuves tangibles et ne soient pas diffusées prématurément. Dans les pays où les populations sont peu alphabétisées et où la pénétration des médias est faible, des méthodes informelles conviennent souvent davantage. On peut par exemple établir des contacts personnels lors d'assemblées communautaires ou de rencontres avec des personnes influentes de la collectivité.
Une stratégie globale de diffusion de l'information doit être mise en oeuvre. Elle doit porter sur tous les aspects décrits ci-dessus et faire appel à toutes les méthodes de communication formelles et informelles disponibles. Cette stratégie doit, enfin, viser à assurer la collecte et la diffusion de l'information en fonction d'un échéancier précis.
Coordination des groupes d'observation
Une coordination adéquate entre les différents groupes d'observateurs accroît l'étendue de l'observation, évite le travail superflu et permet une meilleure exploitation des ressources disponibles. La coordination des efforts des représentants des partis ou des candidats (en particulier pour ceux qui ne détiennent pas le pouvoir) vise à assurer la normalisation des méthodes et des règles d'observation et de la présentation des rapports.
L'effort de coordination du travail des observateurs indépendants permet d'englober un plus grand nombre de tâches, notamment :
- l'attribution des responsabilités à des organismes différents pour certains endroits ou certaines activités électorales;
- le partage de l'information et la production conjointe des rapports;
- le partage des moyens et des méthodes pour une exploitation optimale des ressources logistiques ou techniques rares, comme le transport, le logement, le matériel informatique ou les services des analystes spécialisés;
- le partage de l'information recueillie est efficace et perturbe moins le déroulement de l'élection que lorsque des groupes distincts s'adressent plusieurs fois au personnel de scrutin et aux participants pour obtenir les mêmes renseignements;
- la coordination des déplacements, qui permet de maximiser la sécurité;
- la mise en commun des séances de compte rendu et des évaluations des résultats, qui favorise l'uniformité des rapports finaux et l'amélioration des missions d'observation futures.
Les groupes d'observateurs doivent coordonner le plus possible leurs activités.
Problèmes possibles
Les conclusions et les rapports des observateurs, en particulier ceux des groupes indépendants, constituent de précieux outils pour les partisans politiques. Des objectifs flous et une mauvaise planification, une méthodologie déficiente, une présence insuffisante des observateurs, un personnel incompétent et des conclusions non fondées minent la crédibilité du travail d'observation et peuvent contribuer à une mauvaise utilisation des conclusions des observateurs. Quelquefois, des groupes d'observateurs faisant appel à des méthodes différentes et travaillant dans des régions différentes pendant une période différente tirent des conclusions divergentes et parfois contradictoires sur la même élection. C'est souvent le cas lorsque plusieurs groupes d'observation de taille réduite travaillent sur des échantillons restreints et pas toujours représentatifs des activités électorales et que leurs évaluations ne sont pas encadrées par des normes communes.
L'étendue géographique et la gamme d'activités observées doivent être assez vastes pour établir de façon indubitable la légitimité du processus d'observation. Il semble que les équipes d'observation à long terme, qui connaissent mieux l'ensemble du processus électoral, sont plus réticentes à déclarer d'emblée une élection libre et équitable que ne le sont les observateurs à court terme. Tout projet d'observation doit donc pouvoir compter sur la participation de professionnels à long terme. Quand elle est régie par une structure centralisée, l'observation peut se faire sur une période plus longue. Les méthodes et les normes d'évaluation et de production des rapports sont souvent plus uniformes, et les coûts de l'observation moindres.
De plus, les évaluations des observateurs doivent traiter des aspects techniques et démocratiques de l'élection et non pas des aspects politiques comme la stabilité future du pays. Il est parfois plus difficile de faire abstraction des aspects politiques, surtout lorsque l'observation est financée par des organismes ou des gouvernements qui sont influencés par leurs propres priorités électorales.